samedi 20 février 2016

Les arpenteurs de Kim Zupan


Nuit après nuit, dans une prison du Montana, le jeune Val Millimaki s’assied face aux barreaux qui le séparent de John Gload, 77 ans, en attente de son procès. Astreint aux pires heures de garde, l’adjoint du shérif se retrouve à écouter le criminel qui, d’instinct, est prêt à lui révéler en partie son passé. Petit à petit, Millimaki se surprend à parler, lui aussi, et à chercher conseil auprès de l’assassin. En dépit des codes du devoir et de la morale, une troublante amitié commence à se tisser entre les deux hommes. (Gallmeister) 

Un arpenteur, c'est une personne qui évalue la superficie d'un terrain, c'est un professionnel de la mesure; c'est aussi une personne qui marche beaucoup, regarde et cherche.
Valentine Millimaki est l'adjoint du shérif, affecté au service de nuit il se retrouve à couler les longues heures de la nuit dans les couloirs de la prison et à partager l'insomnie qui le ronge pendant la journée à celle nocturne de John Gload, 77 ans, en attente de son procès et homme aux nombreux cadavres dépecés et enterrés.
Étrangement, et contrairement au code moral et éthique, ces deux hommes vont se parler et développer un lien troublant, car ils ont de nombreux points en commun, à commencer par leur enfance douloureuse : "On est juste deux orphelins malchanceux, pas vrai, Valentine ?".
Chacun à leur manière est un arpenteur, John Gload parce qu'il a parcouru maints espaces pour y enterrer ses cadavres, Valentine Millimaki parce qu'en dehors de ses heures de service il part à la recherche de personnes disparues, que bien souvent il retrouve mortes.

"Les arpenteurs" est le premier roman de Kim Zupan, et comme toute première oeuvre il y a dedans quelques maladresses, mais c'est surtout un très beau roman psychologique et très prometteur pour les récits à venir de cet auteur.
C'est un roman à l'atmosphère bien particulière, le lecteur y ressent le désert et le danger du Montana, une beauté sauvage à l'état pur, mais il y a aussi l'enfermement, la lourdeur et la noirceur d'une cellule de prison, ainsi que la laideur et les mauvaises intentions des personnes qui entourent Val et John Gload.
Le personnage de Val est particulièrement travaillé, il est sans nul doute l'un des plus complexes mais surtout le plus abouti.
C'est un homme torturé, n'arrivant plus à dormir et ne comprenant pas ce qui se passe autour de lui : ses collègues ne l'apprécient pas et cherchent à se jouer de lui, sa femme le quitte car elle ne supporte plus la vie isolée et cet homme absent mentalement : "Bon sang, Val, voilà ce que tu es, à peine plus qu'un fantôme qui arpente la terre avec tous ces cadavres dans la tête.", et c'est dans la personne de John Gload qu'il va trouver une forme d'ami, ou en tout cas une oreille attentive.
A l'inverse, John Gload reste plus mystérieux, presque comme un fantôme, et pour le coup j'aurai souhaité que l'auteur décortique de la même façon ce personnage par rapport à celui de Val.
Mais ses motivations restent floues : pourquoi a-t-il tué autant toute sa vie ? Qu'est-ce qui l'a motivé à chaque fois ?
Du début à la fin ce personnage demeure insaisissable, il y a une noirceur qui l'habite mais également une certaine lumière.
C'est un personnage dual qui aurait pu être exploité un peu plus.
Néanmoins la relation qui se tisse entre ce dernier et Val est tout simplement fascinante, j'ai beaucoup aimé cet homme à la dérive qui ne trouve comme seule bouée de secours qu'un taulard au passé plus que sanguinaire.
L'autre aspect que j'ai trouvé maladroit, c'est la construction par moment du récit à travers des flashbacks qui laissent planer le doute sur l'époque et les personnes concernées.
Le récit est parfois déstructuré, je m'y suis un peu perdue, sans doute une maladresse de débutant.
Pour le reste, ce roman est noir à souhait et fut un moment très plaisant de plongée en plein cœur du Montana et de la noirceur humaine.
C'est un polar noir qui change de l'ordinaire et transporte dans un univers différent de notre confort quotidien, un voyage littéraire que j'ai pris beaucoup de plaisir à effectuer.
Une nouvelle fois une très belle découverte des (décidément) formidables éditions Gallmeister.

"Les arpenteurs" de Kim Zupan est un polar bien noir, bien psychologique et dépaysant, une première oeuvre prometteuse à découvrir sans plus attendre.

Je remercie Babelio et les éditions Gallmeister pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une opération Masse Critique.

2 commentaires:

  1. Ah, je suis bien contente que tu aies aimé ce très bon roman !!! :)

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    1. J'aime tout ce qui est publié par Gallmeister, c'est bien simple !

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