Cap Gris-Nez, sur les côtes françaises, face à l'Angleterre. Un Allemand d'âge mûr revient sur ce littoral où en 1942 il tenait une batterie d'observation. Il y avait rencontré une Française qui ramassait des coquillages. Ensemble, ils ont fait le serment de se retrouver plus tard, sur les lieux même de leur rencontre... Le premier tome d'une épopée au coeur de la Seconde Guerre mondiale. (Casterman)
La guerre, c’est celle de 1939-1945, les rêves ce sont ceux
de Julien, réquisitionné pour le STO avant d’entrer dans la résistance,
d’Archie, soldat anglais se battant en Afrique du Nord, d’Erwin, jeune soldat
allemand artiste peintre dans le civil en poste sur les plages du nord de la
France, et enfin d’un américain tête brûlée qui s’engage après l’attaque de
Pearl Harbor.
A travers cette galerie de personnages venant d’univers
différents, Maryse et Jean-François Charles tissent une histoire entre passé et
présent, où les cicatrices se referment doucement et où le bonheur peut enfin
se construire.
Erwin a mis plus de quarante ans avant de pouvoir revenir à
l’Ouest, particulièrement en France sur la Côte d’Opale pour y retrouver la
femme de sa vie. Il est accompagné de sa jeune nièce, Marian, une jeune femme
désabusée : "Des promesses ! Il y a ceux qui les font sans y
croire et puis, les connards comme nous qui s’y laissent prendre et finissent
par se retrouver seuls.", souffrant d’une blessure passée qui la laisse à
vif dans ses émotions et ses sentiments : "Toute vie est précieuse,
Marian. Il ne faut ni la galvauder, ni la refuser.".
Avec elle, il parcourt les lieux de sa jeunesse, il lui
raconte son histoire, ses sentiments de soldat qui ne sait pas trop ce qu’il
vient faire dans cette guerre ni pourquoi il faut se battre, jusqu’à son coup
de foudre pour une magnifique et sauvage jeune fille française rousse, Opale :
"Max était là. On discutait de ce qui s’était passé et on s’estimait
heureux de s’en être sortis sans la moindre égratignure quand je vis sur la
plage une fille serrant un châle contre elle, les cheveux cuivrés au vent.
C’était tellement insolite, tellement incroyable … cette fille qui marchait
sereinement dans ce paysage tourmenté comme si la folie des hommes n’avait pu
l’atteindre.".
Mais Opale n’est pas une jeune fille ordinaire, elle ne
parle pas mais n’est pas pour autant simple d’esprit.
C’est sans doute cette très belle histoire d’amour qui m’a
le plus séduite dans cette bande dessinée.
Elle est non seulement hautement romantique mais elle revêt
une forme de beauté qui s’accorde bien aux paysages des plages du Nord de la
France, outre le fait qu’elle symbolise l’entente franco-allemande en plein
conflit mondial.
A côté, il y a un narrateur qui s’adresse à une Laure sans
que l’on sache de qui il s’agit, un anglais qui vient d’acheter une maison avec
sa femme pour y passer leurs vieux jours et un américain accompagné de son
petit-fils pour lui transmettre son histoire.
Le scénario signé Maryse Charles est loin de ne contenir que
des regrets et de l’amertume ressentis par certains des personnages :
"Souvent, j’imagine qu’on pourrait tout recommencer … autrement … sans
cette putain de guerre qui nous a laissé à tous des cicatrices.", il y a
aussi beaucoup d’espoir et surtout de l’amour.
Le scénario est bien construit, oscillant entre passé et
présent, et le cadre du Nord de la France outre qu’il soit original est
plaisant à lire et à voir.
Quant aux dessins et aux couleurs ils sont de Jean-François
Charles et sont une autre des raisons pour lesquelles j’ai apprécié cette bande
dessinée.
Ils tiennent plus de l’aquarelle que du dessin, les couleurs
sont diluées dans des tons pastelle, c’est visuellement très beau et agréable à
regarder.
"La terre entre les deux caps" est une entrée en
matière réussie pour cette série "War and Dreams" qui semble
prometteuse, fortement poétique et porteuse d’un message d’espoir et d’amour
universel.
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