dimanche 29 septembre 2013

Un village français saison 5 - Quelques réflexions sur cette nouvelle saison et le devenir des personnages



Mardi soir sur France 3, c'est le début de la diffusion de la cinquième saison de l'excellente série "Un village français".
Cette série, au risque de me répéter, est de grande qualité (excellente donc) et mérite d'être regardée, c'est même sans doute la création originale la plus intéressante de ces dernières années de la télévision publique.

Pour ceux qui auraient raté les épisodes précédents, "Un village français" retrace le quotidien de Villeneuve, petite ville fictive du centre de la France, depuis l'Occupation en juin 1940, à travers des notables, des fermiers, le médecin et d'autres habitants.
Après des débuts hésitants, la série a réussi à trouver son public et le principe d'une saison couvrant une année de la guerre a vite été acté.
D'un point de vue historique, si certaines libertés ont été prises, elles restent mineures, le fond est bien là, d'autant plus que les scénaristes se sont attachés les services d'historiens et qu'à la fin de chaque épisode des personnes interviennent pour raconter ce qu'elles ont vécu pendant la guerre, en lien avec le thème de l'épisode.

1943 : STO et maquis, les thèmes de cette nouvelle saison sont lancés.
Qui dit maquis dit résistance : les actes de résistance isolés, les actions des communistes, les débuts des premiers groupes de résistants ont déjà été abordés dans les saisons précédentes, inutile de se voiler la face, dans celle-ci des personnages principaux vont mourir.
Il est illusoire de croire que tous les personnages principaux pour lesquels le spectateur a développé un lien plus ou moins proche vont survivre à la guerre et arriver sans une égratignure ou presque à la Libération.
Peu des résistants de la première heure ont vu la fin de la Guerre, il y a de quoi s'inquiéter pour Marie Germain, Marcel, Bériot, a minima.
Que va devenir le bon docteur et ex-maire du village, Daniel Larcher ?
Il serait temps qu'il se décide celui-là, sinon c'est le destin qui choisira pour lui et pas sûre qu'il appréciera le résultat.
A en croire la bande annonce, il faut s'attendre à des surprises, à des morts également, les scénaristes ne s'en sont pas cachés, mais certains extraits m'interpellent.
Daniel partageant une cellule avec son frère Marcel, tous deux marqués et sans doute torturés : ils auraient réussi à s'entendre sur quelque chose ces deux frères que tout oppose ? Daniel aurait pris le parti de la résistance après être passé dans le maquis ?
Marchetti fera sans doute du Marchetti, soit il va dans la collaboration à fond soit il revoit sa position, j'espère que la première hypothèse sera retenue car il ne faudrait pas que tous les personnages basculent du "bon" côté, la crédibilité de la série en prendrait un coup sinon.
La brave Jeannine est désormais l'épouse de Chassagne, le nouveau maire de Villeneuve et surtout le salaud que tous les spectateurs ont pris en grippe depuis la saison passée, mais il semblerait qu'elle "flirte" avec la résistance via son ancien mari. Ah non, je l'aimais bien Jeannine en Pétainiste alcoolique,elle n'a tout de même pas été transformée en sympathisante de la résistance ?
Heinrich Muller a des doutes, de gros doutes sur l'issue de la guerre, j'ai l'impression qu'il va être moins arrogant le garçon, d'autant plus qu'il souffre de problèmes de dépendance à la morphine (pas une nouveauté, le spectateur en est informé depuis longtemps). J'attends de voir, mais ce personnage pourtant détestable a réussi à se faire aimer des spectateurs, j'ose espérer que les scénaristes ne vont pas le faire mourir dans cette saison, il faut encore tenir pour 1944 voire 1945.
Reste le cas Hortense, là j'avoue ne pas la comprendre (d'un autre côté je ne la comprends pas depuis le début), elle est retournée avec Muller mais la raison échappe à tout le monde : est-elle vraiment amoureuse de lui ? A-t-elle une idée derrière la tête ? Est-ce le côté dangereux que cet homme représente qui l'attire ? Apparemment elle reste dans son hystérie et je ne sais pas trop comment elle va traverser cette saison.
Quant à Sarah, je ne m'étendrai pas sur ce personnage, que les scénaristes en fassent ce qu'ils veulent, elle aurait dû disparaître au cours de la saison 3 mais les scénaristes l'ont "miraculeusement" fait revenir, il fallait y penser avant aurais-je tendance à dire.
Personnellement, même si ce personnage représente le calme dans la tourmente, un havre de paix avec la tête bien vissée sur les épaules, je la trouve fade par rapport aux autres personnages féminins bien plus tranchés et dans l'excès. Finalement, elle était plus délurée dans la saison 1 et ce n'était pas plus mal.

Tout ça pour dire que je ne sais pas trop à quelle sauce vont être mangés les personnages et par ricochet les téléspectateurs, mais dans les morts potentiels je verrais bien Bériot l'instituteur, Marcel Larcher, Marie Germain, certains jeunes du maquis introduits dans cette nouvelle saison, éventuellement, mais je ne le souhaite pas, Heinrich Muller.
Cette saison-ci, le téléspectateur pourra découvrir l'envers du décor du maquis et les actions de la résistance qui commence à se regrouper, à mon avis c'est aussi une année charnière pour se positionner, en tout cas pour ceux qui ont de réelles convictions.
Et si c'est pour faire piaffer encore plus d'impatience le téléspectateur que France 3 a décidé de coupe en deux la diffusion de cette saison, ce n'est pas bien malin.
Encore un choix hasardeux, déjà que cette série a souffert d'une programmation aléatoire qui changeait systématiquement de jour de diffusion d'une saison à l'autre, je crains qu'une césure de cette saison fasse perdre des téléspectateurs en cours de route, d'un autre côté, ceci ne m'étonne qu'à moitié étant donné que cette saison a été enregistrée en deux fois.
En guise de conclusion, je vous laisse avec l'une des affiches de la campagne publicitaire mise en place par France 3 pour cette saison 5, les petits plats ont été mis dans les grands pour faire parler de la série, n'oubliez pas c'est à partir de mardi 1er octobre à 20h45 sur France 3.

Il était une fois en France Tome 6 La Terre Promise de Sylvain Vallée et Fabien Nury


« Jamais à l’abri… » 
Juillet 1949. Joseph Joanovici comparaît devant la Cour de Justice de Paris pour collaboration. Son avocat est optimiste : les jurés lui pardonneront d’avoir fait fortune sur le dos des nazis, quand ils verront le nombre de Juifs qu’il a sauvés ! Monsieur Joseph lui aussi veut encore croire qu’il pourra se faire oublier, peut-être même trouver refuge en Terre Promise... C’est sans compter sur la haine tenace du juge Legentil, qui suivrait son ennemi intime jusqu’en enfer si cela lui permettait de faire triompher la justice. Immense succès public et critique, récompensée par le Prix de la Série à Angoulême, la saga de Fabien Nury et Sylvain Vallée se clôture superbement par ce 6e album. Les dernières années d’un personnage ambigu et magnifique, dont les paradoxes incroyables, mis en exergue avec virtuosité par les deux auteurs, perturbent les notions de bien et de mal... (Glénat)

