samedi 28 décembre 2019

Sunset de László Nemes

       
     

1913, au cœur de l’empire austro-hongrois. Irisz Leiter revient à Budapest après avoir passé son enfance dans un orphelinat. Son rêve de travailler dans le célèbre magasin de chapeaux, autrefois tenu par ses parents, est brutalement brisé par Oszkar Brill le nouveau propriétaire. Lorsqu’Írisz apprend qu'elle a un frère dont elle ne sait rien, elle cherche à clarifier les mystères de son passé. A la veille de la guerre, cette quête sur ses origines familiales va entraîner Irisz dans les méandres d’un monde au bord du chaos. (AlloCiné)


Après la claque qu’était "Le fils de Saul", László Nemes était attendu au tournant, et comment rebondir après un tel film ? Quel sujet traiter ? C’est un saut dans le temps que propose le réalisateur, en situant son intrigue dans l’empire austro-hongrois de 1913. Son personnage principal est cette fois-ci féminin, ingénue, de retour à Budapest avec le rêve de travailler dans le célèbre magasin de chapeaux qui a autrefois appartenu à ses parents. Mais le nouveau propriétaire du magasin va briser son rêve, et la jeune Irisz va en plus apprendre qu’elle a un frère, plutôt louche, va décider de le découvrir et se met en quête de son passé et de ses origines.


Dans son précédent film, le réalisateur plongeait directement le spectateur dans le chaos et l’horreur, ici il choisit de le placer à la veille de l’embrasement de l’Europe et du basculement dans l’horreur du premier conflit mondial. C’est une démarche fort intéressante et à mes yeux ce film est complémentaire du précédent. Le réalisateur continue de creuser la problématique du Mal, celui qui est absolu et qui pousse les individus à commettre des atrocités. L’Europe est sur le point de s’embraser, le crépuscule qui donne son nom au film, mais l’héroïne va aussi cheminer vers la noirceur, les bas-fonds à la recherche de son fantôme de frère et finir par y perdre toute ou partie de son âme. C’est la fin de son innocence, la découverte d’un passé trouble mais aussi de ressources internes insoupçonnées. En cela, la dernière image du film est particulièrement forte et bouscule le spectateur, en tout cas ce fut mon cas et elle m’a laissée sans voix.


László Nemes a choisi de tourner son film dans son pays natal et d’y trouver ses comédiens. La jeune Juli Jakab, actrice inconnue en France, est un choix judicieux et interprète remarquablement le personnage d’Irisz. On a un peu trop tendance à oublier le cinéma Hongrois, fort heureusement doté de quelques excellents réalisateurs, et Budapest ne sert pas que de lieux de tournage bon marché mais peut aussi être au cœur d’un film, presque un personnage à part entière ici. László Nemes a une façon bien à lui de filmer, il utilise le flou en ne laissant de clair que son personnage et en floutant tout le reste (la scène de la descente du train d’Irisz est le pendant de la scène d’ouverture dans "Le fils de Saul"), sa mise en scène est particulièrement léchée, pour ne pas dire grandiose. Certains diront qu’il en use et en abuse et qu’il prend sans doute même plaisir à s’auto-congratuler bien conscient de son savoir-faire et de sa maîtrise. Quand on maîtrise bien sa technique et que l’on aime filmer ainsi je ne vois pas bien pourquoi on s’en priverait. Certains réalisateurs auraient même de sacrées leçons de mise en scène à prendre tant la leur est inexistante. Ce second film a en tout cas conforté mon opinion sur ce réalisateur.


"Sunset" est sans doute l’un des films de 2019 les plus oubliés, où les spectateurs sont passés à côté. Je l’ai trouvé pour ma part assez puissant et évocateur ; en droite ligne avec "Le fils de Saul", les deux portant sur une même réflexion mais à des époques légèrement différentes.

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