samedi 28 février 2015

Ellen Foster de Kaye Gibbons


A la mort de ses parents, Ellen Foster, onze ans, est ballottée de foyer en foyer. Chez sa grand-mère peu affectueuse, chez son professeur de dessin où elle connaît un intermède paisible, puis chez sa tante et sa cousine, où les choses se passent si mal que, le soir de Noël, Ellen décide tout bonnement de s'en aller et de frapper à la porte de Laura, une mère d'accueil. (Rivages / Christian Bourgeois)

Ellen Foster a onze ans, elle a assisté au suicide de sa mère poussée par un mari qui la réduisait en esclave et n'aime pas son père qui boit, la frappe parfois, ramène des types louches à la maison et ne s'occupe pas d'elle : "Mon papa, c'est simple, c'est un défaut de fabrication.".
Ellen en a assez, sa mère chérie est morte, son père détesté aussi, il faut dire qu'elle a souhaité sa mort très fortement, sa grand-mère ne l'a recueillie que pour lui faire payer les fautes de son père et elle aussi est morte, et ses tantes ne l'apprécient guère et n'ont pas envie de s'encombrer de cette gamine qui leur rend bien leur non-amour : "Qu'est-ce que vous voulez faire quand le juge est là à parler de la famille, pierre angulaire de la société, alors que vous, vous savez bien que la vôtre elle a jamais rien eu de la colonne dorique ou autre chose, ça serait plutôt et ça a toujours été du genre vieille brique qui s'effrite ?".
Qu'a cela ne tienne, Ellen va alors frapper à la porte de Laura, une mère d'accueil, et se propose d'être l'une des filles de cette "foster family", famille d'accueil.

Si Ellen n'a que onze ans, elle a la sagesse d'une grande et n'a pas eu une vie facile.
Elle est la narratrice de sa propre histoire et son récit alterne entre présent dans sa famille d'accueil et passé dans sa famille de sang qu'elle ne supporte plus.
Ellen s'est prise en charge elle-même, grand bien lui en a fait : "Je trouve que je m'en suis pas si mal tirée si on compare au reste de ma famille, vu que les autres sont tous ou bien morts ou bien cinglés.".
Car niveau famille, Ellen n'est pas gâtée, hormis sa mère ils ont tous plus ou moins un problème d'ego ou psychologique, parfois les deux.
Ou alors ils n'en ont rien à faire d'elle.
J'avais déjà énormément aimé ma première lecture de Kaye Gibbons, "Une femme vertueuse", j'ai eu de nouveau un gros coup de cœur pour cette auteur a la plume si juste et si magnifique.
J'ai été énormément touchée par le destin de cette jeune Ellen Foster qui sait se rendre sympathique auprès du lecteur et ce dès les premiers mots qu'elle prononce.
J'ai suivi avec tristesse et espoir son parcours, priant très fort pour qu'elle s'en sorte et aimant à croire que les contes de fées sont possibles.
Cette petite fille m'a particulièrement touchée car elle ne passe pas son temps à s'apitoyer sur son sort et elle se prend en main pour se permettre de s'offrir un destin à la hauteur de son mérite, mais elle donne aussi l'impression à travers ses mots de ne plus vraiment être une enfant, de ne plus savoir rire ou sourire, car tout chez elle et déjà trop calculé, trop adulte, mais c'est la vie et ses aléas qui l'ont rendue ainsi.
Kaye Gibbons a décidément le chic pour se mettre dans la peau de personnages narrant leur histoire de façon "conte autour du feu", et elle sait surtout retranscrire très justement à l'écrit toute la subtilité du Sud des Etats-Unis.
Ici encore elle dévoile les petites mesquineries de cette région des Etats-Unis, en mettant notamment en avant le racisme omni-présent (même Ellen a du mal à aller au-delà des préjugés raciaux qui lui ont été inculqués dès son plus jeune âge).
Et si Ellen est une jeune enfant ayant trop vite grandi, il n'en demeure pas moins qu'elle sait mettre de l'humour et du grotesque dans son récit même dans les pires situations de sa vie.
Une telle maîtrise m'a fait dire "quel style !" tout au long de ma lecture, et dire qu'il s'agit du premier roman de Kaye Gibbons !
Cela relève du coup de maître et annonçait une carrière très prometteuse à cette auteur qui est une grande conteuse et sait si bien manier les mots,
Parfois au cours de ma lecture je me suis prise à rêver d'une Ellen Foster sur grand écran, il faut dire que ses aventures se prêtent assez bien au jeu de l'adaptation cinématographique.
Après recherche il semblerait qu'un téléfilm ait été fait, je suis curieuse de voir le résultat à l'écran.

"Ellen Foster" de Kaye Gibbons est un premier roman d'une telle maîtrise, d'une telle sensibilité et d'une telle beauté que c'est à en faire pâlir les plus grands noms de la littérature américaine.
Un énorme coup de cœur qui se confirme pour cette auteur très talentueuse.

Livre lu dans le cadre du Challenge Romancières américaines


Livre lu dans le cadre du Challenge Petit Bac 2015 - Catégorie Prénom : ELLEN


Livre lu dans le cadre du Plan Orsec 2015 pour PAL en danger / Chute de PAL


Adèle Blanc-Sec Tome 4 Momies en folie de Jacques Tardi


Momies ramenées à la vie, sectes, sacrifices humains, .. Nous retrouvons dans ce nouvel épisode des aventures d'Adèle Blanc-Sec tous les éléments qui ont fait le succès de cette série. Après la disparition de sa momie, notre héroïne est à nouveau entraînée dans une rocambolesque histoire de savants fous. Échappant de justesse à plusieurs tentatives de meurtres, pourra-t-elle déjouer les plans de la maléfique Clara Benhard et de l'étrange commissaire principal Dugommier ? (Casterman)

Dans ces nouvelles aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec, vous serez confronté à : "Un sarcophage ! La sculpture satanique des catacombes et Pazuzu !", mais aussi à des tentatives de meurtre sur la personne d'Adèle Blanc-Sec : "Bon, ce n'est pas grave, l'humanité ne se plaindra pas de la perte de ce grossier personnage, mais par contre elle se réjouira de la disparition d'Adèle Blanc-Sec !", à un nouveau savant fou s'intéressant à la vie après la mort (décidément c'était une marotte dans les années 1910 !) : " "L'étude de la vie après la mort" ! On croit rêver. Encore un qui finira mal ! Ils ont ramené à la vie le ptérodactyle du jardin des plantes et l'ont tué, ils ont ramené à la vie le pithécanthrope et ils l'ont tué ... Tiens, vous avez une momie ! s'est esclaffé Mouginot ... Heureusement qu'elle est morte et bien morte ...", ainsi qu'à la disparition mystérieuse de la momie d'Adèle : "On m'a piqué ma momie ou elle est partie toute seule ? Hier soir j'ai eu l'impression qu'elle bougeait mais n'était-ce qu'une impression ? Est-ce qu'une momie d'Egypte rapportée par un arrière-grand-père peut se faire la malle comme ça ?".

Si tout ça ne vous donne pas envie de découvrir les aventures d'Adèle Blanc-Sec, je ne sais pas ce qui le fera !
De l'aventure, du mystère, encore de l'aventure et encore du mystère, voilà tout ce qui compose ce nouvel opus des péripéties de l'intrépide et fougueuse Adèle Blanc-Sec à qui rien ni personne ne fait peur.
Adèle a repris ses activités d'auteur de livres où elle narre de façon romancée ses aventures et vit sans se soucier des titres des journaux mais en craignant la vengeance de ses ennemis jurés : la maléfique comédienne Clara Benhard et le commissaire principal Dugommier.
Et puis sa momie disparaît, et ça l'inquiète, et puis on essaye de l'attirer dans des guets-apens pour l'assassiner, ça l'inquiète beaucoup, et puis on lui apporte une statuette maléfique et elle s'interroge.
Et pour découvrir la suite, vous n'avez qu'à lire cette bande dessinée !
J'ai retrouvé avec plaisir toute la malice de Jacques Tardi dans sa façon de narrer les histoires d'Adèle, avec une narration qui s'attache à décrire des personnages totalement inintéressants pour l'histoire mais qui vont s'y trouver mêlé contre leur gré, et surtout des personnages machiavéliques qui n'arrivent pas à réussir leur coup, à l'image du dangereux Thomas Rove dont la mission est d'éliminer Adèle : "Récapitulons : j'arrive à l'heure prévue, c'est la bonne adresse; j'ai la clef ... Tout va bien jusque-là ... Je sais où est la chambre ... Je sais qu'elle est chez elle ... Je passe à côté de la vitrine et alors l'affreuse saloperie de momie dégueulasse me saute dessus. Je tire deux fois ... rien  à faire : l'épouvantail me balance un morceau de verre dans la gueule. Pour un coup foireux, c'est un coup foireux ...".
Il y a beaucoup d'humour dans cette bande dessinée et c'est l'un de ses points forts, avec la pétillante et attachante Adèle.
J'aime comment ce tome mélange les trois premiers en y faisant intervenir tous les personnages déjà croisés, il est sûr que pour le lire il faut avoir lu les précédents car il y a de nombreuses allusions à ceux-ci.
Et puis j'apprécie l'univers créé autour de cette héroïne et de Paris, avec des monstres, des fous furieux, des bizarreries scientifiques, c'est de l'absurde comme je l'aime et qui permet de passer un bon moment de lecture.

"Momies en folie" est une aventure savoureuse de la non moins délicieuse Adèle Blanc-Sec qui se dévore avec plaisir et dont je dirai en guise de conclusion qu'il ne faut pas oublier que la mort n'est pas une fin !

