lundi 21 octobre 2013

Fleur de tonnerre de Jean teulé


Hélène Jégado a tué des dizaines de ses contemporains sans aucune raison apparente. Quels secrets renfermait cette tête qui, le 26 février 1852, sur le Champ de mars de Rennes, roula dans la corbeille de la guillotine ? (Julliard)

Hélène Jégado a été une enfant adorable, enfin, jusqu'à l'âge de sept ans où sa mère lui a donné le surnom de Fleur de tonnerre et surtout où elle a essayé, pour la première fois et malheureusement pas la dernière, d'empoisonner une autre fillette de son âge.
Il faut dire qu'Hélène a aussi eu la tête farcie par sa mère de toutes les légendes bretonnes, particulièrement celle de l'Ankou :  "Il n'y a rien de pire que l'Ankou ! Se promenant en Bretagne avec sa charrette, il la charge de corps, frappés d'une puissance invisible, de toutes celles, ceux, qu'il fauche sans distinction.", à tel point qu'Hélène a fini par s'identifier à l'Ankou, ne faisant plus q'un avec cette légende et ce, pour le restant de sa vie : "Dehors, le lampion de la bergère Emilie, courant sur la lande, projette, à travers le vitrail, un autre rayon de lumière qui tourne. Il étire l'ombre de l'Ankou qui se déplace pour venir se fondre en Fleur de tonnerre. L'ombre de l'Ouvrier de la Mort paraît maintenant porter une coiffe d'enfant bretonne. Ô le cerveau de petite fille qu'un tel prodige affole ! Ainsi que l'Ankou, elle lève un bras comme si elle tenait une faux.".
Après un empoisonnement raté, elle réussira tous les suivants et commencera alors à arpenter la Bretagne, semant derrière elle la mort sans distinction aucune : homme, femme, enfant, et sans raison particulière :  "Ne faisant aucune distinction, elle empoisonne comme par distraction ainsi que si elle lançait des graines aux pigeons.".
Et quand elle ne peut pas tuer, ça la rend mauvaise la Jégado, elle a ça dans le sang, pire qu'une drogue, elle n'a aucune conscience ni notion du bien ou du mal, a fort mauvais caractère, et se croit indestructible et intouchable : "Aucune avanie ne me jettera par terre, aucun écueil ne me fera sombrer, aucun marteau ne m'écrasera. Je suis indémolissable !".

Jean Teulé a le chic pour bâtir ses récits à partir de faits véridiques ou de personnages ayant existé.
Ici, il s'attache à Hélène Jégado, une femme tueur en série ayant sévi en Bretagne durant la première moitié du 19ème siècle.
Avant la publication de ce livre, je n'en avais pas entendu parler.
Comme d'ordinaire, la base est réelle mais l'auteur brode autour et se permet de prendre des libertés.
Ainsi, il attribue à Hélène des forfaits dont on ne soit pas sûr qu'ils soient bien de son fait, l'assassinat de sa mère par exemple.
Il présente aussi Hélène Jégado comme la plus grande tueuse en série de tous les temps, je ne sais si cette affirmation est vraie, mais il faut bien dire qu'au cours de chaque chapitre il y a au moins un mort.
Jean Teulé a un style que je trouve agréable, il mêle modernité et parler ancien, il y a des petites touches d'humour dans son récit, si bien que le dramatique passe facilement.
Je qualifierai cette lecture de "page turner", j'ai lu ce roman très rapidement, les chapitres sont rapides et s'enchaînent facilement les uns derrière les autres.
La base de l'histoire est intéressante, j'aime le style d'écriture de Jean Teulé ainsi que son don pour dénicher des personnages plus ou moins connus et leur donner vie sous sa plume.
Mais Jean Teulé a parfois tendance à grossir le trait, ce qui vient quelque peu discréditer son histoire.
Ici, c'est le nombre de forfaits qu'il impute à Hélène Jégado, mais également la présence durant tout le récit de deux normands venus faire fortune en collectant les cheveux en Bretagne et à qui il arrivera moultes péripéties.
Je n'ai pas vraiment compris la raison d'être de ces deux personnages, ça donne un côté gag à l'histoire qui n'était pas nécessaire, d'autant plus qu'ils n'auront que très peu d'interaction avec Hélène Jégado alors qu'ils suivent son parcours d'empoisonneuse.
Et puis a contrario, il y a de très beaux passages, comme celui où Hélène tombe amoureuse ainsi que son procès à la fin.

"Fleur de tonnerre" est un divertissement littéraire agréable servi par Jean Teulé qui, sans être inoubliable, permet au lecteur de passer un bon moment et de découvrir le portrait de cette femme hors norme dont je ne suis prête à manger sa soupe aux herbes et encore moins son gâteau à l'angélique, le tout avec en toile de fond la Bretagne, magnifique région qui justifie à elle seule (ou presque) la lecture de ce roman.

2 commentaires:

  1. Bon, tu douches un peu mon envie de lire ce livre. Mais je le garde sur ma LAL !
    Et sinon, coïncidence : il y a aussi un roman de Jean Teulé sur mon blog ce matin ! :)

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    1. Ah mais tu peux le lire, j'ai beaucoup aimé. Le petit reproche que je fais, il est commun à presque tous les livres de cet auteur.
      Je file sur ton blog voir ça.
      On va finir par instaurer un post sur un même auteur un jour donné sur plusieurs blogs (la journée Edith Wharton etc.) :)

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