Je ne sais si Joseph Joanovici a mérité la Terre Promise, mais c'est en tout cas en Israël qu'il fuit, lassé de sa vie à Mende, assigné à résidence, après plusieurs mois passés en prison et rejeté par ses filles qui lui reprochent la mort de leur mère, sa vie de façon générale et la présence de l'horripilante Lucie-Fer à ses côtés.
Inutile de se voiler d'illusion, si Joseph Joanovici est en semi-liberté, c'est parce que le Fisc a besoin qu'il lui rembourse les sommes dues et non payées depuis des années : "Ils m'ont tout pris, et maintenant, ils vont me remettre au turbin pour leur compte comme une vulgaire putain.", et de toute façon, Joanovici est un homme de ressources qui même à Mende se relance dans le commerce de la ferraille et gagne des sommes importantes d'argent.
Pourtant, ses ennemis sont toujours là, qu'il s'agisse du petit juge de Melun ou bien d'autres personnes, et ce n'est pas faute d'avoir été mis en garde par sa défunte femme, mais Joseph Joanovici se sent ici traqué : "Je ne serai jamais à l'abri.", la France n'est plus un pays sûr alors il s'en va.
Mais c'est sans compter sur le juge de Melun qui a décidément une dent contre lui et qui réussit à convaincre Lucie, la fidèle Lucie, de lui fournir des informations de premier ordre.
Il faut dire que Lucie y trouve son compte : l'homme qu'elle aime désespérément revient en France et elle peut reprendre l'emprise qu'elle exerce sur lui, ou plutôt qu'elle croit exercer.
Joseph Joanovici a perdu de sa superbe, c'est un vieil homme désormais, mais sa première et ultime confrontation avec son pire ennemi est un grand moment de cette série, pour ne pas dire son apothéose.
Depuis le temps que ces deux-là se couraient après, il fallait bien qu'ils finissent par se parler et se dire ce qu'ils ont sur le cœur, mais la confession de chacun a des répercussions bien particulières et cela leur permet de se rendre compte que rien n'est tout noir ou tout blanc et que la vérité n'est parfois pas celle que l'on attendait : "Vous croyez quoi ? Qu'on se lève un matin et qu'on décide d'être un criminel ? Qu'on se dit "Tiens aujourd'hui, je vais être un gros salaud, pour le plaisir ?" ce n'est pas comme ça que ça se passe. On fait ce qu'on peut dans la vie, avec les cartes qu'on a.".
Ce volume a le mérite d'offrir des clés de compréhension au premier tome que je trouvais confus et peu clair sur bien des aspects, mais également de conclure cette histoire d'une façon que je qualifierai de surprenante.
Il ne faut pas s'attendre à quelque chose de grandiose et surtout pas à avoir des réponses à toutes nos interrogations, impossible une fois le livre refermé de dire qui était vraiment Joseph Joanovici et s'il a fait le bien, le mal, les deux, ou si c'était simplement un homme qui a tout fait pour se sortir de sa condition et qui y a réussi.
Le personnage était complexe, ici les auteurs ont choisi de s'inspirer de faits réels pour bâtir une fiction et c'est une réussite, tant du point de vue de l'intrigue qu'au niveau des graphismes.
Cette série est esthétique et sobre, une belle réussite du duo Sylvain Vallée et Fabien Nury qui a su travailler de concert pour fournir une bande dessinée de qualité.

Difficile de dire qui du juge Legentil ou du ferrailleur Joseph Joanovici a le plus vendu son âme au diable pour obtenir ce qu'il désirait, une chose est sûre : l'un comme l'autre auront perdu beaucoup dans leur quête respective.
"La Terre Promise" est un dénouement à la hauteur de cette formidable et intéressante série qu' "Il était une fois en France" qui retrace, de façon romancée, la vie et le parcours de Joseph Joanovici, un homme ambigu qui restera à jamais une énigme de l'Histoire.

samedi 28 septembre 2013

Il était une fois en France Tome 5 Le petit juge de Melun de Sylvain Vallée et Fabien Nury


1946. Jacques Legentil, juge d'instruction à Melun, enquête sur le meurtre du résistant Robert Scaffa. L'affaire semble vite résolue, car les assassins revendiquent leur crime : Joseph Joanovici et ses complices prétendent simplement que leur victime était un traître ! Joanovici est riche et puissant. C'est un héros. Il semble intouchable. Corruption, menaces, pressions politiques… Le « petit juge de Melun » encaisse tout, et il est bien décidé à rendre coup pour coup ! Triomphe public et critique, récompensée par le Prix de la Série à Angoulême, la saga de Fabien Nury et Sylvain Vallée nous dresse maintenant un tableau dantesque de la France de l'après-guerre… (Glénat)

Depuis le premier tome où il est question du "petit juge de Melun" qui cherche désespérément à coincer Joseph Joanovici, il ne vit d'ailleurs que pour ça, il était temps qu'un tome soit plus centré sur ce personnage et que le lecteur en apprenne plus sur lui et essaye de comprendre ce qui peut motiver une telle haine qui finit presque par ressembler à une forme d'admiration.
"Tu avais tout pour être heureux. Un beau métier, une famille ... et tu sacrifies tout pour ... pour quoi au juste ? Pour faire juger un sale type qui a collaboré avec les boches ? La belle affaire ! La moitié de ce pays a collaboré pendant que l'autre moitié fermait les yeux !", le lecteur est un peu comme la femme du juge : dubitatif face à un tel entêtement.
Le juge Legentil ne lâche rien, il veut faire condamner Joseph Joanovici : "Tu n'as pas encore compris ? Ca ne sert à rien ! Ce type est intouchable !", mais ce dernier a toujours eu des ressources et des appuis puissants : "Il a les flics à sa pogne ! La moitié de la préfecture est sur ses fiches de paye ! Tant que ces poulets seront là pour encaisser tout le monde payera.", chacun rend coup pour coup, c'est un tome comportant une violence sous-jacente qui atteint son paroxysme à la fin.
Le parallèle entre le juge et Joanovici est intéressant, l'un a pris en grippe l'autre qui l'ignore superbement mais ils sont chacun dans une relative forme de solitude, de cela les images sont fortement évocatrices.
Il en va de même pour les femmes : l'épouse de Joanovici, Eva, face à la fidèle et dévouée Lucie.
La première s'est volontairement éloignée de son mari et de ses activités, la deuxième est follement éprise de son patron qui ne lui rend pas la pareille.
C'est sombre, sans doute encore plus que pendant la Seconde Guerre Mondiale, d'autant plus qu'il règne dans ce cinquième tome une odeur nauséabonde à force de remuer la boue et les ordures du passé.

"Le petit juge de Melun" est un tome placé sous le signe de l'affrontement, dans la suite logique de cette série décidément excellente tant au niveau de la narration que du graphisme qui s'attache à romancer l'histoire de Joseph Joanovici : riche, puissant, héros ou salaud ?

mardi 24 septembre 2013

La dernière conquête du Major Pettigrew de Helen Simonson


À Edgecombe St. Mary, en plein coeur de la campagne anglaise, une tasse de thé délicatement infusé est un rituel auquel, à l'heure dite, le major Ernest Pettigrew ne saurait déroger pas plus qu'à son sens du devoir et à son extrême courtoisie, aussi désuète que touchante, qui font de lui l'archétype même du gentleman anglais : raffiné, sarcastique et irréprochable. Dans ce petit village pittoresque ou les cottages le disputent aux clématites, le major a depuis trop longtemps délaissé son jardin. Désormais veuf, il a pour seule compagnie ses livres, ses chers Kipling, et quelques amis du club de golf fuyant leurs dames patronnesses. Ce n'est guère son fils, Roger, un jeune londonien ambitieux, qui pourrait le combler de tendresse. Mais, le jour ou le major apprend le décès de son frère Bertie, la présence douce et gracieuse de Mme Ali, veuve elle aussi, va réveiller son coeur engourdi. Tout devrait les séparer, elle, la petite commerçante d'origine pakistanaise, et lui, le major anglais élevé dans le plus pur esprit britannique. Pourtant leur passion pour la littérature et la douleur partagée du deuil sauront les réunir. Ils vont, dès lors, être confrontés aux préjugés mesquins des villageois, ou le racisme ordinaire sévit tout autant dans les soirées privées, sur le parcours de golf, à la chasse, sur les bancs de messe que dans les douillets intérieurs. Et les obstacles seront pour eux d'autant plus nombreux que leurs familles s'en mêlent : Roger s'installe dans un cottage voisin avec Sandy, sa petite amie américaine, et le neveu de Mme Ali, musulman très strict rentré du Pakistan, se découvre un enfant caché... C'est avec beaucoup de charme et d'intelligence que Helen Simonson s'empare du thème des traditions pour montrer combien elles peuvent être à la fois une valeur refuge et un danger. Il se dégage de son roman une atmosphère so british qui enchante. Reste une question : votre tasse de thé, vous le prendrez avec un nuage de lait ou une tranche de citron ? (Nil Editions)