Livre lu dans le cadre du Plan Orsec 2015 pour PAL en danger / Chute de PAL


jeudi 26 février 2015

Une fenêtre au hasard de Pia Petersen


Une femme solitaire observe quotidiennement une fenêtre vide de l’immeuble d’en face. Pour tromper son isolement, elle écrit, s’invente des histoires, caressant l’espoir que quelque chose se passe un jour de l’autre côté de la rue des Martyrs. Quand un homme emménage dans l’appartement, il devient l’objet de toutes les attentions de celle qui l’épie désormais tendrement, passionnément – et qui s’achète bientôt des jumelles… (Actes Sud)

Elle est solitaire, elle ne parle pas beaucoup aux autres, elle est rongée par ses démons intérieurs, elle se dit moche, peu intelligente, peu intéressante, en somme elle se confond avec les murs qu'elle rase à longueur de journée.
Mais elle s'est enfin trouvée un sens à sa vie, celle de l'homme de l'appartement d'en face, qu'elle observe et épie dès qu'elle le peut : "Si seulement j'avais été suffisante, plus belle ou intelligente, plus capable ou plus drôle, ma vie aurait été différente mais je ne suis rien de tout cela et finalement mon contenu de vie se résume à une fenêtre par laquelle je regarde une autre fenêtre et faute d'avoir une vraie vie, je vole celle des autres. Celle de l'homme en face.".
Lui, il vient d'emménager dans le quartier, il est journaliste, il a du mal à s'attacher à une femme, il fuit tout lien d'attachement et tout sentiment amoureux, par peur : "Avec l'amour on se perdait et c'était effrayant, il avait peur de se donner et s'oublier et peur qu'on ne lui fasse mal, peur de ne plus pouvoir se raisonner et se contrôler et il se dit que c'était terrible et lâche aussi et pas vraiment une vie.", mais il se sent épié, et il va se prendre au jeu d'imaginer qui l'observe derrière sa fenêtre.

La thématique de ce roman avait beaucoup pour me plaire, car j'aime regarder de temps à autre par la fenêtre pour voir ce qui se passe chez mes voisins, et j'ai encore en mémoire le film de référence sur le sujet, "Fenêtre sur cour" signé d'Alfred Hitchcock.
Au final, je ressors mi-figue mi-raisin de cette lecture, parce que l'histoire et son déroulement me laissent un goût d'inachevé, peut-être aussi parce que j'attendais une autre fin que celle choisie par l'auteur.
Car ce roman est bel et bien une histoire d'amour, dans un Paris en pleine canicule, la chaleur n'est pas que dehors elle habite aussi les deux personnages principaux.
C'est surtout le rendez-vous manqué de deux solitudes, de deux personnes que tout oppose et qui finalement pourraient bien être ce que l'on appelle des âme-sœurs dans la littérature romantique.
Et c'est sur ce dernier point que le rendez-vous a été quasiment raté de mon côté, bien que d'une certaine façon la fin laisse entrevoir un espoir et surtout libre court à l'imagination du lecteur.
Mais si je creuse mon ressenti à l'issue de cette lecture, je dois reconnaître que ce n'est pas tant cette fin qui me gêne mais plutôt le personnage féminin, narratrice de l'histoire en alternance avec son voisin d'en face.
Certes, elle a eu un passé difficile qu'elle évoque dans son journal intime sous forme de lettres rédigées pour son mystérieux voisin dont elle s'est éprise, mais j'ai fini par me lasser voire m'agacer de son dénigrement perpétuel sur elle-même, elle n'est jamais bien, jamais belle, jamais intelligente, à l'écouter c'est un boulet voire même un oubli de la nature, finalement sa solitude n'est pas si étonnante que cela et illustre très bien le propos que pour être aimé des autres et attirer le regard sur soi il faut d'abord s'aimer et s'apprécier, ce qui manque cruellement à cette femme.
Son attitude fataliste m'a aussi énervée : "C'est mon histoire d'amour et je la vie toute seule, lui, il n'est pas dans le coup et c'est ainsi et que faire contre ça ?", quelle idée aussi de tomber amortisseuse de son voisin d'en face, et pourquoi être aussi butée, s'obstiner à garder ses sentiments pour soi plutôt que d'essayer de le connaître ?
Cette fuite en avant de la narratrice a fini par me lasser et est la raison de mon sentiment mitigé sur ce roman.
Car sur le style de Pia Petersen, je n'ai rien à redire, il est très beau, recherché, et elle a su donner corps aux personnages en alternant les points de vue.
Pour la découverte de cette auteur c'est une réussite, pour le reste j'avoue que je m'attendais un peu à quelque chose d'autre et que le goût d’inachevé prédomine.

"Une fenêtre au hasard" me laisse un sentiment de frustration vis-à-vis de l'histoire et particulièrement du non développement du personnage féminin mais a le mérite de mettre en valeur la très belle plume de Pia Petersen.
Une lecture en demi-teinte qui ne m'a tout de même pas ôté l'envie de découvrir les autres romans de cette auteur.

Livre lu dans le cadre du Plan Orsec 2015 pour PAL en danger / Chute de PAL


mercredi 25 février 2015

Instantané #5

Ou quand la lecture d'un titre du journal MetroNews fait immédiatement penser à Kill Bill Volume 1 ...

mardi 24 février 2015

Broadchurch vs Secrets and Lies

Je ne regarde pas souvent la télévision, mais en moins d'un an deux très bonnes séries policières ont été proposées par France Télévisions : Broadchurch et Secrets and Lies.

Les pitchs de ces deux mini-séries sont assez similaires : une petite ville tranquille, un enfant est sauvagement assassiné et c'est toute la communauté qui éclate, tous les plus noirs secrets des uns et des autres qui sont exhumés au cours d'une enquête minutieuse servie par des inspecteurs plus ou moins torturés et complètement incorruptibles.

Pour preuve :

Broadchurch : Une petite communauté se retrouve sous les projecteurs des médias après la mort d'un petit garçon. Deux enquêteurs sont chargés de résoudre cette affaire délicate, tout en essayant de garder la presse à distance et de préserver le tourisme. Face à un tel drame, les habitants commencent à s'épier les uns les autres, faisant remonter à la surface bien des secrets... (AlloCiné)





Secrets and Lies : Ben Gundelach, un père de famille ordinaire, retrouve le corps d'un jeune garçon assassiné. La police le suspecte d'être le meurtrier, il n'a d'autre choix que d'enquêter lui-même afin de retrouver le vrai tueur et de prouver son innocence... (AlloCiné)




Si la première série est anglaise, la seconde est australienne, hormis cette nationalité qui diffère ces deux séries présentent beaucoup de similitudes.
Elles ont toutes les deux un scénario rudement bien écrit avec une intrigue qui s'intensifie au fil des épisodes, perd le spectateur car à chaque fois lui propose de nouvelles pistes et un nouvel éclairage sur les meurtres; quant au final n'en parlons même pas, dans les deux cas je n'ai absolument rien vu venir et j'étais (et je n'étais pas la seule) à dix milles lieues d'imaginer cela !
Même les amateurs et les habitués de romans policiers s'y sont laissés prendre, il faut le dire clairement : il est impossible (ou presque) de trouver par soi-même qui est le ou la coupable.
Le point de départ de ce séries est également le même : une petite bourgade calme qui voit sa vie basculer du jour au lendemain à la suite du meurtre terrible d'un jeune enfant.
Aussitôt les médias se ruent sur la ville et rôdent comme des vautours, n'hésitant pas à révéler au grand jour les secrets des habitants, quitte à les mettre en danger.
Car oui, il y a énormément de secrets qui sont dévoilés dans ces deux séries, et il faut bien avouer que c'est aussi ce qui nous intéresse en tant que spectateur.
Ensuite, ce sont des séries d'ambiance : Broadchurch a une ambiance très british digne des grands romans policiers de ce pays, les personnages ne tombent jamais dans la caricature mais cadrent bien avec l'image que l'on peut avoir des Anglais; quant à Secrets and Lies elle permet de mettre en avant la vie dans une ville Australienne, le climat est chaud et moite, dans tous les sens du terme ai-je envie d'ajouter, là encore, cela cadre bien avec l'image que l'on se fait de ce pays.
Et que dire du casting ! Dans les deux cas c'est un sans faute sur toute la ligne : David Tennant, alias Doctor Who, campe un capitaine de police névrosé par son passé et rongé par la maladie plus vrai que nature, Olivia Colman a été une révélation pour moi, un peu comme les autres acteurs de la série que je ne connaissais pas franchement; riche idée de choisir Martin Henderson pour camper Ben Gundelach, ce bon père de famille qui va se trouver pris dans la tourmente policière et médiatique suivant le meurtre du petit Thom, à lui tout seul il justifie les heures de vol pour aller en Australie, quant aux autres acteurs du casting je ne les connaissais ni d'Eve ni d'Adam mais ils étaient très justes dans l'interprétation de leurs personnages.


Après les louanges et les fleurs, passons aux quelques points négatifs que j'ai pu relever.
Déjà, je tiens à préciser que cela ne concerne que Secrets and Lies car je n'ai rien trouvé à redire à Broadchurch, cette série frôle la perfection.
Le personnage de l'inspecteur de police tient un discours trop à charge sur Ben Gundelach, ça finit par vite par ne plus être crédible à trop s'acharner sur cet homme, bien que cela puisse se passer ainsi au cours de véritables enquêtes.
Ensuite, j'ai regretté que certains personnages soient laissés de côté une fois qu'ils aient été utilisés dans le scénario, la fin me dérange un peu pour cela, certains disparaissent alors qu'ils ont joué un rôle à un moment donné, bref, je suis restée sur ma faim comme on dit.
Pour en revenir sur le dénouement, j'annonce qu'il peut gêner certaines personnes par son caractère choquant, ce ne fut pas le cas pour moi mais il est possible que cela arrive.
Après ces quelques petits points de pinaillage, passons aux bonnes nouvelles : Broadchurch a une saison 2 qui est en cours de diffusion en Grande-Bretagne :
Ça, c'est une excellente nouvelle, et il paraîtrait que Secrets and Lies pourrait aussi connaître une deuxième saison.
Ces deux séries ayant récolté les louanges des critiques et du public, les Américains se sont empressés d'en faire des remakes, pour Broadchurch il semblerait que l'on puisse passer son chemin, celui de Secrets and Lies va être tourné.
Et nouvelle de dernière minute, les Français vont aussi tourner leur propre version de Broadchurch, le scénario a apparemment reçu l'aval des scénaristes Anglais.
Comme quoi, la mini-série policière n'est pas morte et en prime elle peut être de grande qualité !


