jeudi 14 février 2019

Glass de M. Night Shyamalan

       
     

Peu de temps après les événements relatés dans Split, David Dunn - l’homme incassable - poursuit sa traque de La Bête, surnom donné à Kevin Crumb depuis qu’on le sait capable d’endosser 23 personnalités différentes. De son côté, le mystérieux homme souffrant du syndrome des os de verre Elijah Price suscite à nouveau l’intérêt des forces de l’ordre en affirmant détenir des informations capitales sur les deux hommes. (AlloCiné) 


M. Night Shyamalan est capable du pire comme du meilleur, de signer des films géniaux ("Sixième sens" pour n’en citer un) et d’autres de facture nettement inférieure ("Le village" est bien, j’avais juste découvert le twist longtemps avant la fin).
Ce réalisateur a même failli disparaître des écrans après plusieurs échecs cuisants, cela aurait été dommage car j’ai toujours trouvé qu’il avait de bonnes idées même lorsque ses films étaient ratés ("Phénomènes" par exemple), c’est avec peu de moyens qu’il est revenu sur le devant de la scène en signant le formidable "Split", dont la scène finale annonçait du lourd, du très lourd, et laissait le spectateur pantois, en faisant le parallèle avec un film réalisé plus de dix ans auparavant : "Incassable", film que j’avais apprécié moyennement lors de sa sortie en salle.
Aujourd’hui je comprends mieux l’impression ressentie en sortant de la salle de cinéma à l’époque, il manquait "Split" et "Glass" pour boucler la boucle comme on dit et donner toute sa dimension au film.


Petit rappel, dans "Incassable" David Dunn était révélé à lui-même comme un super-héros, un homme incassable résistant à tout (à l’époque il était le seul survivant d’une catastrophe ferroviaire), enfin aidé dans cette révélation par Elijah Price, alias Mr Glass, le vilain à l’origine notamment du déraillement de train et qui n’attendait qu’un signe pour tester sa théorie comme quoi les super-héros existent réellement ; dans "Split" le spectateur faisait la connaissance de Kevin Crumb, capable d’endosser 23 personnalités différentes dont l’une était particulièrement attendue : La Bête, raison pour laquelle Kevin et ses multiples personnalités kidnappaient des jeunes filles, Casey étant la seule à avoir été laissée vivante par La Bête.
Glass est dans la continuité immédiate de Split, David Dunn a entrepris de traquer La Bête, aidé de son fils pour toute la partie technologie et dans la confidence de la réelle nature de son père depuis plusieurs années, tandis que La Bête continue de kidnapper des jeunes filles et de faire parler d’elle.
Ça, c’est la première partie du film, où les personnages évoluent en extérieur et sont encore libres de leur mouvement, avec une formidable scène d’affrontement entre David et La Bête.
Et puis le film bascule dans sa deuxième partie, où David et Kevin sont enfermés dans un asile psychiatrique et y retrouvent Elijah, tous trois font face à une psychiatre qui tentent de les convaincre qu’ils n’ont pas de super-pouvoirs, ainsi que le spectateur.


C’est assez culotté de proposer ce qui apparaît comme un film d’action en le faisant se dérouler en grande partie dans un lieu clos (et donc au final ce n’est pas un film d’action).
Mais cette deuxième partie a une dimension psychologique forte : à l’image des personnages, le spectateur doute.
Doute de la réelle nature des personnages, mais aussi de ce que le réalisateur a voulu lui montrer depuis deux films.
Mais en étant un petit peu attentif vous pourrez avoir la puce à l’oreille, ce fut le cas pour moi même si j’étais loin d’avoir deviné l’ampleur de la révélation finale. M. Night Shyamalan continue sa réflexion entamée il y a plus de quinze ans sur les pouvoirs et les super-héros, dans un film à l’encontre des codes de ce genre et bien loin des effets spéciaux et/ou des personnages détenant leurs pouvoirs suite à des accidents ou des origines extra-terrestres.
Voilà un éclairage nouveau sur ce thème, une vision que je trouve véritablement fascinante et qui fait toute la puissance de cette désormais trilogie.
C’est extrêmement malin de la part du réalisateur, j’aime énormément toute la philosophie qui se dégage du film ainsi que les questions qu’il soulève, notamment celle de ce qui nous façonne, de ce qui détermine notre force et notre esprit.
Par contre, je tiens à préciser qu’il me paraît essentiel d’avoir vu "Incassable" et "Split" avant "Glass", certes ce dernier comporte de nombreuses références et pourrait se voir sans les deux autres mais ce serait passer à côté de beaucoup de subtilités et pour le coup moins bien comprendre l’œuvre dans son ensemble.
Et pour conclure, parlons de la performance des acteurs. James McAvoy livre, dans "Split" comme dans "Glass", une performance éblouissante, endossant 23 personnalités auxquelles il arrive à donner vie (d’ailleurs il serait inutile qu’il précise à chaque changement de personnalité, le spectateur finit par les reconnaître et n’est pas complètement crétin, et tant pis s’il n’a pas vu l’opus précédent pour mieux savoir les reconnaître).
Je me doutais que c’était un grand comédien, sa prestation le prouve ici complètement.
Quant à Bruce Willis, le voilà ressuscité après des années d’errance, un peu à l’image du réalisateur il était perdu pour la cause si j’ose dire, et là, la magie opère : il ré-endosse l’imperméable de David Dunn et rappelle à tout un chacun que oui, il sait jouer, oui c’est un comédien, tant mieux car on avait par l’oublier ces dernières années.
Mention spéciale également à Spencer Treat Clark interprétant Joseph Dunn, le réalisateur a été assez malin pour reprendre le comédien qui l’incarnait dans "Incassable".
Belle performance également de Samuel L. Jackson, ainsi que de Sarah Paulson, inquiétante à souhait avec ses cols roulés, et de la jeune Anya Taylor-Joy.
Visuellement, le film est très réussi, bien que réalisé avec des moyens modestes, j’ai tout particulièrement apprécié le jeu de couleurs ainsi que les mises en scène.
J’espère qu’un coffret sortira avec les trois films, il me tarde de pouvoir les revoir à la suite car ce sont des films que l’on peut voir plusieurs fois car tout n’est pas visible au premier visionnage.


"Glass" est un film qui ne laisse pas de glace, il clôt de façon intelligente la trilogie entamée avec "Incassable" et continuée avec "Spilt", en proposant un film sur les super-héros bien loin des franchises Marvel et tut le tintouin, et re-propulse M. Night Shyamalan sur le devant de la scène, rappelant à tous ceux qui avaient pu l’oublier et/ou le critiquer à quel point ce réalisateur est génial.

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