samedi 6 octobre 2012

Jane Eyre de Susanna White



Devenue orpheline très jeune, sans la moindre fortune, la petite Jane Eyre est élevée par une parente aisée, la tante Reed, dans le nord-est de l’Angleterre. Souffre-douleur de ses cousins, maltraitée par leur mère, l’enfant solitaire et rebelle est envoyée à Lockwood, un pensionnat pour jeunes filles pauvres. Durant ces sévères années d’apprentissage, qui font d’elle une jeune fille accomplie, elle affronte la mort de son unique amie et noie sa tristesse dans le dessin. À 19 ans, elle part travailler dans une vaste demeure isolée, Thornfield Hall, comme gouvernante auprès de la pupille d’un riche original, Edward Rochester, lui-même se trouvant à l’étranger. Tous deux se retrouvent face à face pour la première fois sur la lande, un soir d’orage... (Allociné)

Dire que j'aime "Jane Eyre" est un doux euphémisme.
Non seulement je l'ai lu plusieurs fois, en français et en anglais, le livre est toujours à portée de ma main, mais j'aime aussi découvrir les adaptations qui en sont faites.
C'est ainsi que mes pas m'ont tout naturellement conduite à cette version de 2006 produite par la BBC.
Pour l'anecdote, je désespérais de voir cette adaptation à la télévision française, j'ai donc acheté pour une bouchée de pain la version import en DVD.
C'était l'année dernière ... depuis une traduction française a (enfin !) été faite et cette adaptation en quatre épisodes a été diffusée en septembre sur Arte.

Adapter "Jane Eyre" a toujours été un travail délicat, il faut réussir à conserver l'histoire et les personnages, dont en donnant vie à ces derniers de telle façon à contenter le spectateur et surtout, l'inconditionnel(le) du livre de Charlotte Brönté.
Je trouve que la version cinéma est réductrice, trop d'ailleurs, car pour tenir dans un film d'environ deux heures il faut pratiquer des coupes très fermes dans le roman (ce qui équivaut pour ma part à un sacrilège).
Et jusqu'à présent, je n'ai jamais été réellement emballée par les acteurs choisis dans les versions cinématographiques.
C'est pourquoi je préfère déjà la version pour la télévision, en plusieurs épisodes.
Notez que je pense la même chose pour "Les Hauts de Hurlevent" d'Emily Brönté.


Pour en revenir à cette version de 2006, elle comporte quatre épisodes et s'attache particulièrement au coeur du livre, à savoir la relation entre Jane Eyre et Edward Rochester.
Autant dire qu'avec les premières images, je me suis demandée si je ne m'étais pas trompée de programme ... un désert avec une petite fille en rouge, ce n'est absolument pas Jane Eyre ! 
Si cette mésaventure devait vous arriver, ne coupez pas, je vous confirme que c'est bien Jane Eyre et que la suite (i.e. après le désert) est bien le début, à savoir que là, vous avez vu le rêve de Jane.
Parmi les quelques petits reproches que je ferai à cette série, les débuts des premier et troisième épisodes sont particuliers et quelque peu maladroits, d'autant qu'ils ne reflètent pas la suite de la série, qui est de qualité.
Le parti retenu pour cette adaptation était de s'intéresser à la relation entre Jane Eyre et Edward Rochester, c'est pourquoi la jeunesse de Jane Eyre est passée rapidement, qu'il s'agisse de sa vie chez sa tante ou de ses années à Lowood, le principal étant tout de même conservé : son amitié avec Helen Burns.
Il en sera de même pour sa fuite, les passages de sa vie chez St-John Rivers et ses deux soeurs sont moins développés par rapport au reste, c'est un peu gênant pas tant que ça au final.
D'ailleurs, le traitement de cette partie se fait en partie en flash-back, lorsque Jane se remémore sa fuite de Thornfield, la soirée précédente et les suppliques d'Edward Rochester pour qu'elle reste, son errance dans la lande et sa découverte par le pasteur.
C'était plutôt osé de le traiter ainsi, mais ça passe très bien, cela ne m'a pas gênée outre mesure.
Cette adaptation est relativement moderne dans le choix de sa mise en scène, ainsi le flash-back est utilisé à d'autres reprises, notamment lorsqu'Edward Rochester parle des îles, racontant ainsi sa propre jeunesse.
Et puis la réalisatrice a choisi d'intégrer une dose de mystère dans sa façon de filmer, ainsi le secret de Thornfield n'intrigue pas que Jane mais aussi le spectateur.
J'ai aimé ce parti pris, car cela donne une dimension intrigante à l'histoire qui est souvent dans les adaptations laissée de côté alors qu'elle est bien présente dans le livre.