En guise de conclusion, la comparaison entre ces deux séries n'est pas valable car elles sont toutes deux de grande qualité et méritent largement d'être vues, même si mon cœur penche plus vers Broadchurch pour la quasi perfection de cette mini-série.
J'espère vous avoir donné envie des les découvrir l'une comme en l'autre en replay ou en DVD/Blu Ray et c'est avec plaisir que j'attends vos commentaires si vous les avez vues ! 

Top Ten Tueday #89


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Les 10 albums préférés pour enfants

Me voilà bien en peine pour ce TTT, je ne lis pas franchement d'albums pour les enfants ...
Replongeons dans les souvenirs d'enfance !

1) La série "Ernest et Célestine" de Gabrielle Vincent;
2) La série des" "Monsieur" et "Madame" de Roger Hargreaves;
3) Les livres illustrés par Benjamin Lacombe (en tout cas ça me plairait de lire ça à des enfants);
4) La série des "Martine" de Gilbert Delahaye et Marcel Marlier;
5) "Le vilain petit canard" de Hans Christian Andersen;
6) "Caramel le gentil caniche", collectif;
7) "Bussi l'ours" (et oui, j'ai été longtemps lectrice ou l'on me faisait la lecture de ce journal ! En fait, j'ai épuisé mes parents avec ça car je connaissais par cœur le texte et je les reprenais s'ils se trompaient);
8) "Le jamais-content" de Vassilissa (que j'ai eu du mal à retrouver ce titre !).

Je vais m'arrêter là sur ce thème !

lundi 23 février 2015

L'Ambulance 13 Tome 4 Des morts sans nom d'Alain Mounier et Patrick Cothias


En plein cœur de la bataille de Verdun, la religieuse Isabelle de Ferlon est condamnée au peloton d’exécution pour être intervenue en faveur du sous-lieutenant Bouteloup, accusé de haute trahison. Parallèlement à ce drame personnel, l’horreur collective de la guerre continue. Mais une lueur d’humanité apparaît en la personne de Marie Curie, mandatée sur le front pour y présenter son invention de radiographie mobile destinée à soulager blessés et médecins d’opérations inutiles : l'autochir .L’Ambulance 13 est choisie pour l’expérimentation. C’est l’occasion pour Émilie, la dessinatrice montmartroise auteure des plans de l’appareil, de revoir son amour, Bouteloup. (Bamboo Editions)

"Sainte mère de Dieu, où est passé votre fils ?", telle est la question tandis que la bataille de Verdun fait rage, que les morts s'accumulent dans les tranchées et qu'Isabelle de Ferlon attend le peloton d'exécution qui doit mettre fin à sa jeune vie : "C'est mieux de mourir un matin de pluie. On a moins de regrets.".
Isabelle a-t-elle peur à la pensée de mourir exécutée ? Sans doute, mais elle se dit aussi que ce n'est rien comparé à la mort qui attend les soldats dans les tranchées boueuses : "Il n'y a pas de vrai courage sans peur véritable.".
Des morts, il ne va presque y avoir que ça dans ce nouveau tome qui s'avère sombre, très sombre.

Après l'entrée en jeu de Marie Curie dans le tome précédent, cette fois-ci elle se rend sur le front avec sa machine et c'est l'occasion pour la jeune et dégourdie Emilie de revoir son sous-lieutenant Bouteloup.
Et c'est là que je me rends compte que je n'ai jamais abordé cette seconde figure féminine qui entoure le personnage principal, Emilie, la jeune fille pauvre qui se débrouille dans la vie, qui n'a pas sa langue dans sa poche et qui n'a aucune illusion quant à son amour non réciproque pour ce jeune homme de la haute société.
Emilie, c'est aussi la femme à la morale irréprochable qui sait si bien mettre leurs torts à la face des hommes, mais je le pressens, même si elle est droite dans ses bottes comme on dit, elle ne fera pas partie du clan des vainqueurs.
Disparition également de la première figure féminine entourant le sous-lieutenant Bouteloup, Isabelle de Ferlon disparaît, sacrifiée sur l'autel de la politique.
Alors que reste-t-il dans cette guerre ?
L'entente entre les hommes de l'Ambulance 13, qui va pourtant être mise à mal par la dureté des combats, et celle plus générale des soldats sur le front.
Première fois que les soldats des colonies intégrés aux bataillons français apparaissent dans l'histoire, et un constat : le racisme vis-à-vis d'eux des dirigeants des bataillons, mais la mort elle ne fait pas de distinction : "C'est sûr, la mort elle s'en fout. Arabe, juif, nègre, socialiste, elle met tout le monde d'accord.".
Un autre constat est fait également en fin de volume, les soldats gênent des civils restés à l'arrière qui aimeraient bien que l'on arrête de parler d'eux, de les glorifier, sans doute parce que cela leur renvoie à leur condition d'hommes plus en âge ou pas en capacité de partir combattre : "Faites donc attention, jeune homme. Ce n'est pas parce que vous portez un uniforme que vous pouvez prendre toute la place ! Vous, les poilus, vous devenez encombrants, vous savez ?".
Je ressors de cette lecture bouleversée et triste, avec un monde qui ne sait plus qui le dirige ni où il va, simplement que les morts s'accumulent et que bientôt toute la terre ne sera qu'un vaste champ de ruines.
Un sentiment sans doute partagé par le personnage principal qui a vu en peu de temps disparaître des personnes auxquelles il s'était attaché, des personnes de valeur connues par le passé qui étaient brillantes et promises à un bel avenir et dont le destin s'est brutalement arrêté dans une tranchée de Verdun ou fusillé par un peloton d'exécution.
Une nouvelle fois, le scénario est de grande qualité, tout comme les dialogues; et les dessins sont irréprochables et mettent en valeur de façon saisissante la dureté et l'horreur des combats.
Il y a des têtes qui volent, des membres arrachés, du sang, un ciel gris qui crache une pluie discontinue qui transforme en bourbier la moindre parcelle de terre.
Parce que c'était ça les tranchées, parce que c'était ça la Première Guerre Mondiale.

"Des morts sans nom" est un quatrième tome au titre tristement évocateur de l'envers de celle sale guerre qui clôt avec brio le deuxième cycle de "L'Ambulance 13", une série littéraire de qualité qui s'attache à retracer le quotidien des soldats de la Première Guerre Mondiale, une lecture de circonstance en cette période de commémoration.

dimanche 22 février 2015

L'Ambulance 13 Tome 3 Les braves gens d'Alain Mounier et Patrick Cothias


Février 1916, dans le Bois des Caures. Le sous-lieutenant Charles-Louis Bouteloup et les gars de l’Ambulance 13 sont désormais rattachés aux 56 et 59ème Chasseurs, dit les “Diables bleus”. Commandés par le légendaire et adoré lieutenant-colonel Emile Driant, les hommes de l’Ambulance 13 vont se retrouver au cœur du premier choc de la bataille de Verdun. Parallèlement, sœur Isabelle de Ferlon, d’origine allemande, est arrêtée, interrogée au sujet de l’affaire de haute trahison dans laquelle était mouillé Bouteloup, avant d’être jetée en pâture à l’opinion publique par Clémenceau. Pour tous, c’est un pas de plus vers l’enfer, d’où tout le monde ne réchappera pas vivant... (Bamboo Editions)

Février 1916, début de la bataille de Verdun, c'est dans ce secteur qu'a été affectée l'unité du sous-lieutenant Bouteloup, l'Ambulance 13.
Comme si cela n'avait pas déjà suffi, l'Ambulance 13 va se trouver au cœur d'une des batailles les plus sanglantes de cette période.
Les hommes sont désabusés et ne croient plus en grand chose, même les hommes d'église : "Parfois, il faut ça pour qu'il réponde. Il lui arrive de regarder ailleurs, vous savez ? Jurer, c'est aussi prier.", il n'y a plus de sens aux mots vie ou mort, encore moins à celui de liberté : "Quelle liberté ? Liberté de crever, oui ! Être libre, c'est être vivant. Et les Boches pensent la même chose.", et finalement les soldats au front ont bien compris que cette guerre n'a aucun intérêt et qu'il n'y aura aucun vainqueur, et que la pensée est la même du côté Allemand.
Dans le même temps, la religieuse Isabelle de Ferlon a été dénoncée comme agent double du fait de son origine Allemande, c'est Clémenceau en personne qui vient lui rendre visite en prison pour lui apprendre qu'il la sacrifie à l'autel du pouvoir : "La politique va donc me fusiller ?", pour apaiser pendant un temps les esprits .

