jeudi 7 mars 2019

Dark Matter de Blake Crouch


Un soir, en rentrant chez lui, Jason Dessen, professeur de physique, est agressé et kidnappé par un inconnu masqué. Quand il reprend connaissance, tout a changé : Daniela n’est plus sa femme, leur fils Charlie n’est jamais né, et Jason lui-même est un physicien de premier plan à l’aube d’une découverte fondamentale. Que lui est-il arrivé? Qui lui a volé sa vie, et pourquoi? Les réponses à ces questions entraîneront Jason sur les multiples chemins d’un voyage extraordinaire, au cours duquel il devra se confronter à son plus dangereux ennemi : lui-même. (J'ai Lu)

Le voyage dans le temps et la réécriture de sa propre histoire n'ont pas fini de faire parler d'eux, ni de faire couler l'encre.
On pourrait s'attendre à une énième version de ce type d'histoire, l'auteur a su être assez malin pour ne pas tomber dans le piège de la facilité et proposer une variation assez intéressante sur ce thème.
Le début est un peu poussif dans le sens où j'avais vite pigé les ficelles de l'intrigue et où la première réponse est longue, très longue, tandis que d'autres sont courtes alors que je serai bien restée un peu plus dans cet univers.
L'idée de départ est bonne mais Blake Crouch ne brille pas un style flamboyant, il faut bien le reconnaître.
C'est plat, le personnage manque de relief, de charisme, mon niveau d'empathie avec lui est resté proche de zéro.
L'auteur ne va pas non plus au bout de ses idées, il n'expose pas de réelles théories, si vous vous attendez à des révélations et à des explications, passez votre chemin.
Et la fin est d'un prévisible ... personnellement je l'avais vu venir tel un éléphant dans un corridor de métro.
Bref, tout cela est fort regrettable car la variation de départ était bien, mais le résultat lui ne l'est pas.
Et pourtant, on arrive à s'accrocher à la lecture car quelques idées sont bonnes et on finit par se piquer au jeu à vouloir connaître le fin mot de l'histoire.
Heureusement, car sinon j'aurai arrêter la lecture en cours de route et qu'importe ce qui arrivait au personnage.
Il y a clairement matière à en faire une adaptation cinématographique, mais en revoyant le scénario car sinon c'est un nanar assuré.
Et encore, le thème a déjà été abordé au cinéma ("Looper" par exemple), finalement oubliez l'adaptation et je m'en irai sans doute découvrir les romans "Wayward Pines" de cet auteur dont j'en ai entendu parler en grand bien.

"Dark Matter" appartient à la science-fiction médiocre alors que ce roman aurait pu être tellement meilleur et mieux explorer certaines pistes ainsi que développer des idées bonnes au départ mais trop vite laissées de côté.

lundi 4 mars 2019

Les cigognes sont immortelles d'Alain Mabanckou


À Pointe-Noire, dans le quartier Voungou, la vie suit son cours. Autour de la parcelle familiale où il habite avec Maman Pauline et Papa Roger, le jeune collégien Michel a une réputation de rêveur. Mais les tracas du quotidien (argent égaré, retards et distractions, humeur variable des parents, mesquineries des voisins) vont bientôt être emportés par le vent de l’Histoire. En ce mois de mars 1977 qui devrait marquer l’arrivée de la petite saison des pluies, le camarade président Marien Ngouabi est brutalement assassiné à Brazzaville. Et cela ne sera pas sans conséquences pour le jeune Michel, qui fera alors, entre autres, l’apprentissage du mensonge. (Seuil)

Quel régal que ce livre qui arrive si joliment à mêler le grave avec de l'humour, la grande histoire à la petite.
Michel vit avec Maman Pauline et Papa Roger à Pointe-Noire, dans le quartier Voungou, il n'a aps sa langue dans sa proche et en tant que narrateur de l'histoire est bien souvent obligé de rappeler au lecteur ainsi qu'à lui-même qu'il doit se taire et s'arrêter là car : "sinon on va encore dire que moi Michel j'exagère toujours et que parfois je suis impoli sans le savoir.".
Mais tout bascule un jour de mars 1977 où le camarade président Marien Ngouabi est assassiné, la famille et la vie de Michel s'en retrouvent bouleversées mais c'est aussi tout un pays qui bascule dans l'inconnu et change brusquement de visage.
Outre le truculent et savoureux personnage de Michel, c'est sans doute la façon de mêler la petite histoire à la grande qui m'a autant séduite dans ce roman.
Le microcosme de la famille de Michel finit par être le reflet de ce qui se passe dans le pays, la fracture s'amorce doucement mais sûrement et tout le monde finit par plonger dans l'inconnu.
Le thème sous-jacent est grave, mais Alain Mabanckou réussi avec talent à insuffler de l'humour et quelques situations bien cocasses à son histoire, ainsi que de nombreuses anecdotes qui font de ce récit un savoureux moment de lecture.
L'auteur connaît son sujet et sait de quoi il parle, moi en tant que lecteur moins, pour ne pas dire pas du tout, mais Michel guide le lecteur dans les subtilités de son pays et lui fait une assez belle synthèse de son histoire, juste ce qu'il faut pour ne pas le perdre et lui donner la curiosité nécessaire d'aller en apprendre plus.
Avec cette lecture j'ai voyagé dans tous les sens du terme et cela faisait bien longtemps que ça ne m'était pas arrivée en littérature.
Et qu'est-ce que je m'en veux de ne pas avoir découvert plus tôt la plume d'Alain Mabanckou, mais promis, je vais tâcher de palier sans tarder à cette lacune, pour ne pas dire grave erreur (sans exagération aucune, je ne m'appelle pas Michel après tout et je ne tiens pas à être impolie sans le savoir).