Je ne peux qu'approuver le choix de l'actrice (Ruth Wilson) pour interpréter Jane Eyre, elle n'est pas particulièrement belle ni gracieuse (comme le personnage de Jane, ce qui me convient totalement), mais elle donne du caractère et toute la passion qui caractérise le personnage de Jane Eyre.


Il rend toute la complexité du personnage grâce à son excellent jeu, il joue à merveille le côté lunatique d'Edward Rochester et il lui donne un charme certain car, rappelons-le, Edward Rochester n'est pas non plus particulièrement beau, mais il est riche.
J'ai toujours imaginé ce personnage comme étant sombre, tourmenté, lunatique, mais dégageant un charisme et un charme, là j'ai retrouvé exactement ce que j'attendais.



Quant aux autres acteurs, le casting est vraiment excellent et ils interprètent divinement les personnages du livre. 
C'est sans doute la première fois qu'Adèle est représentée tel que je me l'imaginais : en petite fille coquette, habillée en décalage complet avec sa situation, toujours en froufrou, chantant et dansant.
C'est la première fois que je vois le personnage d'Adèle aussi bien traitée et fidèle par rapport au livre, donnant à ce personnage une place à part entière dans l'histoire.
Les paysages sont magnifiques et à couper le souffle, les scènes d'extérieur ayant été tournées dans le Derbyshire.
Il en ressort la beauté du paysage et son côté sauvage.
Quant à Thornfield, le château réel (Haddon Hall) retenu comme lieu est non seulement imposant mais évoque une dose de mystère qui cadre parfaitement avec l'histoire.



Mais là où réside tout l'intérêt de cette adaptation et où j'ai été ravie, c'est la modernité qui est donnée à la relation entre Jane et Edward.
Par modernité, j'entends par là que, comme dans le roman, ces deux personnages sont très loin de respecter les codes de l'époque.
Ainsi Edward embrasse à plusieurs reprises Jane (y compris en extérieur avec le risque d'être vu), celle-ci se laisse faire mais est aussi demandeuse, ils se retrouvent sur un lit ensemble, il la prend dans ses bras, bref, autant de gestes qui ne se faisaient pas à l'époque, ou alors dans l'intimité et après le mariage.
De ce point de vue, le livre était résolument moderne à l'époque et certaines scènes avaient créé un scandale, notamment une où Edward prenait Jane sur ses genoux.
Là, la réalisatrice a tenu à montrer ce côté moderne du couple, et je ne peux qu'applaudir car c'est la seule fois à ce jour où une adaptation de Jane Eyre a gardé cet esprit du livre et l'a montré à l'écran.


En choisissant de se concentrer sur la relation entre Jane et Edward, cette adaptation met en avant toute la passion qui anime ces deux personnages et toute la modernité de leur relation, explosant ainsi les codes de cette époque, ce qui m'a permis de très facilement lui pardonner les quelques petites maladresses de mise en scène et les infimes déviations par rapport au livre (vraiment c'est trois fois rien), d'autant que les paysages sont magnifiques et la musique très belle pour accompagner cette histoire.
"Nobody's perfect", mais cette adaptation est assez proche de la perfection et je la place à égalité avec celle de 1983 avec Zelah Clarke et Timothy Dalton.

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