dimanche 5 novembre 2017

L'innocente d'Eric Warnauts et Guy Raives


Allemagne, mars 1945. Nina Reuber s'évade d'un centre de formation de la future élite du national-socialisme, déguisée en garçon. Réquisitionnée comme traducteur par une division de l'infanterie américaine, elle part pour Berlin. C'est là, sur les ruines du Troisième Reich et à l'aube du procès de Nuremberg, que Nina deviendra une adulte. (Le Lombard)

J'aime beaucoup les bandes dessinées du duo Eric Warnauts et Guy Raives, après "Les temps nouveaux" et "Après-guerre", voici une de leurs premières productions rééditée aux éditions Le Lombard dans la collection Signé, ce qui laisse présager une grande qualité.
C'est un peu la marque de fabrique de ce duo, l'histoire se déroule à la fin et à la suite de Seconde Guerre Mondiale.
En Allemagne, en mars 1945, il est encore question d'un Reich de 1000 ans, mais à la mort de ses grand-parents, la jeune Nina Reuber s'évade d'un centre de formation de la future élite du national-socialisme grâce à la complicité d'une formatrice : "Nous savons que vous êtes un être sensible, Nina. Trop sensible pour cette terrible époque.", déguisée en homme.
C'est ainsi qu'elle va croiser les G.I Américains et rejoindre Berlin.
En chemin, elle croise la route de Wim, un homme avec qui elle entretiendra une relation trouble, allant de la forte amitié à l'amour, mais dans laquelle chacun se retient de faire le geste de trop.
Nina assistera au procès de Nuremberg et prendra conscience des atrocités commises par son peuple, Wim aura beau la raisonner : "Mais toi, tu n'y peux rien, Nina. Tu n'y es pour rien. Toi, tu es innocente.", cela ne changera rien et à partir de cet instant Nina perd l'innocence de sa jeunesse et prend conscience de tout ce qu'il y a à reconstruire.
Elle assiste aussi aux amours passagères de Wim, et finit par s'éloigner de lui, blessée par toutes ses coucheries et leurs sentiments communs qui ne s'expriment pas, là encore elle perdra l'innocence de l'amour dans un retournement final.

Il y a le graphisme si particulier du duo Warnauts et Raives, reconnaissable facilement, qui suffit à lui seul pour créer une ambiguïté et une atmosphère si particulière.
L'ambiguïté s'installe dès les premières planches, avec une Nina entretenant une relation charnelle avec l'une des formatrices puis qui se travestit en garçon.
La sensualité est présente tout au long de cette histoire, Nina dégage un certain sex-appeal et entretient des relations charnelles troubles avec plusieurs personnages croisant sa route.
Mais plutôt que de juger ce personnage ou de l'analyser par le petit bout de la lorgnette, Nina représente surtout l'innocence, sans avoir été coupable ni même témoin des crimes perpétrés par les nazis elle en est fortement marquée, cela change sa perception du monde mais aussi son but dans la vie.
Malgré sa sensualité c'est sans doute le personnage le plus pur de l'histoire, et par conséquent celui qui va voir son idéal piétiné et perdre ses illusions.
Il y a beaucoup d'émotion dans cette histoire où la petite se mêle à la grande, ainsi que de l'humanité.
C'est un cocktail qui fonctionne bien et qui a su me séduire dès les premières images, à tel point que j'ai lu ce récit d'une seule traite.
Si je peux comprendre que le personnage ainsi que certains aspects de l'histoire puissent mettre mal à l'aise, j'ai trouvé cette histoire très belle mais aussi très cruelle, d'autant qu'elle est particulièrement réaliste et aurait tout à fait pu se produire dans la réalité.
Une nouvelle fois le duo Warnauts et Raives a fait mouche et livre un bien beau récit doublé d'un formidable portrait de jeune femme sous fond d'une Allemagne en ruine en 1945 qui doit se reconstruire et apprendre à faire la paix avec son passé.

"L'innocente" est une très belle bande dessinée cruelle, de par les horreurs de la guerre mais aussi parce qu'elle marque la fin de l'innocence et des illusions de l'amour de la jeune Nina, une histoire à découvrir sans aucune hésitation.

2 commentaires:

  1. C'est donc sans hésitation que je note ce titre !

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    1. Grâce à la réédition il doit être plus facilement trouvable.
      J'aime beaucoup ces deux auteurs de manière générale.

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