A l'heure où le brouillard de la nuit est tombé et où le froid commence à s'insinuer dans la maison, on reprendrait bien une bonne tasse de thé bien chaud, et puis, on n'aurait rien contre une petite romance typiquement anglaise, qui mettrait en scène, par exemple, un major à la retraite et une épicière d'origine pakistanaise dans un petit village rural bien comme il faut.
Mais voilà, il y a ce qu'il faut faire et ne pas faire, les gens à fréquenter dits de bonne société et ceux qu'il ne faut que côtoyer quelques minutes par jour et surtout, il faut respecter à la lettre toutes ces traditions sous peine de choquer les gens bien pensants et de remettre en cause l'équilibre familial : "Et depuis quand comptes-tu des épicières parmi tes amies ? Tu es devenu copain comme cochon avec le laitier, maintenant ?".
Car notre major, il aurait un sérieux handicap : celui d'avoir un fils banquier à la City littéralement dévoré par l'ambition et qui ne ferait même plus attention aux gens qui l'entourent, sa fiancée tout d'abord et même son père.
Et puis, il devrait aussi se heurter aux commérages du village, aux éminents membres de son club de golf qui trouveraient so scandalous que ce monsieur comme il faut fréquente une (vulgaire) épicière.
Je rajouterai également une petite touche familiale, parce qu'un fils égocentriste ne suffirait pas : la perte de son frère, ses relations tendues avec sa belle-soeur et surtout les difficultés à récupérer l'un des deux fusils de son père qui lui revient en tant qu'aîné alors que la-dite belle-soeur aimerait pouvoir se payer une croisière, entre autres choses, avec la vente du-dit fusil de collection, tout ça parce qu' "En réalité, on ne devrait pas avoir à négocier avec sa famille comme un vendeur de voitures d'occasion.".
Mais notre major, il serait aussi, et en dépit de son âge, follement romantique :  "Elle et lui, de retour d'une longue promenade, vers une pièce éclairée par une lampe, remplie de livres, et un verre de vin à la table de la cuisine ...", avec l'imagination qui s'activerait à 200% pour trouver un moyen de séduire Madame Ali, l'épicière, qui ne laisse pas indifférent, loin de là, d'autant plus qu'elle se met à lire Kipling et en discute avec lui, et que ça donnerait à notre major une furieuse envie de l'embrasser.
Mais comme tout amoureux qui se respecte, il serait aussi un peu stupide : "Elle pressa le pas vers le bout de l'allée et, quand elle disparut, robe bleue dans la nuit profonde, il comprit qu'il était un sot. Cependant, à cet instant, il ne voyait aucun moyen d'être un autre homme.", car après tout, personne n'est parfait.
Vous en avez rêvé ?
Helen Simonson l'a fait, en écrivant avec une plume enlevée cette belle histoire entre un major anglais veuf et une épicière également veuve.
Pour un premier roman c'est réussi, tout y est : le charme, la romance, des scènes amusantes prêtant à sourire et d'autres donnant envie de baffer le personnage (surtout le fils du major).
Mine de rien, sous une apparence légère ce roman aborde intelligemment des thèmes de société : les relations père-fils, le fossé entre générations, le poids des coutumes, des traditions et de la religion, la séparation nette et tranchée entre les classes sociales, le racisme.
Même si l'édition dans laquelle j'ai lu ce roman comporte quelques coquilles, particulièrement des virgules placées aléatoirement, la très belle couverture suffit à elle seule à attirer le regard et à tendre la main pour saisir le livre.

"La dernière conquête du Major Pettigrew" est un roman délicieusement so british qui se laisse déguster avec un bon thé et quelques biscuits, et qui charme le lecteur par son univers britannique à nul autre pareil, tout comme la plume de Helen Simonson.

Top Ten Tuesday #15


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Les 10 meilleurs deuxièmes livres de séries

Petite précision, la liste ci-dessous ne signifie en rien que j’ai trouvé les deuxièmes livres meilleurs que les premiers, juste qu’ils avaient un petit quelque chose en plus qui m’a confortée dans la lecture de ces séries.

1) "Le seigneur des anneaux - Les deux tours" de J.R.R Tolkien ;
2) "Bridget Jones : L’âge de raison" de Helen Fielding ;
3) "La lumière des justes – La Barynia" de Henri Troyat ;
4) "Harry Potter – La chambre des secrets" de J. K Rowling ;
5) "Les rois maudits – La reine étranglée" de Maurice Druon ;
6) "Les chroniques du monde de Narnia – Le Lion, la Sorcière Blanche et l’Armoire magique" de Clive Staple Lewis ;
7) "Des grives aux loups – Les palombes ne passeront plus" de Claude Michelet ;
8) "Les petites filles modèles" de la Comtesse de Ségur ;
9) "Les semailles et les moissons - Amélie" de Henri Troyat ;
10) "L’épervier – Le rocher du crâne" de Patrice Pellerin.

dimanche 22 septembre 2013

Avec vue sur l'Arno d'Edward Morgan Forster


Lucy Honeychurch n'aurait jamais pu partir à la découverte de l’Italie comme toute jeune Anglaise de bonne famille sans la surveillance d’un chaperon zélé, sa cousine Charlotte. A leur arrivée à Florence, les deux voyageuses constatent avec dépit que la chambre qui leur a été réservée n’a pas de vue sur l’Arno. En violation de toutes les convenances, deux inconnus, M. Emerson et son fils George, leur proposent de leur échanger la leur qui, elle, donne sur le fleuve. L’attitude cavalière de George envers Lucy et le peu de résistance qu’elle lui oppose poussent Charlotte à décider d’abréger leur séjour. Mais le hasard va à nouveau réunir les Emerson et les Honeychurch, en Angleterre cette fois… Un roman délicieux sur l’éveil des sentiments et le poids des conventions sociales par un des maîtres de la littérature anglaise. (10/18)

La jeune Lucy Honeychurch est issue de la bonne société anglaise et comme toute jeune fille de ce milieu qui se respecte, elle se doit d'effectuer un voyage en Italie, chaperonnée par sa cousine Charlotte.
"On ne vient pas en Italie chercher des suavités, on vient y chercher la vie.", et c'est bel et bien ce qui va arriver à Lucy.

Paru il y a plus de cent ans, "Avec vue sur l'Arno" est loin, très loin d'être démodé.
Ce roman a su garder son côté romantique, son chamboulement des convenances et des règles de bienséance de la société anglaise sous Edouard VII, et sa critique omni-présente de cette même société bien trop rigide pour une personne comme Lucy qui serait aujourd'hui qualifiée de feu sous la glace : "Lucy était, certes, une révoltée, mais non point dans le sens où il l'entendait; elle était une révoltée désirant non pas un salon plus vaste, mais l'égalité auprès de l'homme qu'elle aimait.'.
Je reconnais également que le cadre idyllique de la Toscane y est aussi pour beaucoup et renforce encore plus le côté romantique, entre la magnifique Santa Croce, les places de Florence et l'Arno avec ses vertes collines, le cadre ne pouvait que se prêter à une romance des plus passionnées.
Car c'est bien de romance dont il est question dans ce roman, d'un baiser volé sur une colline de Florence, d'un autre raté par un fiancé anglais trop conventionnel et enfin d'un dernier volé sur un chemin d'Angleterre trop étroit; mais également de passion : celle qui habite la jeune Lucy pour George Emmerson et dont elle n'aura de cesse de l'étouffer, finissant par mentir à tout son entourage et surtout à elle-même.
Car à cette époque, il n'était pas bien vu de s'éprendre d'un homme aussi libre que George et dont le père est lui-même peu conventionnel, d'autant plus que Lucy a été éduquée pour être une jeune fille bien sous tous rapports et à se laisser guider par la raison et non par ses sentiments.
Le lâcher prise sera d'autant plus dur que cela ira à l'encontre de toute son éducation : "La passion devait se croire irrésistible, oublier politesse, tact et autres fléaux d'une nature raffinée. Par-dessus tout, elle devait aller, sans demander de permission, quand elle avait droit de passage.", et c'est ce qui rend cette lecture encore plus magnifique et le personnage de Lucy extrêmement attachant.
Si la partie italienne sert essentiellement à planter le décors, la partie anglaise n'en est pas moins intéressante et pousse la critique dans ses derniers retranchements, tout comme la jeune Lucy.
Et si le style ou certaines tournures de phrases peuvent apparaître démodées, je trouve au contraire que cela donne encore plus de cachet à ce roman dont une adaptation cinématographique a été faite par James Ivory et qu'il me tarde de la découvrir, tout comme j'ai regardé avec plaisir des photographies prises lors de mon séjour en Toscane pour me ré-imprégner de toute l'ambiance florentine.

"Avec vue sur l'Arno", c'est un morceau d'Italie à déguster avec parcimonie pour en conserver jusqu'à la dernière page toute la saveur, et c'est une romance passionnée et exaltante qui se vit et fait rêver durablement le lecteur qui doit surtout oublier d'emporter son guide Baedeker pour en apprécier les moindres miettes.

