Julieta s’apprête à quitter Madrid définitivement lorsqu’une rencontre fortuite avec Bea, l’amie d’enfance de sa fille Antía la pousse à changer ses projets. Bea lui apprend qu’elle a croisé Antía une semaine plus tôt. Julieta se met alors à nourrir l’espoir de retrouvailles avec sa fille qu’elle n’a pas vu depuis des années. Elle décide de lui écrire tout ce qu’elle a gardé secret depuis toujours. Julieta parle du destin, de la culpabilité, de la lutte d’une mère pour survivre à l’incertitude, et de ce mystère insondable qui nous pousse à abandonner les êtres que nous aimons en les effaçant de notre vie comme s’ils n’avaient jamais existé. (AlloCiné)
Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas été voir un film de Pedro Almodóvar au cinéma, il faut dire que ses deux derniers opus ne m'avaient pas trio attirée, finalement j'ai bien fait d'attendre tout ce temps car je suis ressortie très émue par ce film qui s'inscrit dans la veine des grands drames de cet incontournable réalisateur Espagnol.
Le film s'ouvre sur un superbe drapé rouge qui s'avère être la robe de chambre de Julieta (Emma Suárez pour Julieta à l'âge de 50 ans, Adriana Ugarte pour Julieta jusqu'à l'âge de 30 ans).
Celle-ci s'apprête à quitter Madrid pour partir vivre au Portugal, elle a quelque chose dans les traits du visage et dans sa façon d'agir qui laisse à penser qu'elle a un lourd secret et qu'elle se reproche quelque chose mais le spectateur ne sait pas quoi, et voilà qu'elle croise Beatriz une amie d'enfance de sa fille Antia qui lui dit avoir vu cette dernière il y a peu de temps.
Cela bouleverse Julieta qui décide alors de rester à Madrid, car cela fait dix-huit ans qu'elle n'a plus vu sa fille Antia.
Elle va alors lui écrire une lettre dans laquelle elle lui raconte tout, de la rencontre avec son père, de leur amour, jusqu'à la mort tragique de ce dernier et les circonstances de celle-ci.
Julieta vit depuis trop longtemps avec le poids du passé et des remords dont elle s'accable, il est temps pour elle de s'en débarrasser en les couchant sur papier, et peut-être que cette fille si longtemps disparue réapparaîtra-t-elle dans sa vie.
C'est un véritable drame que signe ici Pedro Almodóvar, un film qui s'inscrit dans la lignée de "Talons aiguilles", "Tout sur ma mère", ou encore "Volver".
Julieta est une femme sinistrée, elle n'a plus vu sa fille depuis plus de dix ans, c'est une blessure non cicatrisée et sans doute l'un des pires drames que peut connaître une mère dans sa vie.
Le récit se fait par le prisme de Julieta, il y a tout d'abord la rencontre dans un train avec un homme qui deviendra son compagnon et le père de sa fille, la naissance de celle-ci et la joie de ces années-là, puis le drame survient, Julieta tombe en dépression et ne doit de revenir à la vie que grâce à sa fille et à la meilleure amie de celle-ci.
Puis Antea disparaît un beau jour, Julieta doit ré-apprendre à survivre, rencontre un homme qui deviendra son deuxième compagnon mais elle se comporte clairement comme une droguée ou une personne dépendante d'une substance ou de l'alcool : le premier signe la fait replonger dans son addiction, ici c'est la rencontre avec l'ancienne amie de sa fille qui déclenche sa rechute.
Difficile de ne pas être touchée par cette femme, pendant que l'histoire se déroulait je me demandais ce qu'elle avait bien pu faire pour que sa fille disparaisse du jour au lendemain, mais en fait rien, ici il n'est question que de la culpabilité dans laquelle elle a fini par s'enfermer et que sa fille a mal interprété.
C'est un récit douloureux, et pourtant lumineux, car comme à son habitude Pedro Almodóvar utilise abondamment les couleurs vives.
Sa mise en scène et en images est tout simplement magnifique, il y a beaucoup de référence : comment ne pas penser à Alfred Hitchcock avec cette scène de train poursuivi par un cerf, il y a de la sensualité, comme bien souvent chez Emma Suárez, et c'est aussi particulièrement maîtrisé, je pense notamment à cette magnifique ellipse pour passer d'une Julieta trentenaire à une Julieta plus âgée.
Dans le choix de ses actrices, ai-je déjà dit à quel point Pedro Almodóvar savait les mettre en lumière, il fait appel pour un petit rôle à l'une de ses actrices fétiches : Rossy de Palma, et pour Julieta à Adriana Ugarte et Emma Suárez, inconnues pour ma part (et apparemment en France mais pas en Espagne) mais qui se révèlent particulièrement brillantes dans cette double interprétation de Julieta à deux époques différentes.
Cette histoire a été bâtie à partir de trois nouvelles du recueil "Fugitives" d'Alice Munro (dont j'ai lu "Du côté de Castle Rock") ; "Hasard", "Bientôt" et "Silence".
La musique est signée comme d'ordinaire par Alberto Iglesias, et la chanson du film, à l'instar du "Piensa en mi" de Luz Casal pour "Talons aiguilles", est "Si no te vas" interprétée par Chavela Vargas, un air qui vous restera également en tête pendant longtemps et qui est l"apothéose de ce sommet d'émotion qu'est "Julieta".
Si "Julieta" est reparti bredouille de Cannes, à mon avis une erreur tant ce film aurait mérité de recevoir un Prix, ce n'est pas une raison pour le bouder dans les salles car c'est du grand, du très grand Pedro Almodóvar, à la fois troublant et passionnant.
En effet, le festival de Cannes n'a pas récompensé des films et des comédiens qui l'auraient vraiment mérité ...
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