dimanche 19 mars 2017

La route de Cormac McCarthy


L’apocalypse a eu lieu. Le monde est dévasté, couvert de cendres et de cadavres. Parmi les survivants, un père et son fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d’objets hétéroclites. Dans la pluie, la neige et le froid, ils avancent vers les côtes du Sud, la peur au ventre : des hordes de sauvages cannibales terrorisent ce qui reste de l’humanité. Survivront-ils à leur voyage ? (Points)

Depuis que j'ai lu un excellent roman post-apocalyptique (i.e. "Station Eleven" d'Emily St John Mandel) j'ai eu envie de continuer dans cette voie littéraire, je me suis enfin décidée à sortir du rayonnage de bibliothèque ce roman de Cormac McCarthy.
Peut-être aurai-je dû le sortir plus tôt, avant de découvrir le roman d'Emily St John Mandel, ainsi je l'aurai sans doute encore plus apprécié qu'aujourd'hui.
Car si je reconnais à ce roman de grandes qualités, je l'ai trouvé un cran en-dessous de "Station Eleven", disons qu'il n'a pas la même répercussion émotionnelle.
Il faut dire que "La route" se caractérise par un dépouillement stylistique, constitué de courts paragraphes non découpés en chapitres, ce roman tourne exclusivement autour de deux personnages qui ne sont nommés que le père et l'enfant.
Difficile de s'attacher ainsi à eux sans pouvoir mettre sur eux un prénom, et pourtant il est tout aussi difficile de rester indifférent à leur sort.
L'apocalypse a donc eu lieu : quelle forme a-t-elle prise, quelles conséquences, tout cela n'est qu'effleuré.
Apparemment il y a eu de grands incendies, le ciel reste toujours gris et ponctue les journées d'averses voire d'orages, les villes ne sont plus, une bonne partie de la population a disparu, quant à celle restante elle est divisée en petits groupes dont la plupart sont dangereux et une infime minorité est du côté des gentils.
Le phénomène a-t-il touché exclusivement les Etats-Unis ou le monde entier ?
Là encore, le mystère reste entier, tout comme ce qui s'est passé avec la mère de l'enfant.
Il y a donc un père et son fils, ils marchent, ils se protègent, ils se méfient, en somme ils survivent.
Mais ce que j'aime tout particulièrement dans les romans post-apocalyptiques, c'est qu'il y a toujours un fond mythologique (je garde encore un souvenir profond de "Je suis une légende" de Richard Matheson).
D'ailleurs, pour faire une brève parenthèse avec ce roman, il est là aussi question de savoir si l'on est le dernier homme sur terre et comment on peut en être sûr.
Ici, il est à la fois question d'une quête sans fin, celle du paradis perdu, ainsi que du mythe de Sisyphe, puisque tel cet homme poussant inlassablement au sommet d'une montagne une pierre qui redescend sitôt le sommet atteint ce père et son fils doivent inlassablement reprendre la route.
Pas étonnant que bien souvent le père ait envie que tout soit fini : "Il y avait toujours une part de lui-même qui souhaitait que ce fût fini.", car lui encore plus que son fils a connu le monde passé et voit ce qu'il est devenu : une terre hostile où le danger est omniprésent, c'est pourquoi il envie les morts, ceci incluant sa propre femme et mère de leur enfant : "Rares étaient les nuits où allongé dans le noir il n'avait pas envié les morts.".
Outre cet aspect mythologique, ce roman repose aussi grandement sur la relation père-fils qui y est développée, cet homme qui s'acharne à maintenir en vie son fils et à la protéger, cet homme qui repousse chaque jour ses limites uniquement pour l'amour de ce petit être qui est à ses côtés : "Il y avait des moments où il était pris d'irrépressibles sanglots quand il regardait l'enfant dormir mais ce n'était pas à cause de la mort. Il n'était pas sûr de savoir à cause de quoi mais il pensait que c'était à cause de la beauté ou à cause de la bonté.", cet homme qui même malade ne renonce pas et continue vers le but qu'il s'est fixé.
Malgré son sérieux et une certaine gravité pour son âge, l'enfant n'a pas toujours envie de lui obéir, il ne comprend pas non plus tout le temps les motivations de son père, il est encore naïf avec un cœur tendre et s'oppose parfois violemment à son père.
Cette relation m'a fait penser à celle au centre du roman "Room" d'Emma Donoghue, si les circonstances sont différentes il y a aussi des points communs.
Si le fond et la forme de l'histoire ont su me séduire, je dois aussi reconnaître que ce livre déstabilise par son apparente froideur et son détachement des personnages.
Il y a aussi beaucoup de mystères, ainsi l'auteur ne donne que quelques indices quant aux groupes qui errent sur les routes et desquels il faut se méfier, tout ce qui est au-delà du père et de l'enfant reste elliptique, de quoi quelque peu frustrer car j'ai été piquée par la curiosité d'en savoir un peu plus.
Pour cela il va peut-être falloir regarder l'adaptation cinématographique qui en a été faite, mais j'ai la nette impression qu'elle ne répondra pas à beaucoup de questions.
Toutefois je suis curieuse de la voir car ce roman, de prime abord, me paraît délicat à transposer à l'écran.

"La route" de Cormac McCarthy fait partie de ces romans de science-fiction post-apocalyptique qui marquent le lecteur et que l'on a envie de relire dans quelques années car bien souvent toutes les subtilités qui le composent ne nous ont pas été révélées à la première lecture.

2 commentaires:

  1. Tout à fait d'accord !!! C'est du très bon roman, ça ! :)
    (Commentaire hautement constructif...)

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