Livre lu dans le cadre du Challenge Il Viaggio

samedi 21 septembre 2013

L'atelier des miracles de Valérie Tong Cuong


Prof d’histoire-géo mariée à un politicien narcissique, Mariette est au bout du rouleau. Une provocation de trop et elle craque, envoyant valser un élève dans l’escalier. Mariette a franchi la ligne rouge. Millie, jeune secrétaire intérimaire, vit dans une solitude monacale. Mais un soir, son immeuble brûle. Elle tourne le dos aux flammes se jette dans le vide. Déserteur de l’armée, Monsieur Mike a fait de la rue son foyer. Installé tranquillement sous un porche, il ne s’attendait pas à ce que, ce matin, le « farfadet » et sa bande le passent à tabac. Au moment où Mariette, Millie et Mike heurtent le mur de leur existence, un homme providentiel surgit et leur tend la main – Jean, qui accueille dans son Atelier les âmes cassées, et dont on dit qu’il fait des miracles. Mais peut-on vraiment se reconstruire sans affronter ses fantômes ? Avancer en se mentant et en mentant aux autres ? Ensemble, les locataires de l’Atelier vont devoir accepter leur part d’ombre, tandis que le mystérieux Jean tire les ficelles d’un jeu de plus en plus dangereux. (JC Lattès)

Mariette, Millie et Mike font partie des blessés de la vie, m'une parce que son mari est un pervers narcissique qui ne cesse de l'humilier et de la rabaisser : "Il me considérait déjà comme un élément de son patrimoine, une propriété dont il pourrait redessiner les contours à l'envie.", l'autre parce qu'elle a enfoui en elle un événement de son passé, et enfin le dernier parce qu'il est passé de militaire à SDF sous un porche d'immeuble; jusqu'au jour où leur chemin croise celui de Jean et de son Atelier, qui se donne pour mission de le sréparer, de les ré-initialiser pour qu'ils commencent une nouvelle vie sur de nouvelles bases : "Remettre les pendules à l'heure, réparer la mécanique humaine : c'est un peu notre spécialité, non ?".

Autant Mariette, Millie et Mike sont attachants, chacun à leur façon, autant Jean est un personnage sur lequel j'ai gardé mes distances : bon samaritain ou âme perdue qui cherche désespérément à se racheter ?
Un tel personnage fait passer d'un extrême à l'autre du point de vue émotionnel, provoquant l'attirance : "Jean n'était pas un canon de beauté, aucune femme ne se serait retournée sur lui dans la rue, mais il suffisait qu'il vous parle pour créer un champ magnétique capable de perdurer indéfiniment.", jusqu'à un certain point, et ensuite la répulsion.
Valérie Tong Cuong a décidément l'art et la manière de manier le roman choral avec des âmes à la dérive, sans attache, qu'il faut ramener à et dans la vie, ré-apprivoiser et ré-apprendre à aimer, à faire confiance et à avoir confiance en soi.
C'est toujours juste et sur un équilibre émotionnel que l'auteur arrive à garder du début à la fin.
Cette histoire aurait très bien pu être petite, insignifiante, fade, mais le style de Valérie Tong Cuong réussit à lui donner de la profondeur et une forme de beauté qui résonne encore une fois le livre refermé.

"L'atelier des miracles" fait partie de ces livres empreints de délicatesse et d'espoir qui mettent du baume au cœur, et dont on ne peut que louer l'existence, en somme, une lecture pleine de douceur dans un monde plutôt abrupt et morose.

vendredi 20 septembre 2013

Funérailles célestes de Xinran


En 1956, Wen et Kejun sont de jeunes étudiants en médecine, remplis de l’espoir des premières années du communisme en Chine. Par idéal, Kejun s’enrôle dans l’armée comme médecin. Peu après, Wen apprend la mort de son mari au combat sur les plateaux tibétains. Refusant de croire à cette nouvelle, elle part à sa recherche et découvre un paysage auquel rien ne l’a préparée – le silence, l’altitude, le vide sont terrifiants. Perdue dans les montagnes du nord, recueillie par une famille tibétaine, elle apprend à respecter leurs coutumes et leur culture. Après trente années d’errance, son opiniâtreté lui permet de découvrir ce qui est arrivé à son mari… Quand Wen retourne finalement en Chine, elle retrouve un pays profondément changé par la Révolution culturelle et Deg Xiaoping. Mais elle aussi a changé : en Chine, elle avait toujours été poussée par le matérialisme ; au Tibet, elle a découvert la spiritualité. (Editions Philippe Picquier)

Je ne pensais pas qu'une telle histoire pouvait arriver, je ne pensais pas qu'il était possible de rencontrer de telles personnes, je ne pensais pas que le Tibet était un pays si différent de la vision que nous pouvons en avoir nous, occidentaux; en fait, de toute ma lecture j'ai arrêté de penser tellement j'étais dépassée par ce que je lisais, dans le bon sens du terme.
Ayant pris un peu par hasard ce livre, je ne me suis rendue compte qu'une fois la lecture commencée qu'il s'agissait d'une histoire vraie, que Xinran, l'auteur, avait bel et bien rencontré Wen, cette femme qui a cherché pendant trente ans au Tibet ce qu'il était advenu de son mari.
"Aucune personne ordinaire n'aurait passé la moitié de sa vie à rechercher son mari : seul un amour véritable peut produire une telle détermination.", sans doute qu'aucune personne ordinaire n'aurait passé autant de temps à chercher un mari déclaré mort par l'armée, mais Wen n'est pas une femme ordinaire, ou plutôt, elle n'est plus une femme ordinaire après trente années passées au Tibet, au sein d'une famille de nomades, à apprendre une langue, des coutumes, une culture.
Wen était si peu préparée à vivre un tel choc qu'elle n'a fait qu'appliquer un précepte de l'armée, celui de rester en vie et de le considérer comme une victoire : "Quoi qu'il arrive, souvenez-vous d'une chose : le seul fait de rester en vie est en soi une victoire.".
Mais si Wen était si peu préparée à cette aventure, la lectrice que je suis ne l'était pas plus, et cette lecture a été un véritable choc, la sensation de toucher un monde éloigné de mon quotidien, un monde qui pourrait ne pas appartenir à la même planète tant il semble à des années lumières des préoccupations matérialistes et souvent futiles des pays occidentaux, une ouverture pour essayer de comprendre et de saisir ce qu'est le Tibet, réellement, en dehors de Lhassa, une ville qui n'a plus grand chose de tibétain.
Ce récit du vécu de Wen amène également un autre éclairage sur le conflit entre les Chinois et les Tibétains, loin d'une vision où tout est blanc ou noir mais où des compromis sont possibles, où des ententes existent et où parfois la guerre n'est même pas arrivée jusqu'aux oreilles des Tibétains.
Wen est pourtant très lucide sur ce conflit : "Il y a tant de haine entre les Chinois et les Tibétains, personne ne pourra jamais arranger la situation maintenant.", ce qu'elle dit est encore vrai aujourd'hui, mais au cours de son périple de trente années au Tibet elle va aussi découvrir de très belles choses et va surtout devenir une autre personne, axée sur la spiritualité et non plus sur le matérialisme.
"La guerre ne vous laisse pas le loisir d'étudier et pas la moindre chance de vous adapter.", c'est pourtant ce qui va se produire pour Wen et qui la rendra plus forte.
Mais le retour en Chine sera dur, comme une personne se réveillant d'un long coma elle apprendra la révolution culturelle, Deng Xiaoping, autant de choses qu'elle ne comprendra pas et qui la feront se sentir étrangère dans ce qui était pourtant son pays; et de sa famille plus une trace, comme balayée par la force qui a fait évoluer si vite la Chine et qui n'a pitié de rien ni de personne pour lui donner son essor.

Je ne saurais dire dans ce roman si c'est Wen la Chinoise qui cherche son mari au Tibet, ou Wen la Tibétaine qui retourne en Chine, ou encore Xinran qui cherche Wen, cette femme croisée deux jours, le temps qu'elle lui livre son histoire, et qu'elle recherche depuis désespérément.
Pour ma part, c'était moi lectrice à suivre Wen dans son périple et à chercher mes repères dans un pays qui m'est totalement inconnu.
Mon regard a changé sur la Chine, je compte d'ailleurs lire d'autres œuvres de Xinran pour en apprendre plus, ainsi que sur le Tibet, et je ne suis pas prête d'oublier ce que sont des funérailles célestes et la beauté et la spiritualité qui se cachent derrière ce geste.
"Funérailles célestes" fait partie de ces lectures qui marquent et laissent une trace indélébile, un moment de grâce, d'amour, de loyauté, de fidélité mais aussi de perte qui résonne pendant longtemps et dont il m'arrive encore souvent de penser et de m'interroger sur les points de suspension contenus dans l'histoire et qui le resteront sans doute à jamais.
Dans ces cas-là, j'aime à penser que Wen est en vie, quelque part au Tibet.

Livre lu dans le cadre du challenge ABC Critiques 2012/2013 - Lettre X

mardi 17 septembre 2013

Top Ten Tuesday #14


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Les 10 livres de ma PAL pour cet automne


Déjà que je n’ai pas tout à fait respecté ma PAL pour cet été, alors c’est parti pour celle de cet automne (où je recycle les livres de la PAL non lus cet été).

