jeudi 14 avril 2016

Room de Lenny Abrahamson

     
     

Jack, 5 ans, vit seul avec sa mère, Ma. Elle lui apprend à jouer, à rire et à comprendre le monde qui l’entoure. Un monde qui commence et s’arrête aux murs de leur chambre, où ils sont retenus prisonniers, le seul endroit que Jack ait jamais connu. L’amour de Ma pour Jack la pousse à tout risquer pour offrir à son fils une chance de s’échapper et de découvrir l’extérieur, une aventure à laquelle il n’était pas préparé. (AlloCiné)


C'est un grand jour pour Jack (Jacob Tremblay), il vient d'avoir cinq ans.
Avec sa maman, appelée Ma (de son vrai nom Joy, Brie Larson), il regarde Madame Télé pour les dessins animés, il mange sur Madame Table, il fait du sport en faisant des allers-retours d'un mur à l'autre, et ensemble ils confectionnent un gâteau d'anniversaire, mais sans bougie.
Car Jack et Ma n'ont pas une vie ordinaire, ils vivent dans la Pièce, où il y a une petite cuisinière, une table, un lit, une armoire, une baignoire et une fenêtre très loin sur le toit, séquestrée dedans pour Ma depuis plusieurs années tandis que Jack n'a toujours connu que cette Pièce.
Et parfois la nuit Jack doit dormir dans le placard car Old Nick (aka Grand Méchant Nick en Français, Sean Bridgers) vient rendre visite à Ma.
Ma a construit un univers à Jack, sans lui parler de ce qui existe réellement à l'extérieur, mais aujourd'hui elle décide de dé-construire tout l'univers qu'elle a créé pour son petit garçon car elle a décidé qu'il était temps pour eux de se délivrer et de retrouver une famille et la vie telle qu'elle doit être.
Ma va donc minutieusement préparer Jack à la grande aventure de sa vie du haut de ses cinq ans : aller à l’extérieur de la Pièce et découvrir un monde auquel il ne s'attendait pas.


La première partie du film est assez angoissante pour ne pas dire claustrophobique.
Elle se déroule dans une seule et même pièce que le spectateur a l'impression, comme Jack, de voir relativement grande.
On découvrira par la suite qu'il n'en est rien, mais pour l'instant tout semble assez bien aménagé.
La vie de Ma et Jack est précise et rythmée de moments qui reviennent quotidiennement, ainsi pendant une bonne partie le film prend le temps de poser ces bases et de laisser le spectateur s'habituer.
Old Nick est un personnage que le spectateur voit finalement peu, la caméra est concentrée autour de Ma et Jack.
J'aime assez ce parti pris du réalisateur, Old Nick est un monstre et le fait de ne pas le voir frontalement renforce encore plus cet aspect.
Là où tout s'accélère c'est lorsque Ma décide qu'il est temps pour eux de s'enfuir, elle agit uniquement poussée par l'amour qu'elle ressent pour son fils et a su tirer des leçons de ses erreurs passées dans ses tentatives avortées de fuite.
A partir de ce moment la mère et le fils ne sont plus complices comme auparavant, Ma pousse Jack dans ses retranchements, elle saborde tout ce qu'elle a construit pour lui tandis que Jack réagit assez mal et n'hésite pas à piquer quelques colères envers sa mère, plutôt normal pour un enfant de cinq ans.
Vient enfin le moment de l'évasion de Jack et de sa découverte de l'extérieur et j'avoue que c'est à mes yeux le passage le plus abouti et réussi du film : il y a une tension forte, j'ai vibré avec Jack, j'étais accrochée à l'accoudoir du fauteuil tant je craignais qu'il ne réussisse pas.


C'est alors que se met en place la deuxième partie du film, celle du retour dans le monde extérieur et des retrouvailles de Joy avec sa mère (Joan Allen) désormais séparée de son père et ayant refait sa vie avec Leo, une partie moins bien réussie que la première.
Pour cette partie le réalisateur a changé sa mise en scène et elle s'avère assez banale, en tout cas moins précise et travaillée que dans la première.
Si l'on voit les difficultés de Ma et de Jack à se ré-adapter, je trouve néanmoins que cet aspect est trop survolé pour Ma.
Certes, elle va vivre des moments difficiles, mais je trouve que cela aurait pu être approfondi beaucoup plus (ayant lu le roman par la suite je trouve cet aspect beaucoup mieux traité dans celui-ci que dans le film).
Contrairement à sa mère, Jack va finir par s'habituer à sa nouvelle vie et à sa nouvelle famille, je trouve les relations qu'il entretient avec sa grand-mère et le compagnon de celle-ci tout à fait touchantes.
La réaction du père de Joy est également intéressante car il refuse de regarder son petit-fils, il est dégoûté par cet enfant et cela correspond plutôt bien au genre de réaction que l'entourage pourrait avoir dans de telles circonstances.
Si Brie Larson a passé la première partie du film sans maquillage et de façon plutôt négligée, elle change petit à petit dans cette seconde partie et finit par retrouver une partie de ses réflexes d'avant.
Il y a quelques belles scènes pleines d'émotions avec Jack mais moins que dans la première partie.
Car l'actrice qui est complètement formidable ici est Joan Allen, elle campe à merveille le rôle de cette grand-mère qui retrouve sa fille et découvre son petit-fils, et ce sont les scènes entre ces deux-là qui sont à mes yeux les plus touchantes.
Jacob Tremblay est lui aussi un petit garçon formidable car sa prestation est tout à fait remarquable du début à la fin, et c'est à mon sens lui la véritable révélation du film.
Car il faut maintenant que je sois honnête, même si Brie Larson a un jeu maîtrisé, et ce fut pour moi une belle découverte et révélation cinématographique, elle ne méritait pas selon moi d'avoir un Oscar pour ce rôle.
Personnellement j'ai été plus sensible à la prestation de Cate Blanchett dans "Carol" mais je reconnais que Brie Larson a du talent et qu'il n'était pas facile de tenir aussi justement un tel rôle et de faire ressortir à ce point tout ce que pousse à faire l'amour maternel.
Je ne suis peut-être pas très objective sur ce coup-là, mais en tout état de cause "Room" est un film aussi bouleversant que peut l'être le roman dont il est tiré, son auteur, Emma Donoghue, ayant d'ailleurs participé au scénario du film.


"Room" de Lenny Abrahamson est un film à la fois angoissant et humain, très touchant par bien des aspects et qui mérite sans nul doute d'être vu.


     
     

     
     

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