Je ne sais pas bien qui désigne exactement le terme de "braves gens" du titre, sans doute les soldats sur le front qui bien braves partent à la boucherie tous les jours, ou alors de façon plus ironique ces messieurs des beaux salons qui élaborent de grandes stratégies de loin et dirigent ainsi les batailles, ou alors les civils qui vivent à l'arrière, certains dans la luxure et la quiétude, d'autres dans la misère et dans l'inquiétude; en tout cas ce titre est particulièrement bien choisi.
Une fois encore, cette bande dessinée s'attache à montrer le côté dur, impitoyable de cette guerre qui n'est plus qu'une vaste machine destinée à broyer les chairs et les esprits.
Les dessins et les reproductions des scènes de batailles sont tout simplement stupéfiants tant ils sont réalistes et arrivent parfaitement à retranscrire toute l'horreur de ces moments.
Cette bande dessinée rend particulièrement bien hommage aux combattants de cette guerre tout en montrant les travers des généraux qui la dirigent bien tranquillement dans leurs états-majors loin du front et de la violence des combats.
Les ordres sont absurdes, tout comme les comportements, car il faut bien reconnaître qu'emprisonner et juger militairement une sœur infirmière dont le seul tort est d'être née Lorraine n'a aucun sens : "Je le répète, je suis née Lorraine par un accident de l'histoire, mais Dieu n'a pas plus de camp que de patrie.".
Qu'à cela ne tienne, Clémenceau dénommé "le tigre" a compris qu'il lui fallait un bouc émissaire, ça sera Isabelle de Ferlon qui s'y prêtera.
Pour le moment, ai-je envie d'ajouter, car cette guerre n'est plus à un paradoxe près comme les exécutions de soldats Français "pour l'exemple" le montreront à plusieurs reprises.
Je trouve le destin d'Isabelle particulièrement dur et elle paie bien cher les errances de sa jeunesse dorée, une douce époque à laquelle elle éconduisait des soupirants pour un teint brouillé ou un bouton de fièvre, comme elle se le remémore en prison.
C'est aussi la première fois que cette série met autant à l'honneur les dessous de l'histoire, en intégrant le personnage réel de Marie Curie qui joua un rôle important dans la façon de soigner les blessés grâce à ses unités de radiologie mobile, une invention capitale qui permit d'éviter bien des amputations mais qui disparut dans les tréfonds de l'histoire pour n'être remis au grand jour que très récemment.
Autant dire que ce deuxième cycle commence très fort et est de qualité égale au premier, c'est un véritable régal à lire et à suivre les aventures du sous-lieutenant Bouteloup et de son unité, L'Ambulance 13, avec des dessins de grande qualité qui illustrent fidèlement la dureté des combats ou la guerre aérienne qui se joue entre les as aériens du volant.

Décidément, comme le dit la chanson "les braves gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux", les braves gens étant ici incarnés par les hauts dirigeants qui rêvent à d'hypothétiques victoires pour reconquérir quelques mètres de terrain au prix d'un lourd sacrifice humain.
"Les braves gens" est un troisième tome de grande qualité à la série "L'Ambulance 13" et ouvre avec brio ce deuxième cycle qui s'avère tout aussi captivant que le premier.

samedi 21 février 2015

L'Ambulance 13 Tome 2 Au nom des hommes d'Alain Mounier et Patrick Cothias


Mis à pied suite à une prise de décision jugée cavalière par ses supérieurs, Louis-Charles Bouteloup, chirurgien, n'est pas tenu en odeur de sainteté et risque le Conseil de guerre. Grâce au concours de sœur Isabelle, il sera réintégré et reprendra le commandement de l'Ambulance 13. Une fois encore, au milieu de la première attaque allemande contre le village de Fleury-Devant-Douaumont, l'unité bravera l'âpreté des combats pour protéger les blessés, tous les blessés, y compris ennemis… Parallèlement, le colonel-baron Bouteloup, père de Louis, songe au péril que son fils fait courir à sa carrière politique, tandis qu'Emilie apporte sa gentillesse et son humanité à un permissionnaire que le malheur poursuit jusqu'au seuil de sa maison. (Bamboo Editions)

"Hé, le ciel, tu m'entends ? Y a quelqu'un là-haut ?"
A croire qu'il n'y a personne là-haut, car les combats continuent, sont toujours aussi sanglants et meurtriers, les blessés continuent d'affluer dans le service de l'Ambulance 13 et les amputations sont toujours aussi nombreuses.
La pseudo pactisation avec l'ennemi de Louis Bouteloup lui ayant permis de récupérer un soldat blessé lui coûte chère : une mise aux arrêts avec risque de passer en cour martiale, au grand dam de son père : "Vivant ! Ni blessé, ni prisonnier, vivant ! Et toujours aussi turbulent, pour ne pas dire plus ! Ce petit faiseur est en train de me causer les pires ennuis !", et à l'incompréhension de ses hommes : "Quoi ? Ils vous enchristent après ce que vous avez fait !? Mais, ils sont tombés dingues, les huiles. C'est à se les couper pour les porter chez "ma tante" bordel !".
Et pendant ce temps, les femmes à l'arrière tremblent, craignent la mort d'un fils, d'un père, d'un fiancé, d'un ami.

Ce deuxième tome est toujours aussi passionnant et bien écrit que le premier, j'y ai retrouvé tout ce que j'avais apprécié dans le premier : un scénario de grande qualité, avec énormément de dialogues (ce n'est pas toujours le cas en bande dessinée), des dessins très représentatifs, des personnages attachants et fortement liés les uns aux autres.
Il y a beaucoup d'humanité dans cette bande dessinée qui retrace un épisode sanglant de l'histoire Européenne, les relations entre les différentes personnes sont très bien esquissées.
Ainsi, la relation entre Louis et la religieuse Isabelle est bouleversante : née baronne en Lorraine elle a dû apprendre l'Allemand et le Français dès son plus jeune âge, elle a prononcé ses vœux il y a peu, pour expier sa jeune vie passée, une vie faite de frivolités et de mondanités, et c'est paradoxalement en enfer qu'elle rencontre un homme qu'elle aime sincèrement, mais sans espoir aucun désormais : "Ecoutez, Louis, je ne suis pas femme à me voiler la face. Nous sommes attirés l'un par l'autre, mais nous devons, l'un comme l'autre, obéir à une autorité qui nous dépasse. Rien n'est possible. Vous le savez. Au nom de Dieu, aidez-moi un peu !".
Le personnage d'Isabelle prend dans ce volume de l'ampleur, pour mon plus grand plaisir car c'est une figure féminine particulièrement intéressante à suivre dans cet univers masculin et guerrier : "Dieu vous a attirée vers lui avec des promesses de sérénité et il vous a lancée dans la fournaise.".
Les femmes ont un rôle un peu plus important dans ce tome, qu'elles soient au front ou à l'arrière elles sont présentes et insufflent du courage à des soldats qui ne connaissent plus que désespoir ou savent mettre en lumière ce qui est important, comme réussir à sauver un soldat après avoir négocié avec les Allemands une trêve d'une heure, face à des hommes qui ont perdu toute raison ou notion de bon sens et qui sont très éloignés de la réalité du front.
Mais tout n'est pas merveilleux dans le plus beau des mondes, et même en temps de guerre ceux qui sont riches et bien nés s'en sortent mieux que les pauvres troufions : "Un fils, c'est l'idéal, l'absolution de tous les péchés passés. Et, à venir, une assurance de carrière pour les survivants ... s'ils sont riches !".
Cette série raconte la Première Guerre Mondiale sous un nouvel angle : celui des soldats.
C'est sans doute ce que j'apprécie le plus, outre les dialogues savoureux et les dessins d'Alain Mounier particulièrement réalistes et de toute beauté et dont la mise en couleurs est particulièrement réussie.

"Au nom des hommes" est un deuxième tome de la série "L'Ambulance 13" difficile mais nécessaire qui clôt avec brio le premier cycle de cette saga littéraire qui tient toutes ses promesses et dont je vais aussitôt découvrir le deuxième cycle.

L'Ambulance 13 Tome 1 La croix de sang d'Alain Mounier et Patrick Cothias


Il s'appelle Louis-Charles Bouteloup. 
Fraîchement diplômé de la faculté de médecine, il se retrouve en première ligne, à Fleury, en janvier 1916. 
Il commande une ambulance hippomobile, surnommée l'As de Pique parce qu'elle est connue aussi bien pour le courage de ses infirmiers, que pour leur manque de soumission au Règlement. Bouteloup est un nom qui compte en politique, car le baron Horace, père de Louis, est député, lieutenant-colonel et proche du général Pétain. Cette relation privilégiée, loin de le protéger, fera du jeune officier une cible désignée pour les ennemis de l’élu, entre autres le redoutable Georges Clemenceau. 
Néanmoins, Louis accomplira la tâche épouvantable que la guerre lui impose, en essayant de préserver un humanisme auquel il est attaché jusqu’à la rébellion… (Bamboo Editions)

Nous sommes en janvier 1916, cela fait plus d'un an et demi que la guerre a commencé et nul ne sait quand elle finira.
Ce que tout le monde ou presque sait en tout cas, c'est qu'elle est meurtrière et qu'elle laisse des deux côtés des milliers de morts, de mutilés, de blessés.
C'est ce que va découvrir Louis-Charles Bouteloup, jeune diplômé de la faculté de médecine et sous-lieutenant.
Ce qu'il va trouver sur le front, il ne pouvait pas l'imaginer, par contre il se doutait bien que la position haut placée de son père lui attirerait des ennemis, un père avec qui il ne se s'entend pas et qui tient vis-à-vis des soldats des propos de haut gradé n'ayant jamais mis les pieds dans l'enfer des tranchées : "Il y a un député qui dit là-d'dans que les balles ne causent pas de réel délabrement des chairs et que les blessés peuvent se rendre à pied à l'hosto après s'être fait moucher.".