1) "Noire lagune" de Charlotte Bousquet
2) "Le sillage de l’oubli" de Bruce Machart
3) "A l’ouest rien de nouveau" d’Erich Maria Remarque
4) "Des souris et des hommes" de John Steinbeck
5) "Avec vue sur l’Arno" d’E. M Forster
6) "Une fenêtre au hasard" Pia Petersen
7) "Chocolat amer" de Laura Esquivel
8) "Le cœur est un chasseur solitaire" de Carson McCullers
9) "La dernière conquête du major Pettigrew" de Helen Simonson
10) "La petite fille Bois-Caïman Livre 2" de François Bourgeon (à ajouter dans PAL)

jeudi 12 septembre 2013

Challenge Romancières américaines

Depuis la parution du numéro de juin du Magazine Littéraire, une petite idée me trottait dans la tête.
La petite idée a fait son chemin, j'ai hésité, j'ai demandé conseil à George que je remercie d'ailleurs pour sa réponse, et finalement j'ai décidé de me lancer dans l'organisation de mon premier challenge.

Mais sur quoi ce challenge va-t-il bien pouvoir porter ?
Et bien, il est souvent question des romancières anglaises, de leur plume, de leur style, mais elles ont aussi des homologues de l'autre côté de l'Atlantique, des homologues extrêmement talentueuses dont certaines sont connues internationalement et d'autres beaucoup moins.

Je vous propose donc un Challenge Romancières américaines.


Le but du challenge est de découvrir ou de re-découvrir les romancières américaines passées et présentes, la façon dont elles abordent l'Amérique dans leur oeuvre, les différences entre le Nord et le Sud, l'évolution des mentalités et les traditions.
Vous trouverez ici une liste non exhaustive de ces romancières si vous manquez d'inspiration.

Ce challenge commencera le 1er octobre 2013 pour une durée de 2 ans.
Il s'achèvera donc le 1er octobre 2015.

Outre les traductions françaises, j'accepte les livres lus en éditions originale ou bilingue.
J'attire votre attention sur le fait que certains livres ne sont malheureusement plus édités, mais comme il serait dommage de passer à côté de pépites littéraires, il reste toutefois les occasions ou les bibliothèques pour se les procurer.
Il s'agit d'un challenge littéraire mais j'accepte aussi des billets sur des adaptations cinématographiques des oeuvres.

Je vous propose 4 catégories :
1) 1 à 3 livres : A la découverte du Nouveau Monde
2) 4 à 6 livres : A la conquête de l'Ouest
3) 7 à 10 livres : Sur le sentier des pionniers
4) 10 livres et plus : US Route 66

En plus d'une liste de romancières, je vous propose aussi de consulter ici la liste des 30 classiques dressée par le Magazine Littéraire.
La lecture d'un ou plusieurs de ces classiques n'est bien entendu pas obligatoire dans le cadre du challenge, mais disons que cela pourrait le rendre encore plus intéressant.
Je n'accepte pas les lectures rétroactives, par contre j'accepte les lectures qui s'inscrivent dans d'autre(s) challenge(s).

Les inscriptions se font par un commentaire sur ce billet en me précisant la catégorie dans laquelle vous vous inscrivez et en faisant, si vous le souhaitez, un billet de présentation du challenge sur votre blog.

Pour les lectures faites dans le cadre du challenge, je vous remercie de bien vouloir préciser par un commentaire sur ce billet : le titre de l'oeuvre et l'auteur,  l'URL de votre article comportant l'un des logos du challenge avec un lien vers ce billet afin que tous les participants puissent lire les billets des autres.

Et pour finir, qui dit challenge dit logo.
Je vous propose plusieurs logos pour ce challenge, tous inspirés de l'oeuvre d'Edward Hopper.








Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter de belle(s) lecture(s) !

Ils ont choisi d'embarquer :

A la découverte du Nouveau Monde

Martine
Mazel ?
Coccinelle

Asphodèle
Les apparences de Gillian Flynn

Yuko
Son billet de présentation
Les apparences de Gillian Flynn
Libre et légère d'Edith Wharton
Certaines n'avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka
Amnesia de Jennifer Rush
Autant en emporte le vent de Margarett Mitchell
La virginienne de Barbara Chase-Riboud
Le maître des illusions de Donna Tartt
Délicieuses pourritures de Joyce Carol Oates

Philisine Cave
Sa présentation du challenge
Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates de Mary Ann Schaffer et Annie Barrows
Et nos yeux doivent accueillir l'aurore de Sigrid Nunez
Les liens du mariage de J. Courtney Sullivan
Esprit d'hiver de Laura Kasischke

Kantu

Valentyne
Sa présentation du challenge
La cloche de détresse de Sylvia Plath
Reflet dans un œil d'or de Carson McCullers
L'arbre aux haricots de Barbara Kingsolver
Les cochons au paradis de Barbara Kingsolver

MrsB
Son billet de présentation
Esprit d'hiver de Laura Kasischke
Traveling light de Katrina Kittle

Rosemonde Marchand

Ostinato
Quand l'empereur était un Dieu de Julie Otsuka

A la conquête de l'Ouest

Tiphanie
Son billet de présentation
Esprit d'hiver de Laura Kasischke
Un oiseau blanc dans le blizzard de Laura Kasischke
Vallée de la mort de Joyce Carol Oates
Le secret des abeilles de Sue Monk Kidd
Julie et Julia de Julie Powell
Une adolescence américaine de Joyce Maynard
Confessions of a Jane Austen addict de Laurie Viera Riegler

Denis
Son billet de présentation
La petite arabe d'Alicia Erian

Julie Desir
Coeur Bressane

Nanou
Le bleu de la nuit de Joan Didion
Un don de Toni Morrison
Mad about the boy de Helen Fielding
Une saison de nuits de Joan Didion

The Mad Stitch
Son billet de présentation
En un monde parfait de Laura Kasischke
Chez les heureux du monde d'Edith Wharton

Chroniques littéraires
Son billet de présentation

Bene31
Son billet de présentation
Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur d'Harper Lee
Qu'avons-nous fait de nos rêves ? de Jennifer Egan
Esprit d'hiver de Laura Kasischke
Les filles de l'ouragan de Joyce Maynard
Sans issue de Lisa Unger

Figaro
Son billet de présentation
Fille noire fille blanche de Joyce Carol Oates

Plaisir des mots
Son billet de présentation

Jostein
Son billet de présentation
La dernière fugitive de Tracy Chevalier
Le chardonneret de Donna Tartt
Esprit d'hiver de Laura Kasischke
J'ai voulu oublier ce jour de Laura Lippman
La cloche de détresse de Sylvia Plath
Big Brother de Lionel Shriver
Femme nue jouant Chopin de Louise Erdrich
Un monde flamboyant de Siri Hustvedt
Les douze tribus d'Hattie d'Ayana Mathis
Lila de Marylinne Robinson
Beloved de Toni Morrison
Fairyland d'Alysia Abbott
Tout ce que j'aimais de Siri Hustvedt
Les lance-flammes de Rachel Kushner
Low Down d'A J Albany
Son bilan

Nadael
Son billet de présentation
Les beaux mariages d'Edith Wharton
Et nos yeux doivent accueillir l'aurore de Sigrid Nunez
Schroder d'Amity Gaige
Une saison de nuits de Joan Didion
Les liens du mariage de J. Courtney Sullivan

Vermicélia
Son billet de présentation

Le coin lecture d'Héloïse
Son billet de présentation

Sur le chemin des pionniers

Les livres de Camille
Son billet de présentation
Les New Yorkaises d'Edith Wharton

Cendrah Pittet
Son billet de présentation
Les femelles de Joyce Carol Oates
The Duke and I de Julia Quinn

isallysun
Anita Blake Book 1 Guilty Pleasures de Laurell K. Hamilton
Seule dans la nuit d'Ann Rule

US Route 66

MissG
La malédiction des colombes de Louise Erdrich
Esprit d'hiver de Laura Kasischke
Un heureux événement suivi de La personne déplacée de Flannery O'Connor
Reflets dans un œil d'or de Carson McCullers
Une lettre de vous de Jessica Brockmole
Rien que du bonheur de Laurie Colwin
Les entremetteurs et autres nouvelles d'Edith Wharton
Le chant de Salomon de Toni Morrison
Les fleurs de lune de Jetta Carleton
Dimanche chez les Minton (et autres nouvelles) de Sylvia Plath
Un crocodile sur un banc de sable d'Elizabeth Peters
Le mystère du sarcophage d'Elizabeth Peters
Mudwoman de Joyce Carol Oates
Une femme vertueuse de Kaye Gibbons
Baby Love de Joyce Maynard
Oncle Daniel le Généreux d'Eudora Welty
Ellen Foster de Kaye Gibbons
Un été 63 de Tracy Guzeman
La colline des potences de Dorothy Marie Johnson
L'étreinte du mal de Chelsea Cain
Une affaire de charme d'Edith Wharton
La dernière réunion des filles de la station-service de Fannie Flagg
Long week-end de Joyce Maynard
Délivrances de Toni Morrison

