mardi 4 octobre 2011

L'apollonide - souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello


À l'aube du XXème siècle, dans une maison close à Paris, une prostituée a le visage marqué d'une cicatrice qui lui dessine un sourire tragique. Autour de la femme qui rit, la vie des autres filles s’organise, leurs rivalités, leurs craintes, leurs joies, leurs douleurs... Du monde extérieur, on ne sait rien. La maison est close. (Allociné)

Que dire de ce film ... déjà qu'il est lassif et léthargique, à l'image du jeu des actrices (nécessaire étant donné le thème abordé) et comme illustré par la photo ci-dessous.


Je n'ai pas toujours accroché à ce film car je trouve déjà qu'il manque cruellement d'histoire. Je veux dire par là d'une histoire autre que celle de la maison close.
C'est dommage, car il y avait matière à créer une intrigue, j'aurai bien aimé savoir ce qu'il advenait du client qui a défiguré une prostituée (la "femme qui rit"), car pour ce qui est de l'histoire des maisons closes il n'y a rien à dire, c'est vraiment bien fait et ça représente très bien ce que ça devait être, ainsi que leur mode de fonctionnement.
J'ai beaucoup apprécié le huis clos, du monde extérieur on ne sait jamais rien, à part une scène en pleine nature la maison est close et elle le reste, comme un monde hermétique aux turpitudes du monde extérieur, de la vie réelle.

Le jeu des actrices est bon, elles ont une attitude qui démontrent leur lassitude, elles se laissent faire et manipuler par les clients, car ce sont eux qui payent et il y a une opposition homme dominant / femme soumise très intéressante.
L'une des phrases dans la scène d'ouverture et que l'on ré-entend par la suite résumé bien la situation : "Je suis tellement fatiguée que je pourrai dormir mille ans".
La scène d'ouverture est assez longue, particulière, et elle peut mettre mal à l'aise car pendant longtemps le spectateur cherche ce que le réalisateur a voulu montrer. La fin est assez dure sur la prostituée qui vient de se faire défigurer avec un sourire tragique.
Ce personnage est exploité de façon intéressante mais pas assez approfondie, la symbolique est forte, notamment lors d'une scène où elle est fortement maquillée au rouge, elle représente le clown triste, un paradoxe mais rien n'est jamais développé.
Il y a également l'innocence avec Pauline, qui vient travailler pour être libre et indépendante, sans savoir qu'au contraire elle sera prisonnière et dépendante; et puis la maladie et la mort.

De façon générale les scènes sont assez longues et lentes, ce qui fait que le film peut lasser par un certain côté mais hypnotise également du fait de cette lenteur.
Là encore c'est dommage car rien n'est vraiment exploité à fond alors qu'il y avait matière.
La mise en scène est classique, il aurait fallu quelque chose de moins traditionnel, d'autant que le choix de la musique lui ne l'est pas et que ça se marie très bien avec les images et le film.
Certaines scènes sont tout de même fortes et symboliques, mais également inspirées de tableaux de peintres célèbres comme Manet.
Parmi celles qui m'ont marquée je retiens celle d'ouverture avec une prostituée qui raconte son rêve à un client (ça ressemble fortement à de la psychanalyse), la présence d'une panthère noir lascive sur un canapé régulièrement lors des soirées, l'une des filles allongée et droguée à l'opium, celle où Samira lit un livre prêté par un client dans lequel l'auteur traite des prostituées et qu'elle se met à pleurer, une soirée particulière avec des "monstres", et surtout la scène d'une prostituée avec un client qui lui demande de se comporter comme une poupée, avec des gestes saccadés et de se laisser faire sans rien dire (là c'est fort, la domination de l'homme sur la femme est représentée mais aussi le fait que nous sommes tous des pantins, que nous agissons comme tel et que nous cherchons constamment le pouvoir et la manipulation de l'autre).
L'une des dernières scènes est également forte, celle de la dernière soirée de la maison close où tout le monde porte un masque. J'ai beaucoup apprécié ce passage, j'aurai presque aimé d'ailleurs que systématiquement les clients portent des masques, cela les aurait déshumanisé en partie et l'histoire aurait vraiment été concentrée sur les filles, leur histoire, la solidarité entre elles et leurs pensées.
La dernière scène est par contre absolument superflue et inutile, car là aussi le propos n'est pas développé mais simplement effleuré.

Je suis partagée sur ce film, il est très lent et sans véritable histoire alors que le propos était intéressant et que l'univers de la maison close est bien retranscris, la mise en scène est trop classique et les réflexions sur certaines scènes ne sont pas poussées assez loin ou alors mal construites dans la façon de filmer alors que la puissance émotionnelle et psychologique est là, et la scène finale est en trop car pas exploitée du tout.
Je n'ai rien à redire sur le jeu des actrices ni sur la musique assez audacieuse, j'ai été à la fois ennuyée et hypnotisée par ce film.

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