Cette bande dessinée s'attache à retracer le parcours d'un chirurgien dans les tranchées pendant la Première Guerre Mondiale, un homme qui va se battre, désobéir, pour essayer d'apporter le plus d'humanité et de secours dans ces tranchées où les plaies physiques côtoient celles morales.
Louis aurait pu faire jouer les relations de son père et être un planqué, mais il décide d'aller au combat, de n'être qu'un soldat parmi les autres, à la différence près qu'il est un soldat aux doigts d'or et dont le savoir va lui permettre de sauver des vies humaines, de réparer des chairs brisées, éclatées, pulvérisées par la violence des armes utilisées.
Louis va découvrir un monde d'horreur : "Louis est maintenant debout devant les barbelés, en pleine vue des allemands. Il découvre ce qu'un combattant de première ligne n'envisage que rarement de toute sa hauteur. Le champ de bataille ! C'est la vision privilégiée du maître dominant sa classe, celle de l'orateur à l'assemblée nationale. Mais Louis n'a plus vraiment peur. Il est au-delà de ce sentiment ... il s'attend tellement à mourir, là, maintenant, que chaque seconde gagnée est une vie entière !", et va aussi se découvrir.
Il va aussi croiser la troublante sœur Isabelle, une jeune femme qui ne le laissera pas indifférent, la réciproque étant vraie, mais elle vient de prononcer ses vœux, et elle est ici en tant qu'infirmière pour l'assister dans sa tâche quotidienne de blesser, soigner, amputer parfois.
En choisissant le personnage de Louis Bouteloup, les auteurs immergent à la fois leur personnage et le lecteur dans le quotidien des tranchées, au milieu des soldats.
Il y a ainsi une proximité qui se crée, et c'est l'un des atouts de cette bande dessinée, qui met également en avant les relations qui se nouent entre les personnages, les relations de confiance et d'autorité, les caractères qui se dessinent dans l'affrontement : les courageux, les lâches, ceux que l'on admire et ceux que l'on déteste.
L'horreur des combats n'est pas retranscrite qu'à l'image, elle l'est aussi dans la narration : "Dans leur dos, tandis qu'ils tanguent et roulent de trous en fossés et de ravines en talus, la bataille s'intensifie. L'artillerie s'est mise de la partie, et des obus de tous calibres retournent la terre, exhument des morts et ensevelissent des vivants. Le ciel est en feu. Il fait jour comme en enfer.".
Et c'est là que réside l'autre atout incontestable de cette série : le scénario déploie une narration importante et beaucoup de dialogues qui sont tous de grande qualité, car ils sont écrits à l'image de chaque personnage, et si le châtié de la noblesse s'y retrouve, le langage propre aux soldats dans les tranchées également.
Voilà un savant mélange qui permet d'apprécier cette période de l'histoire dont les commémorations du centenaire ont débuté il y a quelques mois.

Alain Mounier et Patrick Cothias signent à quatre mains l'excellente série "L'Ambulance 13" qui avec ce premier tome présente la Première Guerre Mondiale sous un regard original : celui des soldats et non des combats, une bien belle et intéressante bande dessinée dont je vais m'empresser de découvrir la suite.

jeudi 19 février 2015

Y comme Romy de Myriam Levain et Julia Tissier


Romy a grandi en jouant aux pogs, en regardant les Tortues Ninja et en chattant sur MSN bien avant l'arrivée de Facebook. A presque trente ans, elle vit dans un studio, à défaut de pouvoir se payer un appartement d'"adulte", et papillonne de soirée en soirée avec sa B.F.F. Sonia à la recherche du grand amour... ou au moins de quoi égayer ses nuits. (Robert Laffont)

Myriam Levain et Julia Tissier sont les heureuses créatrices de Romy Idol, une jeune femme se définissant ainsi : "Je m'appelle Romy, j'ai presque trente ans et je suis un pur produit de la génération Y.".
La fameuse génération Y, c'est celle née dans les années 80, la mienne en l’occurrence, autant dire que j'étais un peu curieuse de connaître un peu mieux cette jeune femme et d'essayer de trouver des points communs entre elle et moi (oui, j'en suis à me chercher des points communs avec un personnage de fiction, mais à part ça tout va bien).
Elle et moi aimons apparemment autant les grands rassemblements familiaux (enfin tout dépend de la taille de la famille en question) : "Les périodes de retrouvailles familiales ne sont une partie de plaisir pour personne. Noël est la pire de toutes.", sommes nés à peu de choses près la même année : "Je vis dans une société anxiogène. Si, en venant au monde au XXè siècle, j'ai échappé aux épidémies de tuberculose, de choléra ou de syphilis, j'ai eu droit, en revanche, à d'autres pandémies tout aussi sympathiques : citons au hasard la vache folle, le SRAS, la grippe aviaire et la grippe H1N1. En somme, j'ai eu ma dose de flip collectif.", adorons répondre à toutes les questions concernant notre célibat / notre prochain mariage / notre éventuel désir (ou non) d'enfants, et la comparaison s'arrête à peu près là.
Parce que Romy est un personnage de fiction, le trait est poussé un peu loin et je n'ai pas pu m'attacher autant à elle qu'à Bridget Jones, d'autant qu'elle a une façon d'être un peu trop tournée vers elle-même sans chercher à se remettre en question ou à prendre les choses en main, ce que je suis bien contente de faire dans ma vie de tous les jours.
Les auteurs ont bien su saisir la vie actuelle, où il faut être hyper connecté à tout : Facebook, Twitter, sites de rencontres, mails, et où il y a finalement beaucoup de solitude pour les personnes.
Je reproche aux auteurs de véhiculer un peu trop à travers le personnage de Romy que cette solitude est une fatalité, c'est faux et c'est pourquoi j'aurais aimé voir Romy se démener un peu plus, j'espère en tout cas que cela lui arrivera par la suite car la solitude et le bonheur ne sont pas incompatibles, j'ai eu parfois le doute en lisant certains propos de Romy.
Si Romy est un archétype de la femme trentenaire de notre époque, les auteurs ont su lui donner une bonne dose d'humour et de répartie : "J'aborde là l'aspect "jacasserie" de l'E.V.J.F., car il est à peu près certain qu'Olympe de Gouges se retournerait dans sa tombe à la vue de ces cohortes de filles réunies pour fêter ce que jadis elles ne pouvaient fuir : l'entrée dans la vie de femme mariée.", saupoudrée de culture générale, et aborde avec elle à peu près tous les sujets de société de notre époque (quelle fille n'a jamais été abordée par un relou dans la rue ? Qui n'a jamais connu l'angoisse du dimanche soir ? Ou du jour férié où tout est fermé ? Qui n'a jamais classé ses collègues de travail dans des catégories ?).
Les illustrations sont signées par Louison, je ne suis pas forcément fan de ce style graphique mais ici ça colle bien avec les propos du livre et s'inscrit très bien dans la veine humour et dérision.
Le récit est découpé en courts chapitres s'attachant à un point bien précis : l'expérience Tinder, le coiffeur, la rupture, l'ex, la connasse à graines, pour n'en citer que quelques uns.
Ça ressemble à du one-woman-show écrit, ce fut en tout cas une lecture de détente au cours de laquelle j'ai beaucoup souri, pas forcément à tout mais cela m'a permis de me reposer l'esprit, c'est ce que j'attendais de ce livre, l'objectif est donc atteint.

"Y comme Romy" de Myriam Levain et Julia Tissier est une lecture détente agréable croquant cette génération Y qui prête à sourire, à lire pour s'échapper quelques instants de la morosité ambiante.

Un grand merci à Vendredi Lecture dont le hasard du tirage au sort m'a permis de recevoir ce livre !

Livre lu dans le cadre du Challenge Petit Bac 2015 - Catégorie Prénom : ROMY

mardi 17 février 2015

Top Ten Tuesday #88


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Les 10 problèmes que vous avez avec les livres (problèmes sérieux ou plus drôles)

1) Je ne supporte pas de corner/abîmer une page ou la couverture;
2) Je me sens obligée de "protéger" mon livre dans mon sac en le mettant dans un sac (ce qui fait énormément rire mes collègues);
3) Lorsque la police d'écriture est trop petite;
4) Lorsque la reliure est mauvaise et que les pages se détachent vite;
5) Lorsqu'un livre est addictif et que je ne peux plus le quitter;
6) Lorsque le livre que je cherche s'est planqué dans ma bibliothèque;
7) Lorsque je suis interrogative devant ma bibliothèque sur ma prochaine lecture j'aimerai qu'un livre puisse me sauter dans les bras;
8) Lorsque ma chienne pousse le livre que je lis pour venir me faire un câlin (et donc que je me consacre uniquement à elle);
9) Lorsqu'il y a des fautes d'orthographe et/ou de frappe;
10) J'ai du mal à m'empêcher d'acheter des livres ou de revenir avec une partie de la bibliothèque municipal.

dimanche 15 février 2015

Sweet Sixteen d'Annelise Heurtier


Rentrée 1957. Le plus prestigieux lycée de l'Arkansas ouvre pour la première fois ses portes à des étudiants noirs. Ils sont neuf à tenter l'aventure. Ils sont deux mille cinq cents, prêts à tout pour les en empêcher. (Casterman)

Qui avait déjà entendu parler des "Neuf de Little Rock" ?
Pas moi en tout cas.
D'ailleurs, de qui s'agit-il ?
Et bien d'un groupe d'élèves Afro-américains (six filles et trois garçons) inscrits à la rentrée scolaire de 1957 à la Little Rock Central High School, école jusque-là réservée aux Blancs.
C'était il n'y a pas si longtemps que ça aux Etats-Unis, à une époque où les Noirs et les Blancs ne vivaient pas ensemble, les premiers n'étant bons qu'à servir les seconds.
Et en 1956 la ségrégation raciale a été abolie, il a fallu faire tomber les barrières, petit à petit, mais cela a été long et compliqué, et c'est ce à quoi s'attache à raconter ce roman à destination de la jeunesse.