George
Son billet de présentation
Certaines n'avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka
Kerfol et autres histoires de fantômes d'Edith Wharton
Mudwoman de Joyce Carol Oates
Des gens comme les autres d'Alison Lurie
Tout ce qui brille d'Anna Godbersen
Zarbie les yeux verts de Joyce Carol Oates
Les liens du mariage de J. Courtney Sullivan

Adalana
Dimanche chez les Minton de Sylvia Plath
La couleur pourpre d'Alice Walker
Les débutantes de J Courtney Sullivan
Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage de Maya Angelou
Les chutes de Joyce Carol Oates
A suspicious river de Laura Kasischke
La légende de Bloodsmoor de Joyce Carol Oates
Les filles de l'ouragan de Joyce Maynard
Les revenants de Laura Kasischke
Ce que j'ai oublié de te dire de Joyce Carol Oates
Bois sauvage de Jesmyn Ward
Bernadette a disparu de Maria Semple

Juliette Syannelle

Les apparences de Gillian Flynn

Emyca
Un don de Toni Morrison
Pretty Little Liars Tome 1 de Sara Shepard
Scarpetta de Patricia Cornwell
Le vilain petit canard de Martha Grimes
Le chat qui flairait une piste de Lilian Jackson Braun
Les joyaux de paradis de Donna Leon

mercredi 11 septembre 2013

L'énigme des Blancs-Manteaux de Jean-François Parot


« 1761. Nicolas Le Floch quitte sa Bretagne natale pour se mettre au service de M. de Sartine, chef des affaires secrètes de Louis XV. Nicolas prend vite du galon. Le voilà plongé dans une ténébreuse affaire. Meurtres, vols, corruption : secondé par l'inspecteur Bourdeau, il dénouera peu à peu les fils de cette enquête, qui touche de près le roi et la Pompadour... » 
« Un nouveau Maigret est né : Nicolas Le Floch. [...] Jean-François Parot, qui a conçu cette série de polars historiques, connaît admirablement le Paris du XVIIIe siècle ainsi que les procédures judiciaires de l'Ancien Régime. » (10/18)

En cette année 1761, le jeune Nicolas le Floch quitte sa Bretagne pour gagner Paris, avec en main une lettre de recommandation à l’attention de Monsieur de Sartine, le chef des affaires secrètes de Louis XV.
Très vite, ce dernier lui confie une mission de la plus haute importance et que laquelle Nicolas devra rester muet comme une tombe, sous peine de redescendre encore plus vite les échelons gravis si rapidement et d’être livré en pâture aux loups : "Vous êtes mon plénipotentiaire hors des règles et des lois, et n’oubliez pas que, si vous échouez et compromettez mon pouvoir, ma main se retirera de votre tête … Vous êtes votre maître.".

A n’en pas douter, Nicolas le Floch a du panache et la fougue de la jeunesse.
Il se lance à corps perdu dans cette enquête secondé par l’inspecteur Bourdeau, en partie pour oublier Isabelle, la fille de son parrain le marquis de Ranreuil et raison de son éloignement forcé par ce dernier, mais aussi pour se montrer digne de la mission qui lui a été confiée et s’assurer une place au service du roi : "Cette carrière de policier, il l’avait épousée sans le vouloir. Jeté dans Paris, pris en main par Sartine, tout s’était enchaîné. Maintenant l’action et ses rebonds, ses surprises, ses découvertes et parfois ses embûches l’animaient d’une énergie nouvelle, même si certaines questions demeuraient pour lui sans réponses et si des scrupules apparaissait dans le feu de la manœuvre.".
Car Nicolas le Floch se pique vite au jeu des intrigues et de démêler une pelote pourtant bien compliquée.
Jean-François Parot sait y faire, avec cette première enquête il a donné le jour à un inspecteur dont le succès ne s’est pas démenti depuis et a su faire revivre le Paris du XVIIIème siècle, mêlant intrigues de cour et quartiers mal famés, repas d’époque et traditions d’emprisonnement ou de délassement dans des maisons offrant luxe, volupté, jeux d’argent et débauche.
C’est par un travail minutieux que l’auteur a pu mettre autant de détails dans son roman, détails qui le rendent d’autant plus vivant.
Le lecteur avance au même rythme que Nicolas, découvrant avec lui Paris, ses quartiers, la Bastille, Versailles et la cour du Roi, mais aussi toute une galerie de personnages dont certains sont attachants et d’autres plus piquants.
Il est, sous certains aspects, aussi naïf que lui et découvre au fur et à mesure tout un univers passé qui revit sous ses yeux, les codes bien établis d’une société où la hiérarchie est d’importance, et toute la ruse féminine, notamment dans les maisons de joie : "Quand vous connaitre mieux les femmes, mon mignon, vous apprendrez qu’avec elles le probable n’est jamais tout à fait certain.".

Lire une enquête de Nicolas le Floch, c’est replonger dans les intrigues du XVIIIème siècle et vivre au rythme d’une époque passée à laquelle Jean-François Parot convie le lecteur, mais c’est aussi prendre le risque de tomber amoureuse du personnage de Nicolas le Floch et ce, de façon pérenne.

Amours en marge de Yoko Ogawa


Une jeune femme croit devenir sourde le matin où son mari la quitte. Depuis, elle perçoit le moindre son avec une intensité démesurée. Elle entend tout, y compris le bourdonnement de sa mémoire dans lequel elle finit par retrouver les traces de son premier amour… Une jeune femme se réveille un matin dans un étrange silence. En l’espace d’une nuit, elle a perdu l’usage de ses oreilles, s’est égarée dans l’immensité d’un bruit blanc, d’une sonorité jusqu’alors imperceptible : le bruissement de ses souvenirs. A la clinique, elle est soignée, surveillée, observée mais sa maladie évolue : elle perçoit maintenant le moindre chuchotement comme un hurlement, le moindre choc comme un cataclysme. Pour un magazine de santé, une jeune femme va devoir décrire ses symptômes en présence d’un sténographe, essayer de trouver les mots justes pour exprimer ce qu’elle ressent. Les doigts de cet homme glissent sur le papier, avec une incroyable virtuosité ils transcrivent son récit. Fascinée, elle cherche à le revoir, elle pressent le pouvoir de ce garçon, sa capacité à révéler les traces enfouies dans le passé, à libérer la voix de sa mémoire… (Actes Sud)

Une jeune femme se réveille un beau matin au son d’une flûte.
Mais il n’y a pas de flûte.
Il n’y a que le silence laissé par son mari qui vient de la quitter, son absence, le vide, et c’est alors que le bruit le plus infime devient assourdissant.
Etrange maladie dont souffre la narratrice, qui nécessitera plusieurs hospitalisations avant qu’elle l’apprivoise et apprenne à vivre avec : "Au contraire, je m’étais habituée aux replis de mes oreilles comme à un chandail bien chaud porté depuis longtemps.".
Au cours d’une interview pour un magazine de santé, elle rencontre un sténographe et tombe amoureuse de ses mains : "Mais lui, son unique particularité, c’étaient ses doigts. Rien d’autre ne m’attirait.".
Une étrange relation se noue alors : "Les doigts seuls existaient entre nous, et tout le reste, les mots, les lèvres et les sourires, était inutile.", focalisée sur les mains du sténographe et son silence résultant de son activité d’écriture, et les oreilles hyper-sensibles de la narratrice qui ne souffrent aucun bruit.

Comme d’habitude chez Yoko Ogawa, c’est étrange du début à la fin, cela flotte dans une atmosphère surnaturelle, dans une réalité qui s’évapore, où les personnages ne sont pas sûrs d’avoir vécu un évènement ou d’avoir été dans un lieu et sèment alors le doute dans l’esprit du lecteur.
C’est dans un style poétique et métaphorique que l’auteur raconte cette histoire.
A la beauté des mots se mêle celle du Japon, d’une atmosphère à la fois étrange et apaisante, une sorte de cocooning littéraire qui enveloppe le lecteur d’une certaine tiédeur.
Mais au-delà de cette atmosphère, Yoko Ogawa traite dans ce roman, son premier n’ayant publié jusque là que des nouvelles, d’un thème récurrent dans son œuvre : la mémoire et tout ce qui s’y rapporte : les sensations, les souvenirs notamment.
La chute est dans un sens inattendue car durant tout le récit le lecteur s’interroge et cherche où veut en venir l’auteur, mais dans un autre elle est aussi attendue car trop de détails interpellent ce même lecteur qui finit par avoir des doutes et se rend compte que quelque chose ne tourne pas rond dans cette belle histoire à la limite du conte de fées.
J’ai tout de même ressenti quelques passages de flottement au cours de ma lecture, l’auteur passant pour la première fois de la nouvelle au roman.
Cela se ressent dans ce récit, qui s’apparente presque à une longue nouvelle plutôt qu’à un roman.

