dimanche 29 septembre 2019

Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma

       
     

1770. Marianne est peintre et doit réaliser le portrait de mariage d’Héloïse, une jeune femme qui vient de quitter le couvent. Héloïse résiste à son destin d’épouse en refusant de poser. Marianne va devoir la peindre en secret. Introduite auprès d’elle en tant que dame de compagnie, elle la regarde. (AlloCiné)


Il est des films que l'on a envie de voir dès que l'on en entend parler, "Portrait de la jeune file en feu" est l'un de ceux-là.
Première incursion de la réalisatrice Céline Sciamma dans le film en costume, et quasi huis-clos pour cette histoire féminine et féministe.
Peu d'hommes, ils ne sont qu'une apparition, des laquais bons à porter quelques bagages, l'histoire est bien centrée autour des femmes : de Marianne (Noémie Merlant), cette peintre à qui l'on demande de réaliser le portrait d'Héloïse (Adèle Haenel), jeune femme sortie du couvent pour remplacer sa sœur qui vient de mourir dans le mariage auquel sa mère (Valeria Golino) la destine avec un riche Milanais, l'occasion pour elle de retourner dans son pays d'origine, et de Sophie (Luàna Bajrami), la servante qui va se lier d'amitié avec Marianne et Héloïse.
Il est ici question de la place de la femme dans la société, de se frayer son chemin, de vivre et de montrer sa personnalité dans un monde d'hommes, quasi exclusivement réservés à eux : Marianne n'a pas le droit de peindre des modèles d'hommes nus mais il faut qu'elle le fasse si elle veut accéder à la reconnaissance; quant à Héloïse elle a déjà usé un peintre en refusant de poser, refus que son visage soit gravé sur une toile pour être apporté à un homme à qui on la mariera derrière, sans qu'elle ait son mot à dire, d'autant qu'elle remplace sa sœur morte dans des circonstances étranges.
Cette histoire se passe en 1770, force est de constater que les thèmes abordés sont toujours malheureusement d'actualité pour les femmes.


Film en costumes, certes, mais follement moderne et d'actualité dans son propos.
Je reste toutefois dubitative face à ce Prix du scénario à Cannes, ce n'est pas forcément celui-là que j'aurais attribué mais plutôt celui de la mise en scène.
Car la mise en scène est époustouflante, il y a des plans de toute beauté, à commencer par l'un des tous premiers avec une Marianne nue devant la cheminée, fumant la pipe et cernée de deux toiles blanches.
J'ai aimé la nature hostile de la Bretagne, la mer qui se déchaîne ainsi que le vent, à l'image des sentiments qui bouillonnent dans les héroïnes, et puis l'un des autres plans magnifiques est sans nul doute cette sorte de sabbat au coin du feu avec une chanson envoûtante et le jeu de regard entre Marianne et Héloïse qui l'est tout autant.
A noter que les plans finaux sont eux aussi de toute beauté.
C'est sans doute ce que j'ai préféré dans ce film, ainsi que le traitement de l'histoire d'amour entre deux femmes, fort joliment filmé et décrit, tout en délicatesse, en fragilité et à fin programmée, à l'image de certaines histoires d'amour.
Céline Sciamma évite avec justesse et agilité les écueils auxquels sont histoire auprès pu se confronter.
Elle choisit également d'épurer la bande son du film, un choix fort judicieux car seulement deux thèmes musicaux très forts y apparaissent et comme la mise en scène sont à l'image des sentiments qui habitent ses héroïnes.
J'ai beau chercher mais je ne trouve rien à redire à ce film, tout y est maîtrisé du début à la fin et il offre à Noémie Merlant un très beau rôle, tout comme Adèle Haenel que je vois pour la première fois dans un rôle d'époque et qui démontre une fois de plus toute l'étendue de son talent.


"Portrait de la jeune fille en feu" est un film qui ne laisse pas de glace mais s'apparente au contraire à un diamant qui brille de mille éclats, l'un des plus beaux films de cette rentrée et sans doute de l'année 2019.

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