lundi 3 février 2014
Ava préfère se battre de Maïté Bernard
Ava est de retour sur Jersey où elle doit assister à sa première assemblée de fantômes. Mais ce moment tant attendu tourne à la catastrophe car tous les fantômes ne veulent pas accepter comme consolateur une jeune Française de moins de quinze ans. Menaces, agressions, intimidations en tous genres... Difficile pour Ava de rester stoïque, surtout lors de ses rendez-vous avec Marco, un garçon terriblement attirant et bien vivant, qui ignore tout de son don ! Heureusement son ami Harald, un Viking vieux de huit cents ans, expert dans l'art de la guerre, est là pour la conseiller. Et Ava va bientôt montrer à tous de quoi elle est capable. (Syros Jeunesse)
"Être consolé signifie faire la paix avec le fait qu'il faut partir, et ce n'est pas toujours une joie.", mais être un consolateur est loin aussi d'être évident, tout comme se faire accepter par la communauté de fantômes, et c'est ce qu'Ava va découvrir à l'occasion de sa venue sur l'île de Jersey pour l'été.
Ava est une jeune fille pleine de bonne volonté et presque ordinaire, à ceci près qu'elle voit les fantômes depuis l'âge de trois ans et qu'elle vient d'apprendre qu'elle était en réalité un consolateur, c'est-à-dire une personne humaine chargée de consoler un fantôme pour le libérer de son état et lui permettre d'accéder sereinement et de façon définitive à la mort.
Mais certains fantômes de Jersey et des îles anglo-normandes ne voient pas d'un très bon œil la venue de cette humaine, française qui plus est.
D'ailleurs, quatre fantômes de marins ont décidé de lui mener la vie dure, pour ne pas dire y mettre fin tout bonnement : "Si tu restes sur Jersey, on va faire de ta vie un enfer. Lentement. Jusqu'à ce que tu craques. Jusqu'à ce que tu ne puisses plus nous ignorer.".
Etant sur une île Anglo-normande, l'été s'annonce peut-être chaud mais avec au moins une averse chaque matin mais également dangereux pour Ava et son amie Cecilia, en charge de la former pour prendre sa succession.
Ava est une adolescente de quinze ans, elle n'est pas nunuche ou en pleine crise et c'est ce qui la rend si agréable pour le lecteur.
Elle a des soucis un peu plus d'adultes mais également ceux d'une jeune fille de son âge, à commencer par ses premiers émois amoureux avec Marco, un jeune habitant de l'île dont le père tient une pizzeria.
Elle doit réussir à mener une vie aux apparences normales et s'imposer en tant que consolateur et pour cela, elle ne manque pas d'idées puisqu'elle décide de se lancer dans un recensement de tous les fantômes des îles Anglo-normandes et de créer des groupes de soutien et d'écoute afin que les fantômes se libèrent entre eux : "Je ne vais jamais y arriver toute seule. Je ne pourrai jamais tous vous voir et tous vous écouter, et même si j'y arrivais, je ne saurais pas quoi dire pour aider ceux qui le veulent à trouver le véritable repos.".
Ava a le mérite d'être consciente de l'étendue de sa tâche et qu'elle ne sera pas capable de la gérer toute seule.
Maïté Bernard a su faire évoluer Ava dans ce deuxième volume en la mettant face à ses responsabilités et à ses décisions, en la laissant s'empêtrer parfois dans ses idées mais c'est ainsi qu'elle évoluera et qu'elle apprendra, et surtout cela permet de placer son héroïne proche du lecteur.
Contrairement au précédent volume, l'histoire se met en place rapidement car les personnages et les lieux sont déjà connus.
La plume de Maïté Bernard est toujours aussi agréable dans le sens où même si elle s'adresse à un public jeune elle n'est pas niaise pour autant et finalement peut se lire à tout âge, l'écriture est soignée et de qualité.
Par contre, il n'y a pas vraiment d'intrigue policière et c'est un peu le reproche que je ferai à ce tome : une intrigue trop esquissée qui manque de corps et se finit en queue de poisson.
Il est clairement centré sur le personnage d'Ava, son évolution et ses rapports avec les fantômes et si cela est très intéressant une intrigue secondaire aurait à mon avis donné plus de corps au récit.
J'ai toutefois été très contente de retrouver cette héroïne accompagnée de Harald, un viking fantôme qui ne parle qu'à la jeune fille car celle-ci répond à ses questions sur l'évolution du monde et la place des vikings dans l'univers.
Ce personnage masculin, bien que sous la forme d'un fantôme, aide aussi beaucoup Ava à évoluer.
Il ne lui apporte pas les mêmes conseils que Cecilia, mais avec ces deux personnes Ava se pose des questions et finit par progresser par elle-même.
Au même titre que Harald n'est pas comparable à Marco, l'autre personnage masculin du récit, mais il se pose tout de même comme une forme de pendant masculin d'une autre époque avec une autre façon de penser.
La relation entre Ava et Harald est en tout cas riche et évoluera, je l'espère dans un troisième volume, car elle pimente de façon plaisante le récit.
Il y a toujours des touches d'humour très britannique, les réunions avec les fantômes sont sans doute les moments les plus savoureux du récit, mais il y a également une forme de gravité qui n'est pas inintéressante.
Les fantômes ne sont pas que des êtres morts à la recherche de la paix, ils éprouvent encore des sentiments humains et pour certains sont désespérés par leur état : "La mort avait cela de cruel sur la vie qu'on pouvait décliner, descendre, mais on ne s'écroulait jamais, on ne disparaissait pas, aucun néant ne s'ouvrait dans lequel s'abîmer enfin avec ses peines.".
Voilà une prise de position qui n'est pas neutre de sens et qui permet au récit de se positionner autrement que comme une énième histoire de fantômes pour jeunes lecteurs/trices.
C'est avec regret que j'ai dû m'arrêter dans ma découverte d'Ava, ma bibliothèque ne disposant pour l'instant que des deux premiers tomes, mais c'est avec plaisir que je la continuerai.
"Ava préfère se battre" est un très bon deuxième volume qui comporte les mêmes ingrédients que le premier tout en y apportant une petite touche qui rend le récit plus savoureux et addictif.
Une histoire, une héroïne et une auteur à découvrir !
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