"Amours en marge" est un roman de Yoko Ogawa dans la veine de son œuvre générale qui mérite que le lecteur s’attarde dessus pour en saisir toutes les subtilités et s’imprégner de l’univers si particulier mais si beau de cette auteur.

Livre lu dans le cadre du challenge Destination PAL

La nuit qui ne finit pas d'Agatha Christie


Quand Michael Rogers découvre le « Champ du gitan », c’est comme si son rêve se réalisait. Le paysage est sublime, la vue sur l’océan imprenable et il n’a plus qu’une idée en tête : l’acquérir, y construire une maison et s’y établir avec la femme de sa vie… qu’il doit encore rencontrer ! Pourtant, au village la rumeur est tenace : les gitans auraient maudit l’endroit, des choses étranges s’y seraient produites… Michael n’est pas superstitieux mais ne ferait-il pas mieux pour une fois d’écouter la sagesse populaire ? (Le Masque)

Michaël est pauvre, il vient d’avoir un coup de foudre pour une propriété maudite en Angleterre baptisée le "Champ du Gitan" et d’y rencontrer Ellie, une jeune américaine très riche.
Evidemment, comme dans tout conte de fées, ils se marièrent et vécurent très heureux … enfin, tout est relatif dans la durée.
Michaël ne supporte pas la famille d’Ellie composée d’une belle-mère et d’oncles qui son en réalité des notaires et encore moins la très belle Greta qu’il soupçonne de trop influencer Ellie.
Quant à sa splendide demeure, une vieille bohémienne le menace lui et sa femme du pire en ce qui concerne la maison et le terrain : "Parce que si vous approchez du "Champ du Gitan", vous y rencontrerez le chagrin et peut-être même la mort. Je vois qu’un malheur vous menace. Croyez-moi, oubliez vite cet endroit.", et Michaël a tendance à croire à toutes ces superstitions : "Je crois à bien des bizarreries. Je suis très averti sur le mal. N’avez-vous jamais remarqué que j’étais moi-même un peu possédé par le mal ? Cela me donne le pouvoir de le reconnaître lorsqu’il se trouve près de moi, même si je ne devine pas exactement où il loge … Je veux que cette maison que j’ai construite soit purgée du mal. C’est important pour moi !".
"On ne prend conscience des moments importants dans la vie que lorsqu’il est trop tard.", et bien évidemment, ce qui devait arriver arrivât.

Ici, point d’Hercule Poirot ou de Miss Marple, l’histoire est racontée par un narrateur, Michaël, et donc point de déductions ou de théories tirées par les cheveux.
Au lecteur de se faire sa propre opinion et s’il est malin, de découvrir la vérité.
Pour un lecteur attentif et ayant surtout lu une autre œuvre bien précise d’Agatha Christie, la puce pourra être mise rapidement à son oreille quant au dénouement de l’intrigue, ce qui fit mon cas.
Il reste que comme d’ordinaire, c’est admirablement ficelé et qu’il faut bien faire attention à chaque phrase prononcée par les personnages, même le plus insignifiant.
Ce roman policier plutôt méconnu d’Agatha Christie fait partie des œuvres qui sont à part, tout d’abord car il ne met pas en avant un(e) détective récurrent(e), et également par rapport à l’astuce finale.

"La nuit qui ne finit pas" mérite d’être lu avec attention et plus connu qu’il ne l’est, permettant de faire une pause avec les détectives récurrents d’Agatha Christie dont le style est toujours aussi percutant et follement anglais. 

Livre lu dans le cadre du Challenge Agatha Christie

mardi 10 septembre 2013

Raison et sentiments de Jane Austen


Raison et sentiments sont joués par deux soeurs, Elinor et Marianne. Elinor incarne la raison conforme aux usages du monde, tandis que l'intrépide Marianne parie sur le sentiment. Mais à l'une et l'autre de ces jeunes filles en fleurs manque l'atout indiscutable, la clé de toute réussite en ce monde : l'argent. Il leur faut donc chercher mari. (10/18)

Ce roman de Jane Austen s’intéresse à deux sœurs, Elinor l’ainée : "Elle avait un cœur excellent ; son tempérament était affectueux et ses sentiments profonds, mais elle savait les gouverner." ; et Marianne la cadette : "Elle était sensée et perspicace, mais passionnée en toutes choses, incapable de modérer ni ses chagrins ni ses joies. Elle était généreuse, aimable, intéressante, bref, tout, excepté prudente.".
L’une représente donc la raison et l’autre les sentiments.

Dans cette Angleterre du XVIIIè siècle, la première va s’éprendre d’un jeune homme timide lui ressemblant en caractère tout en sachant taire son ressenti face aux révélations auxquelles elle devra faire face ; tandis que la deuxième se laissera séduire par l’impétueux et lâche Willoughby qui la trahira sans vergogne : "La vanité, en lui faisant rechercher un triomphe coupable aux dépens d’une autre, l’avait mis sur la route d’un amour sincère que son emportement vers les plaisirs l’avait forcé à sacrifier.", délaissant le colonel Brandon, un homme d’âge mûr qui ressent également à son égard un profond sentiment.

Jane Austen brosse un portrait minutieux des mœurs de cette époque, des codes de la société : l’importance des bals où des alliances se nouaient, et de la vie sociale dans les villages ou les grandes villes.
A travers deux sœurs très proches qui diffèrent sur un point de caractère, Jane Austen livre une histoire à rebondissements mettant en valeur l’importance des espérances matrimoniales des jeunes filles à cette époque, où tout finit pour le mieux, ce qui est aussi rassurant et plaisant lors de la lecture des œuvres de cette auteur.
La plume de Jane Austen est parfois acide et m’a fait sourire plus d’une fois tant certains personnages offrent la possibilité de se moquer d’eux par des attitudes égoïstes, stupides, voire calculatrices.
La raisonnable Elinor est la voix de la raison dans ce roman, elle porte un regard juste et une analyse critique : "Elle méditait silencieusement sur le mal irréparable qui découlait d’une indépendance prématurée. La paresse, la dissipation, le luxe qui en avaient été la conséquence avaient anéanti l’esprit et le caractère, détruit le bonheur d’un homme doué de tous les avantages du corps et de l’esprit.", mais c’est sans conteste avec Marianne que je me suis le plus laissée emporter.
Elle apporte une force au récit et vivre une expérience des plus dures mais des plus enrichissantes : "Marianne Dashwood était née pour un destin extraordinaire ; il devait lui être donné de découvrir la fausseté de ses propres opinions et de contredire, par sa conduite, ses maximes les plus favorites.".
J’apporte un bémol car ma lecture a été gâchée par une vieille édition de poche qui comportait des fautes de frappe ou d’orthographe, des inversions dans les noms particulièrement sur celui du colonel Brandon.
Un peu léger pour une édition de poche et j’espère que tout cela a été corrigé depuis.

Le cœur a ses raisons que la raison ignore et ce roman de Jane Austen en est une belle illustration, outre le fait que le style soit des plus plaisants et la lecture des plus agréables.
Et là je dois avouer que c’était ma première lecture d’un roman de Jane Austen, ayant déjà lu une nouvelle de cette auteur, à se demander pourquoi j’ai attendu aussi longtemps pour découvrir son style à travers ses romans, mais une chose est sûre : je vais continuer à lire du Jane Austen car c’est un plaisir de chaque instant.