Robert Wagner, maire de New York, félicitant les neuf étudiants qui intégrèrent la Central High School

Annelise Heurtier, s'inspirant des faits réels, raconte l'année scolaire si particulière de 1957/1958 à travers le regard de deux jeunes filles : la première s'appelle Molly, elle est Noire et va subir durant toute l'année les moqueries, les vacheries et les lynchages de ses camarades, car comme elle le dit si justement : "La stupidité était la chose la mieux partagée au monde."; la seconde s'appelle Grace, elle est Blanche et très populaire, son ambition est d'aller au bal de fin d'année au bras du séduisant Sherwood.
Difficile de prendre deux extrêmes plus opposés, même si l'auteur a fait le choix de créer le personnage de Grace avec un côté humain et ouvert sur l'Autre, au contraire de ses autres camarades Blancs qui sont d'indécrottables racistes ne démordant pas de leur théorie que les Noirs ne sont que de vulgaires animaux qui ne méritent que le mépris.
Lorsque Molly a fait le choix d'intégrer cette prestigieuse école, elle l'a fait sur le coup de l'impulsion, sans réfléchir aux conséquences que son choix aurait sur son quotidien, à la fois vis-à-vis de ses camarades d'école mais aussi de ses propres amis voire de sa famille, et en se disant qu'après tout, ce n'était pas parce qu'une décision de justice avait été rendue qu'elle serait suivie d'effet : "Entre une décision de justice et la réalité, il y avait un monde à traverser.".
Il n'en reste pas moins que le Président Eisenhower a décidé que l'intégration se ferait, et que ces neuf étudiants, s'il commençait à le réaliser à l'époque, ont contribué à faire avancer l'Histoire des Etats-Unis et la fin de la ségrégation raciale : "Ils avaient beau faire partie de quelque chose de grand, de juste, quelque chose qui les dépassait, il n'en restait pas moins que, maintenant, c'était à eux seuls de se lancer. A eux de le vivre.".
A plus d'un titre, l'expérience qu'ils ont vécu les a marquée à vie et je regrette qu'aujourd'hui cela soit finalement si peu connu.
Annelise Heurtier s'attaque ici à démontrer la ségrégation raciale dont ont été victimes les Noirs aux Etats-Unis : "A comportement égal, ce n'était pas demain la veille qu'un Noir serait jugé comme un Blanc. Un Blanc pouvait vous insulter, vous cracher au visage, vous frapper, vous pendre à un lampadaire ... il aurait toujours raison. Les Noirs, eux, avaient simplement le droit de se laisser faire sans broncher.", et comment certains ont contribué à faire avancer et évoluer les choses.
Bien sûr, le personnage de Molly est imaginaire, mais son ressenti doit être assez proche de ce qu'ont vécu ces neufs étudiants au cours de leur année scolaire.
J'ai apprécié l'alternance des points de vue des deux jeunes filles par chapitre, avec comme fil conducteur pour chacune d'elles leur "sweet sixteen", plus précisément leur seizième anniversaire, un âge dignement fêté aux Etats-Unis.
Elles ont toutes les deux des rêves et, pas pour les mêmes raisons, elles vont déchanter l'année de leur seize ans et mûrir ainsi un peu plus rapidement.
Je regrette toutefois qu'il y ait si peu d'interactions entre ces deux personnages, d'un autre côté cela permet de bien illustrer la solitude dans laquelle Molly va passer son année scolaire.
Par ailleurs, le roman est par moment un peu trop elliptique et je n'aurais rien eu contre le fait qu'il soit un peu plus étoffé et que l'année scolaire soit un peu plus développée, car finalement la rentrée et la fin d'année sont abordées et entre les deux pas grand chose.
L’événement était assez important pour justifier un peu plus de mon point de vue, maintenant ce livre s'adresse à des adolescents, je peux comprendre le choix du format réduit bien que je pense que l'histoire soit tellement intéressante que personne n'y trouverait d'inconvénient à ce qu'elle soit un peu plus étoffée.
Car je suis ressortie un peu frustrée de cette lecture, qui est d'ailleurs rapide, avec le sentiment de devoir me séparer trop vite des personnages auxquels je me suis rapidement attachée.
Car cette histoire romancée est très intéressante à suivre et j'ai pris beaucoup de plaisir à suivre les péripéties de Molly et de sa famille, notamment avec sa savoureuse, croyante et optimiste grand-mère, ainsi que celles de Grace, une jeune fille qui va apprendre à ses dépens ce qu'il en coûte de sortir du moule dans lequel elle rentrait si bien jusqu'alors.
Le relent raciste sudiste ressort très bien dans ce récit et l'auteur a su trouver les mots justes pour s'adresser à un public jeune afin de relater ces événements, tout comme elle a su retranscrire l'ambiance de la fin des années 50 dans cet état de l'Arkansas.
Il n'est donc pas étonnant que ce livre ait fait autant parler de lui à sa sortie et qu'il ait été nominé à de nombreux prix, c'est amplement mérité et je vais m'intéresser d'un peu plus près aux autres œuvres de l'auteur.

"Sweet Sixteen" d'Annelise Heurtier s'adresse en priorité à un lectorat adolescent mais finalement peut aussi bien se lire à tout âge tant le récit et le message qu'il véhicule sont universels et sans âge.
Un très bon roman jeunesse qui met en scène un pan véridique de l'histoire américaine, une belle découverte.

Livre lu dans le cadre du Club des Lectrices


samedi 14 février 2015

Tous les démons sont ici de Craig Johnson


Indien Crow d’adoption, Raynaud Shade est considéré comme le plus dangereux sociopathe des États-Unis et représente le cauchemar de tout policier. Finalement interpellé, il avoue avoir enterré un cadavre au beau milieu des Bighorn Mountains, dans le Wyoming, et c’est à Walt Longmire que revient la tâche d’escorter Shade, en plein blizzard, jusqu’au corps. Mais le shérif sous-estime peut-être les dangers d’une telle expédition. Car pour tenter de rétablir la justice, il va devoir braver l’enfer glacial des montagnes et tromper la mort avec, pour seul soutien, un vieil exemplaire de La Divine Comédie de Dante. (Gallmeister)

Je n'avais encore jamais lu de romans issus de la collection "Noire" des éditions Gallmeister, c'est désormais chose faite avec cette aventure du personnage récurrent de Walt Longmire, shérif dans le comté fictif d'Absaroka dans le Wyoming.
Pour cette nouvelle mission, Walt Longmire doit escorter Raynaud Shade, un indien Crow d'adoption à l'attitude plus qu'inquiétante : "J'eux cette même sensation étrange que j'avais ressentie chaque fois que je l'avais regardé et l'avais surpris à m'observer. Peut-être était-il impossible de surprendre Raynaud Shade.", qui vient de déclarer avoir enterré le cadavre d'un enfant au beau milieu des Bighorn Mountains; accompagné de deux autres détenus moins dangereux que cet indien mais tout de même assez vicieux.
Bien évidemment, rien ne se passe comme prévu, les prisonniers parviennent à échapper aux fédéraux et c'est dans un blizzard d'une redoutable puissance que Walt Longmire va se lancer à la poursuite des fugitifs, avec pour seul compagnon de route un exemplaire de "La Divine Comédie" de Dante.
Sa quête et les événements extérieurs ressemblent d'ailleurs à s'y méprendre à "L'Enfer" de Dante Alighieri dont la phrase suivante résume assez bien ce récit : "Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance..".

Ce roman n'est pas un policier dans le sens pur du terme, car finalement le lecteur possède les clés dès le début : il sait pertinemment que Raynaud Shade n'est pas un enfant de chœur, qu'il a bel et bien tué un enfant il y a plusieurs années de cela et qu'il a laissé sa dépouille dans les Bighorn Mountains, pire que cela puisque Walt Longmire découvre même qu'il connaît le grand-père de cet enfant, un dénommé Virgil qui vit en reclus dans la montagne, ce même Virgil qui apparaîtra plusieurs fois au cours de sa quête pour lui venir en aide.
Décidément, l'auteur s'est fortement inspiré de Dante Alighieri pour bâtir son histoire, un point que j'ai énormément apprécié car cela lui confère une dimension particulière et le parallèle est intéressant entre le destin de Dante Alighieri dans son poème et celui de Walt Longmire dans les Bighorn Mountains, tous deux étant guidés par un Virgile pour l'un, Virgil pour l'autre, à travers l'enfer.
Walt Longmire sait qu'il est arrivé à un moment charnière de sa vie et de son destin, il pressent ce qui va se passer et le drame qui va se jouer sur l'espace de quelques jours au cœur d'une tempête : "Il est des moments dans la vie où vous entendez tomber le premier domino, et vous savez que tout ce qui arrivera à partir de là sera inévitablement affreux.".
J'insiste bien sur le fait que le personnage central est à un croisement de sa vie, il a déjà perdu sa femme il y a quelques années et là, c'est sa fille qui achève de prendre son envol à son tour dans la vie, l'heure est pour lui au bilan et sans doute d'affronter des démons : "On collectionne des choses à mesure qu'on avance - des choses dont on pense qu'elles sont importantes -, et bientôt elles vous pèsent jusqu'à ce qu'on se rende compte que ces choses auxquelles on tenait tant ne signifient rien du tout. Notre nature est ainsi faite.".
Walt Longmire est un entêté, il ne lâche jamais sa proie, c'est à la fois une force et une faiblesse, et il connaît sans doute mieux que quiconque l'importance d'être toujours sur ses gardes et toujours le premier à réagir : "La question n'est jamais qui est le plus rapide, le plus fort, le plus résistant, mais plutôt qui, au moment où d'autres marqueraient une pause, déciderait d'agir le premier.".
J'ai découvert ce personnage, et ceux qui l'entourent, et les ai trouvés extrêmement fascinants, et même si le dénouement m'était connu quasiment dès le début du livre, j'ai pris énormément de plaisir à lire cette histoire, à suivre ce personnage dans ce qu'il faut bien l'avouer une formidable et puissante chasse à l'homme à travers le blizzard et la nature sauvage du Wyoming.
Le style de Craig Johnson est soigné et percutant, il aurait pu se contenter d'écrire un roman noir mais il a trouvé le moyen d'y inclure de l'esprit et de l'humour, ce qui en fait un roman passionnant et intelligent.
D'autant qu'à travers sa plume il arrive à faire passer tout son amour pour le Wyoming, une région qu'il connaît particulièrement bien et qu'il fait vivre sous sa plume de manière très vivante, ainsi que pour des thèmes qui lui tiennent à cœur, comme la défense de la culture Amérindienne.
C'est bien simple, j'ai limite envie d'aller dans le Wyoming maintenant, alors que ce n'est pas franchement l'idée de destination première qui me vient à l'esprit lorsque j'évoque les Etats-Unis.
Au cours de ma lecture, je trouvais que ce récit rendrait particulièrement bien à l'écran, et qu'elle ne fut pas ma surprise de découvrir que cette série littéraire avait été adaptée à la télévision, série dont la diffusion en France est restée malheureusement confidentielle.
Il me tarde désormais de voir le résultat à l'écran, et de lire les autres romans de Craig Johnson constituant la série des enquêtes de Walt Longmire.