Véritable bonbon sucré-amer, "Les cigognes sont immortelles" est un livre truculent que j'ai pris beaucoup de plaisir à lire et dont je vous recommande la lecture.

vendredi 1 mars 2019

Nous les filles de nulle part d'Amy Reed


Grace vient d’entrer au lycée de Prescott après avoir déménagé. Dans la chambre de sa nouvelle maison, elle découvre des mots griffés sur le mur : Aidez-moi. Tuez-moi, je suis déjà morte. Ces mots, c’est Lucy, qui les a tracés. Lucy, qui a accusé trois garçons de Prescott de l’avoir violée. Lucy, qui a été traitée de menteuse par le reste du lycée. Lucy, que la police n’a pas écoutée. Lucy, qui a fui la ville avec ses parents. 
Très vite, Grace comprend que cette violence s’exerce à tous les niveaux dans la ville de Prescott : quand les joueurs de l’équipe de foot notent le physique des filles qui passent devant eux ; quand son amie Rosina doit éviter les avances des clients du restaurant où elle travaille ; et surtout sur le blog du moment, « Les vrais mecs de Prescott » dont la ligne éditoriale consiste principalement à considérer les femmes comme des objets. Grace, Erin et Rosina sont décidées à agir, mais elles ne peuvent le faire seules. (Albin Michel)

Je continue les lectures féministes commencées il y a plusieurs mois désormais pour m'intéresser à ce roman destiné à la base à un public adolescent.
Et bien coup de cœur et belle découverte !
Ces filles de nulle part m'ont touchée droit au cœur, leur combat est aussi le mien et quel plaisir de voir la jeunesse se retrousser les manches pour combattre les préjugés et les discriminations.
Grace est nouvelle mais elle a emménagé sans le savoir dans l'ancienne maison de Lucy qui a accusé l'année précédente trois garçons de Presscott de l'avoir violée.
Lucy est partie, mais elle a laissé un mot dans sa chambre qui marque Grace, et la pousse à réagir et à briser la loi du silence pour dénoncer les agissements de certains garçons, encouragés et conseillés par les articles d'un blog joliment nommé "Les vrais mecs de Prescott".
Avec ses nouvelles amies Rosina et Erin, toutes deux à la marge des autres élèves, elles vont créer un club dont le but est de libérer la parole des filles mais aussi de dénoncer et faire punir les agissements plus que répréhensibles de certains garçons.
C'est crédible du début à la fin, entre les scènes de harcèlement scolaire, les moqueries, les insultes, certains professeurs complices ou silencieux, les rumeurs qui circulent sur les uns et les autres, tout cela rappelle les années lycées et pas toujours de bons souvenirs (voire souvent).
L'histoire se passe aux Etats-Unis mais elle a le mérite d'être universelle et pourrait tout aussi bien se passer en France ou dans un autre pays.
J'ai beaucoup aimé les personnages, Grace évidemment mais aussi son amie Rosina qui bien que jeune travaille dur pour aider sa mère et qui non seulement appartient à une minorité mais est aussi homosexuelle, pas évident tous les jours surtout à l'âge de l'adolescence; ou encore la silencieuse et si étrange Erin, véritable petit génie qui a bien du mal à s'adapter au monde dit réel et à nouer des liens avec d'autres personnes.
Le roman alterne entre les différents personnages et de temps à autre livre un article du fameux blog donnant toutes les astuces aux garçons pour être de vrais mecs (et au passage comment violer les filles en les faisant picoler lors des fêtes, un classement de ses meilleurs coups, bref que du très sympathique à lire).
La solidarité qui règne entre les filles est belle à voir, même si elle n'est pas évidente au départ, et prouve que l'union fait la force, et que même les diversités peuvent se rejoindre pour une lutte juste.
Voilà un beau livre féministe qui s'adresse à un public adolescent, une très bonne façon d'éveiller les consciences et d'amener à s'interroger sur son engagement et la société dans laquelle on souhaite vivre.

Très belle découverte avec "Nous les filles de nulle part", un roman dont je recommande chaudement la lecture à n’importe quel âge et qui rappelle l'importance du féminisme et de l'engagement des femmes pour dire non et se faire entendre.