Airborne 44 Tome 4 Destins croisés de Philippe Jarbinet


Horreur ! Gavin vient de découvrir la tombe de sa bien-aimée Joanne dans le village même où ils se sont rencontrés. Le pauvre en a perdu toute ardeur combative, d’autant que le pire est peut-être à venir… Pensant avoir connu l’enfer sur les plages de Normandie, les GI américains progressent dans les terres françaises sous le feu d’Allemands que la rage du désespoir a rendu plus redoutables que jamais. La libération est proche, mais elle ne se fera pas sans heurts. (Casterman)

"Nos parents se sont faits dévorer leur jeunesse par la première guerre mondiale. Nous, on aura perdu la nôtre dans la seconde … L’humanité me désespère.", telle est la parole désabusée de Joanne au milieu des ruines après avoir retrouvé Gavin.
Elle a vu les horreurs des combats en soignant et opérant les soldats, lui est arrivé par la plage d’Omaha dans un bain de sang : "Indescriptible ! … Tous ces gars que j’ai connus et qui ont disparu pour toujours. Je n’ai pas envie d’en parler. Quoi que je dise, je serai en-dessous de la vérité.".
Devant tant d’horreurs et même des années après, une question légitime se pose : "Il a servi à quoi, ce massacre ? Moi, je n’ai jamais trouvé la réponse.".
Soldats américains, allemands ou français, tous se la posent dans un cimetière de croix blanches, ayant du mal à comprendre ce qu’ils ont vécu durant leur jeunesse.

L’avant-propos de l’auteur est intéressant, la réponse à la question est une paix que l’on espère durable en Europe, en tout cas c’est la période la plus longue sans conflit et qui a mené à la construction de l’Europe telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Voilà l’un des propos que cherchait à montrer l’auteur avec cette série.
Mais il s’agit aussi de destins croisés, de ceux de Joanne et Gavin, mais aussi de Luther et Gabrielle.
L’astuce est habile et le lien bien fait, même si le lecteur comprend assez vite de quoi il en retourne.
La fin est à l’image de la série, à tendance pessimiste malgré des instants de bonheur : "Je n’aime pas le monde qu’on fabrique pour nos enfants.", comme le dit Luther dans les années 60 alors que les Etats-Unis sont de nouveau en guerre.
Quant à la dernière image, elle est particulièrement forte et hautement évocatrice d’évènements tragiques qui surviendront dans plusieurs dizaines d’années.
Je reconnais qu’il y a quelques facilités dans la construction des personnages ou dans certaines situations, Gavin et Joanne se retrouvent trop facilement et comme par un coup de baguette magique par exemple.
L’ensemble reste plaisant et les dessins sont de très belle qualité tout comme la mise en couleurs, ce qui contribue à rendre la lecture agréable.

Récit de paix à l’image humaine, c’est-à-dire non durable et toujours plus sanglante, "Destins croisés" conclut très bien cette série intéressante et à plusieurs volets de lecture d’un auteur que je découvrais et qui m’a laissé une bonne impression.

Airborne 44 Tome 3 Omaha Beach de Philippe Jarbinet


En 1938, un jeune franco-américain de 17 ans, Gavin, est en vacances avec ses parents sur la côte normande. Il y tombe amoureux d’une séduisante jeune française, Joanne, et va vivre sur place, l’espace de quelques semaines, le plus bel été de son existence. Six ans plus tard, le 6 juin 1944, dans la ligne de mire des batteries allemandes, Gavin s’apprête à remettre les pieds sur le sol normand, au sein de la première vague d’assaut en passe de débarquer à Omaha Beach. Son esprit est plein du souvenir de Joanne, avec qui il a correspondu des années durant. Mais depuis avril 1944, Joanne n’a plu écrit. Pour elle, Gavin va s’efforcer de survivre… (Casterman)

Ce deuxième diptyque de la série "Airborne 44" commence le jour du débarquement en Normandie, dans ce qui fut qualifié du "jour le plus long".
Mais très vite un flashback s’opère et le lecteur plonge dans les souvenirs de Gavin, un jeune américain dont la mère est française, venu passer ses vacances en Normandie, région natale de sa mère.
Il y croise Joanne, une jeune française, dont il tombe amoureux.
A la fin des vacances chacun repart de son côté mais l’amour reste et pendant toutes ces années, Joanne et Gavin vont s’écrire.
Puis la guerre survient, Joanne témoin de rafles de Juifs s’interroge : "Je n’y suis peut-être pour rien mais je n’ai pas envie de vivre dans ce pays tel qu’il est devenu ! Je vais avoir vingt-cinq ans et j’ai l’impression d’être vide … inutile.", et finit par entrer dans la résistance, tandis que Gavin est appelé et finit par être entraîné pour le débarquement sur les côtes françaises.
En ce matin du 6 juin, ce sont tous ces souvenirs qui reviennent à Gavin, alors qu’il s’apprête à débarquer sur la plage de Vierville rebaptisée Omaha Beach : "La plage de Vierville ! Six ans que je l’ai quittée ! Je ne l’ai jamais vue depuis la mer … c’était un paradis ! Aujourd’hui, elle ressemble à l’enfer !".

L’auteur a réussi à montrer la confusion qui régnait dans ce débarquement, les conditions météorologiques étant peu favorables et la plage d’Omaha étant la plus difficile d’accès elle fut la plus sanglante.
Les images sont moins violentes que celles d’un film mais sont tout de même parfois assez dures.
Là encore, Philippe Jarbinet s’est documenté et n’a aps hésité à demander conseil, cela donne une base historique crédible à son récit.
Il se place aussi du côté des soldats allemands en poste sur les plages de Normandie, en montrant la jeunesse et l’inexpérience de la plupart : "Je ne suis jamais allé au combat. Ca me fait mal de le dire mais j’ai une trouille monstre.", qui se trouveront démunis face à ce débarquement de masse.
J’ai noté un changement dans les nuances de couleurs par rapport au premier diptyque.
Les tons sont plus colorés et plus doux, il y a aussi une réelle différence entre les personnages, ce qui leur permet de bien se démarquer dans l’esprit du lecteur.

"Omaha Beach" est un volume qui oscille entre la gaité de vivre, l’insouciance, et toute l’horreur de la guerre, avec des corps mis en charpie et des soldats qui appellent leur mère.
L’histoire d’amour a du mal à être la plus forte face à tant d’atrocités et de sang versé, il reste maintenant à découvrir la façon dont l’auteur va relier ces deux diptyques pour donner tout son sens à la série.

Airborne 44 Tome 2 Demain sera sans nous de Philippe Jarbinet


J'ai mal... 
J'ai froid... 
J'ai un goût de sang dans la bouche... 
J'entends des voix autour de moi... 
Loin... 
Si loin... 
Pourtant, je n'ai pas peur... (Casterman)

Suite de l’enfer de la bataille des Ardennes dans le froid et la neige.
Le lecteur retrouve les personnages du premier volume ainsi qu’Egon, un français engagé volontaire qui a fui l’armée allemande avec des pellicules prouvant les premiers massacres de Juifs perpétrés par les nazis : "Un enfer absolu créé par des hommes pour d’autres hommes.", ce qui soulève des questions du côté américain : "Comment les allemands faisaient-ils pour réunir les Juifs sans qu’ils se révoltent ?".
Mais c’est aussi un combat de coqs que se livrent Luther et Egon pour le cœur de la belle Gabrielle, bien que Luther semble avoir l’avantage : "C’est la guerre, Berlin est encore très loin … et puis surtout … je sais que ne peux pas t’avoir.".

Le ton du récit est plutôt pessimiste, les soldats américains sont désabusés face à tant de violence ainsi que d’avoir en face d’eux de jeunes garçons, il faudra plusieurs années pour panser les plaies et réussir à prendre du recul sur ce vécu et en tirer un double enseignement : "La première, c’est que là où tombent les hommes, l’herbe finit toujours par repousser. La seconde, c’est que demain sera sans nous, qu’on le veuille ou non.".
Comme précédemment, je suis frappée par la facilité avec laquelle tout ce petit monde communique entre eux, c’est un peu trop facile et fait pour cadrer avec l’histoire mais cela manque un peu de crédibilité, c’est bien le seul point que je reprocherais à cette bande dessinée.
Quoi qu’il y ait aussi quelques invraisemblances : "Il n’y a que dans les comics que les héros font bien leur boulot. Nous, on n’est que des ploucs qui font le leur en essayant de rester en vie … ça doit te sembler un peu court comme réponse mais je n’en ai pas de meilleure.", ainsi je vois mal comment des enfants européens pourraient savoir ce qu’est un comic.
Pour le reste, l’auteur s’est documenté, a demandé conseil et à fait relire son histoire par des spécialistes de cette période, cela donne un certain cachet à son récit et l’assoit sur des bases solides.
Il y a à la fois beaucoup d’espoir mais aussi du chagrin pour ceux qui ne reviendront jamais.
Les dessins sont de belle qualité, les paysages magnifiques et la dureté du climat est bien rendue.
Les images permettent de ressentir toute la force du récit et l’illustrent bien.

"Demain sera sans nous" marque la fin de ce premier diptyque s’attachant au cheminement de l’armée américaine dans les Ardennes avant l’arrivée en Allemagne qui marquera la chute du IIIème Reich.
Une belle histoire avec de l’émotion et qui se découvre avec plaisir.