"Tous les démons sont ici" est une magnifique allégorie de "La Divine Comédie" de Dante Alighieri signée par Craig Johnson prenant la forme d'une chasse à l'homme en plein milieu d'un blizzard dans les Bighorn Mountains, un récit brillant publié par les non moins brillantes éditions Gallmeister !

Je remercie Babelio et les éditions Gallmeister pour l'envoi de ce livre dans le cadre de l'opération Masse Critique.

jeudi 12 février 2015

Petits oiseaux de Yôko Ogawa


Il est le seul à pouvoir apprendre la langue pawpaw afin de communiquer avec son frère aîné, cet enfant rêveur qui ne parle que le langage des oiseaux, n’emploie que ces mots flûtés oubliés depuis longtemps par les humains. 
Après la mort de leurs parents, les deux hommes demeurent ensemble dans la maison familiale. D’une gentillesse extrême, l’aîné, qui ne travaille pas, se poste chaque jour tout contre le grillage de la volière de l’école maternelle. Peu à peu, la directrice remarque son calme rassurant pour les oiseaux, sa façon subtile de les interpeller, et lui confie l’entretien de la cage. 
Quant au cadet, régisseur de l’ancienne résidence secondaire d’un riche propriétaire du pays, le jardin de roses, les boiseries des salons, la transparence des baies vitrées sont à la mesure de son attachement pour les lieux de mémoire. Parfois, les deux frères décident de “partir en voyage”. Valises en main, ils font halte devant la volière. Ravis de palabrer avec les moineaux de Java, les bengalis ou les canaris citron, ils oublient dans l’instant tout projet de départ. Un jour pourtant le calme du quartier semble en danger, une enfant de l’école disparaît. (Actes Sud)

D'habitude, la magie de Yôko Ogawa opère sur moi, avec force.
Ici, ça n'a pourtant pas été le cas, pas aussi fort que d'ordinaire, et je n'arrive pas à m'expliquer vraiment pourquoi.
"Petits oiseaux", c'est l'histoire de ce cadet qui est le seul à comprendre son aîné qui s'exprime dans la langue powpow, la langue des oiseaux, c'est leur histoire à tous les deux, un quotidien fait de gestes répétés inlassablement toujours aux mêmes heures, toujours aux mêmes endroits, leur passion pour les oiseaux en toute genre et leurs chants, un rituel ininterrompu qui va pourtant cesser le jour de la mort brutale du frère aîné, laissant un vide dans le cœur et la vie du cadet : "Avec la mort brutale de son frère avaient disparu toutes sortes d'habitudes qu'ils avaient établies ensemble : les sandwichs et la soupe du midi, la radio du soir et les bagages de leurs voyages imaginaires, de sorte que l'entretien de la volière vint combler ses lacunes.".
Mais c'est aussi l'histoire de la vie de ce cadet après la disparition de son frère, de son travail à la volière de l'école qu'il entretient avec passion et soin, mais là encore ce rituel va un beau jour s'interrompre après la disparition d'une petite fille; de sa soif de littérature sur les oiseaux et de l'étrange relation qui va se nouer entre lui et la bibliothécaire; de sa vie après la volière de l'école et de sa mise à la retraite, complètement désœuvrée jusqu'au jour où il sauvera un petit oiseau et qu'il lui apprendra tous les rudiments du chant de son espèce, un oiseau qu'il gardera précieusement avec lui en cage, car contrairement à l'enfermer celle-ci lui procurera la liberté : "La cage n'enferme pas l'oiseau. Elle lui offre la part de liberté qui lui convient.".

C'est joli tout cela, il n'y a que des bons sentiments, beaucoup d'amour, une vie simple faite de petits riens qui finissent par former une grande chose, un amour profond qui lie les deux frères entre eux mais également avec les oiseaux, sauf que je suis toujours à chercher le sens métaphorique de tout cela comme il est de coutume dans les récits de Yôko Ogawa, et que je n'arrive pas à mettre le doigt dessus, me laissant l'impression que j'ai raté quelque chose au cours de ma lecture.
"Tous les chants d'oiseaux sont des chants d'amour.", peut-être que dans le fond il n'y a rien d'autre que beaucoup d'amour et de poésie, ce qui n'est pas rien, et que je suis à chercher désespérément à voir plus loin que le bonheur présent sous mes yeux, un bonheur que les deux personnages principaux de ce récit ont su saisir dès leur plus jeune âge.
La Béatitude : "Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu", illustre finalement très bien ce roman mettant en scène deux hommes qui passeront leur vie repliés sur eux-mêmes, inconscients du monde extérieur qui les entoure et qui change, uniquement préoccupés par les oiseaux et leurs chants.
Dans ce roman, le temps n'existe pas, il n'a ni saveur, ni odeur, ni unité temporelle, il ne se mesure pas.
C'est sans doute cette inconscience qui préserve autant les deux frères, puis le cadet uniquement.
Il est seul mais ce n'est pas une solitude triste, c'est une solitude riche de voyages intérieurs et de moments partagés entre lui seul et la nature.
Bien sûr, j'ai espéré que sa solitude allait se rompre, j'ai espéré qu'il y aurait un petit déclic avec la bibliothécaire mais non, Yôko Ogawa a pris le parti de faire évoluer son personnage dans un monde où il est condamné à être seul, mais la peine est douce et ne semble pas avoir de prise sur lui.
J'ai fini par ressentir au cours de ma lecture une sensation de claustrophobie, ce personnage, et par ricochet cette histoire, sont bien trop autistes pour moi, à tel point que j'ai fini par avoir l’impression d'être enfermée avec lui dans sa vie, je n'étais plus lectrice mais l'oiseau en cage.
Et si je ne peux pas dire avoir été totalement transportée par cette histoire, la plume de Yôko Ogawa est tout de même assez poétique, bien que je l'ai connue plus inspirée dans d'autres de ses romans et dans un certain sens plus accessible que dans ce récit.

"Petits oiseaux" de Yôko Ogawa est un roman doux prônant la différence et les vertus de la solitude mais qui n'a pas la puissance et la portée d'autres œuvres de cette auteur dont ma lecture la plus forte reste à ce jour "Cristallisation secrète".

Livre lu dans le cadre du Prix des Lectrices 2015


Livre lu dans le cadre du Challenge Petit Bac 2015 - Catégorie Taille : PETITS

mardi 10 février 2015

Top Ten Tuesday #87


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Les 10 choses que vous aimez / n'aimez pas dans les romances

J'aime : 

1) Que l'amour triomphe à la fin (comme le dirait Jane Austen : que le cœur l'emporte sur la raison);
2) Que les personnages soient proches de nous et de notre façon d'être;
3) Que les personnages rencontrent des obstacles qu'ils doivent franchir;
4) Que le suspens perdure jusqu'à un certain moment, en somme que la fin heureuse ne soit pas trop prévisible et qu'un doute subsiste;
5) Un contexte historique permettant d'ancrer l'histoire;

Je n'aime pas : 

6) Les personnages creux et prévisibles;
7) Les fins heureuses trop faciles;
8) Les descriptions langoureuses qui n'en finissent pas;
9) Les scénarios des romances Harlequin ou assimilé;
10) Trop de niaiseries dans l'histoire et/ou les personnages.

samedi 7 février 2015

Petite (vraiment !) descente en librairie en ce samedi 7 février 2015


J'avais dit que je ne ferai pas de descente en librairie en 2015 ("Fontaine, bla bla bla, de ton eau"), en tout cas c'était mon objectif, mais j'ai bien dû me décider à y aller car j'ai (enfin !) décidé de me booster les fesses pour songer à mes voyages de cette année (ne nous emballons pas, il me reste encore à retenir les-dites vacances).
C'est bien beau de dire que je souhaite faire Prague et Budapest, mais avec des guides c'est mieux ! Surtout pour creuser un peu plus la liaison entre ces deux villes.
Et surtout ce que je souhaite y faire et y voir.

Bref, me voilà partie remplie d'espoir que je vais trouver sans trop de problèmes des guides de voyage récents d'occasion, avant la sortie des nouvelles éditions.
Alors je vous parle désormais d'expérience, en cette saison c'est une mauvaise idée et j'ai bien failli faire chou blanc sur toute la ligne !
Par contre en septembre ma moisson avait été bonne, je retiens donc qu'il faut viser les retours de congés d'été pour trouver des guides d'occasion et non le début de l'année.

J'ai donc fait Gibert Jeune (un Routard 2014/2015 Budapest et le cartoville de Prague d'occasion), Gibert Joseph (Lonely Planet Prague d'occasion), Boulinier - le grand (un Routard 2012/2013 sur la République Tchèque et la Slovénie, faute de grives on mange des merles comme le dit le proverbe, il y a bien 150 pages dédiées à Prague, ça me suffira; et un livre axé sur l'histoire de Prague), et Boulinier - le petit ( des fois que le Lonely Planet de Budapest me saute dans les mains ... mais non, pour celui-là je peux repasser).


Pourquoi ai-je évoqué le petit Boulinier ?
Parce que jusque là j'avais été très sage, un vrai modèle, si un livre me tentait je le reposais (oui, ça peut arriver).
Et puis j'ai craqué.
J'ai acheté le dernier livre de Marc Lévy.
"Elle et lui" quoi ! Parce que c'était lui, parce que c'était moi, Cary Grant, l'Empire State Building, toussa, toussa.

Non mais sérieusement, vous y avez cru ne serait-ce qu'une demi-seconde ?
J'ai bien craqué, mais pour deux ensembles de livres dont Boulinier a le secret (et je remercie cette boutique de grouper ainsi les séries lorsqu'elles sont complètes, et de les vendre à des prix aussi intéressants).
Je suis repartie avec "Les Eygletière" de Henri Troyat et la trilogie "Nord et Sud" de John Jakes, qui n'est plus éditée et dont j'avais presque oublié l'existence, j'avais eu envie de la lire après avoir vu le feuilleton télé qui en avait été tiré il y a plusieurs années mais impossible de trouver le livre en librairie (commande refusée car livres plus édités) ou en bibliothèque.
Je remercie également la charmante caissière de Boulinier (le petit) qui, voyant que j'avais du Henri Troyat, m'a demandé si j'étais intéressée par d'autres livres de cet auteur car elle venait d'en recevoir pleins (mais que j'avais soit déjà en stock soit déjà lus).



Voilà, il ne me reste plus qu'à réserver mes voyages désormais, feuilleter les guides et en profiter d'ici quelques mois !

jeudi 5 février 2015

Les lumières de la ville de Charles Chaplin



Charlot vagabond vient en aide à une jeune fleuriste aveugle et se fait passer pour un homme riche. A force de travail il réunit assez d'argent pour que la jeune fille recouvre la vue. (AlloCiné)


Ce film est non seulement en noir et blanc, mais il est aussi sans dialogue (et non pas muet).
La nuance est de taille car comme moi vous risquez de vous interroger pour savoir si la façon de parler des personnages au début du film est normale ou non.
Et il est signé par le grand Charles Chaplin, qui se met en scène dans les aventures de Charlot qui vient cette fois en aide à une jeune fleuriste aveugle.


Le pitch est simple, le film est court et les gags se succèdent les uns aux autres, dans un scénario qui aurait pu se contenter d'être simplement drôle mais qui contient aussi de l'émotion et de bons sentiments.
Charlot est un personnage attachant, à la fois drôle, gaffeur, sensible.
Au cours de ses mésaventures qui commencent joliment lors de l'inauguration d'une nouvelle statue, il va croiser le chemin d'une jeune femme (Virginia Cherrill) vendant des fleurs qui souffre d'un problème aux yeux l'empêchant de voir, une femme pour qui Charlot va faire son possible pour lui dénicher l'argent lui permettant de voir, quitte à se faire passer pour l'homme riche qu'il n'est pas; ainsi qu'un millionnaire suicidaire (Harry Myers) qui a la fâcheuse tendance de le trouver son ami la nuit lorsqu'il est bourré et de ne plus se souvenir de rien le matin venu.
Certaines scènes sont vraiment très drôles, telle celle de l'élévateur devant un magasin d'antiquités ou encore celle du combat de boxe qui enchaîne les gags à la suite.
Il y a beaucoup de gesticulation et de mime dans ce film, la gestuelle y a un rôle d'importance et autant dire que ce n'était pas gagné d'avance de réussir à faire passer autant d'émotion et à rendre l'histoire compréhensible sans recourir à la parole.
J'aime beaucoup la mise en scène de Charles Chaplin, elle paraît simpliste au premier abord mais elle a dû demander énormément de travail, c'est là toute la magie de ce film : j'ai eu l'impression d'avoir devant moi une suite de gags bien orchestrés qui se déroulaient les uns après les autres sans pouvoir me rendre compte du travail qu'il y a eu derrière (et effectivement, du travail il y en a eu : 534 jours de tournage, une production qui s'est étalée sur trois ans).
L'histoire est vraiment belle, pleine d'humanité et de bons sentiments, le jeu des acteurs est merveilleux car ils arrivent à faire passer toutes leurs émotions sans jamais dire un seul mot, une prouesse dont je ne suis pas sûre qu'elle pourrait encore être réalisée de nos jours.
J'ai pris en tout cas beaucoup de plaisir à le découvrir, d'autant que la musique, également signée par Charles Chaplin, est magnifique et contribue pour beaucoup à la beauté et à la tendresse de ce film dont je ne regrette que la fin un peu trop évasive.


"Les lumières de la ville" est un film drôle et tendre mettant en scène un irrésistible Charlot qui séduit petits et grands, voilà un film qui ne se démode finalement pas et qui met du baume au cœur quand on le regarde.
Un film considéré à juste titre comme l'un des plus réussis de Charles Chaplin.

mardi 3 février 2015

Top Ten Tuesday #86


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Les 10 livres que vous n'en revenez pas de n'avoir toujours pas lus car ce sont des "must have" de tel ou tel genre

1) "Hunger Games" de Suzanne Collins
2) "La ferme aux animaux" de George Orwell
3) "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur" de Harper Lee
4) "Le cœur est un chasseur solitaire" de Carson McCullers
5) "Le lys dans la vallée" de Honoré de Balzac
6) "Les piliers de la terre" de Ken Follett
7) "Le Silmarillion" de J.R.R Tolkien
8) "Voyage au bout de la nuit" de Louis Ferdinand Celine
9) "Si c'est un homme" de Primo Levi
10) "Le deuxième sexe" de Simone de Beauvoir

lundi 2 février 2015

Chante ton bac d'abord de David André



Chante ton bac d’abord raconte l’histoire tumultueuse d’une bande de copains de Boulogne-sur-Mer, une ville durement touchée par la crise. Un an entre rêves et désillusion. Imaginées par ces adolescents issus du monde ouvrier ou de la classe moyenne, des chansons font basculer le réel dans la poésie, le rire et l’émotion. (AlloCiné)


C'est avec un peu de retard que je vous parle de ce beau documentaire atypique puisqu'il est sorti sur les écrans fin octobre 2014.
Le pitch est simple : ce documentaire suit un groupe d'amis durant l'année de leur bac avec pour fil conducteur Gaëlle, dix-sept ans.
Entre rêves, désillusions, espoirs, interrogations, c'est un quotidien touchant que suit le spectateur ainsi que les errements de cette jeunesse dans un Boulogne-sur-Mer ravagé par la crise, où chacun sait, y compris les parents, que l'avenir de ces jeunes est ailleurs.
La curiosité de ce documentaire, c'est que des chansons y ont été insérées, interprétées par chaque membre de la bande de copains et servant à traduire leur état d'esprit à un moment donné.
Outre cet aspect comédie musicale qui m'a séduite, j'ai aussi beaucoup apprécié les interrogations et les réponses de ces jeunes, sans doute parce que je me suis revue aux même âge qu'eux et que j'avais les mêmes doutes, les mêmes pensées, les mêmes certitudes.
En quelque sorte, j'ai eu l'impression que l'époque où je passais mon bac n'était pas si lointaine que ça finalement, car comme eux, à dix-sept je n'avais aucune idée de ce que j'allais faire de ma vie, d'où j'allais m'orienter, quel métier me conviendrait, autant de questions auxquelles il faut répondre à cet âge pour choisir une orientation étudiante qui détermine ensuite celle professionnelle.
A mon âge je trouve toujours cela aussi stupide, d'autant que j'ai mis très longtemps à entrevoir le chemin que j'allais prendre.
J'aime le côté innocent de tous ces jeunes, sûrs d'eux que la vie est devant eux, sûrs de comment ils vont vivre leur vie et de leur définition du bonheur.
J'aimerai avoir toujours autant d’innocence, malheureusement les années qui passent font tomber une à une les belles certitude de notre jeunesse et j'avais aussi un peu mal au cœur à la pensée que ces jeunes allaient dans quelques années découvrir que les choix ne s'arrêtaient pas à ceux pour les études mais qu'il leur faudrait se poser tout autant de questions pour le choix de l'entreprise, la spécialisation etc.
Dans ce documentaire, les parents interviennent également : ils doutent, ils ont peur pour leurs enfants, ils craignent les mauvais choix et essayent de les raisonner, de les mettre dans ce qu'ils considèrent le droit chemin.
Car toutes ces familles ont pour point commun de tirer le diable par la queue, de vivre dans une région où le chômage est de plus en plus important et où le bassin d'emplois se raréfie.
Ce sont des parents qui espèrent un avenir meilleur pour leurs enfants, des parents qui savent être à l'écoute de leurs enfants mais qui manquent bien souvent de devenir fous à cause d'eux également.
Si je me suis retrouvée dans la peau de ces jeunes j'ai aussi pris un peu plus conscience de l'envers du décors en vivant cette année du bac du côté des parents.
Il y a donc dans ce documentaire une dimension humaine, une dimension sociale et également une certaine forme d'esthétisme avec cette ville représentative du Nord de la France où le désenchantement est en train de rogner petit à petit la part de rêve qui pouvait encore y subsister.


"Chante ton bac d'abord" est un touchant documentaire qui met parfaitement en lumière les envies, les doutes et les peurs des adolescents dans cette année charnière de leur vie qu'est le baccalauréat, le tout sur fond musical, un documentaire quelque peu atypique qui mérite le coup d’œil.