samedi 6 avril 2013

L'écrivain de la famille de Grégoire Delacourt


À sept ans, Édouard écrit son premier poème, quatre rimes pauvres qui vont le porter aux nues et faire de lui l’écrivain de la famille. Mais le destin que les autres vous choisissent n’est jamais tout à fait le bon ... Avec grâce et délicatesse, Grégoire Delacourt nous conte une histoire simple, familiale, drôle et bouleversante. (Le Livre de Poche)

C'est sur trois décennies que cet écrivain va se raconter.
Enfin écrivain, c'est vite dit : "J'avais écrit un poème minable et j'avais été catalogué écrivain de la famille. Et puis quoi encore ?", car écrivain, Edouard aura beau essayer, il ne réussira jamais à l'être dans le sens où toute sa famille l'attendait.
C'est dans une autre forme d'écriture que sa créativité va s'exprimer : celle pour les publicités.
Mais l'intérêt de ce livre ne réside pas dans la carrière d'écrivain réussie ou non  d'Edouard, c'est plus une réflexion douce amère sur la vie, les rêves qui ne réalisent pas toujours, voire pas du tout, et la gestion du quotidien et des problèmes : un mariage sans réel amour, les enfants, le divorce, les coucheries à droite et à gauche et la peur d'avoir contracté le SIDA, la sénilité d'un parent, la mort de proches.
Edouard est un personnage enfermé dans un carcan dès son plus jeune âge : il doit devenir l'écrivain de la famille, il se laisse porter par sa famille, plus tard par Monique qui le pousse à écrire son premier roman, il met finalement près de trente ans à comprendre ce qu'est la vie, l'amour : "Quand sait-on qu'on aime ? Le soir ou au matin ? Quand il est encore temps, ou déjà trop tard ?" mais par dessus tout à se séparer de la forme de dictature imposée par les autres sur sa personne pour enfin vivre son destin.
Autour d'Edouard gravitent d'autres personnages : certains sont touchants comme son père et sa mère, extrêmement émouvants comme son frère, et puis d'autres m'ont laissée indifférente, comme Monique qui a aucun moment ne m'a été sympathique.
Il y a aussi une ambiance qui se dégage du texte, chaque partie est consacrée à une décennie et Grégoire Delacourt a su leur donner une forme de vie et de nostalgie.
Ainsi les années soixante-dix sont celles de la musique, de la mode, des magazines féminins, de l'enfance pour Edouard et surtout de l'insouciance; les années quatre-vingt sont marquées par de nouvelles musiques, une atmosphère plus grave avec l'entrée dans l'âge adulte et la vie active mais surtout le développement du SIDA qui se met à toucher n'importe qui, n'importe où, sans faire de distinction de classe sociale et la mort commence à être présente : "La jeune fille hurla. Aujourd'hui encore son je ne veux pas mourir, s'il vous plaît me réveille la nuit."; quant aux années quatre-vingt-dix, l'insouciance s'en est allée et Edouard se heurte aux difficultés de la vie et mûrit, enfin.
Je reconnais à Grégoire Delacourt un style fluide et très prenant.
Les chapitres sont courts, l'histoire se lit avec avidité, je qualifierai son livre de page turner.
C'est relativement bien maîtrisé, d'autant qu'il s'agit de son premier roman et que ça ne ressent quasiment pas à la lecture.
Je relativise avec quasiment pas car les quelques défauts de ce livre sont inhérents à ses qualités : Grégoire Delacourt arrive merveilleusement à capter l'attention du lecteur en égrainant dans son récit des moments futurs mais lorsque ceux-ci arrivent j'ai trouvé qu'il passait dessus trop vite.
Ainsi, il crée une tension en évoquant le test de dépistage du SIDA que sera amené à faire Edouard dans quelques années, mais lorsque ce passage arrive en un paragraphe c'est bouclé.
Pareil pour la mystérieuse jeune femme assise sur le capot de la voiture.
J'ai trouvé cela un peu dommage car une tension avait été créée mais ce traitement trop rapide sur des passages qui m'intéressaient m'ont laissé un peu frustrée dans ma lecture.

Ne vous arrêtez pas à mon chipotage sur des passages trop vite évoqués, "L'écrivain de la famille" est un très bon premier roman de Grégoire Delacourt avec de l'émotion et de la tendresse qui se lit avec beaucoup de plaisir.
Un auteur à découvrir si ce n'est déjà fait !

2 commentaires:

  1. J'ai beaucoup aimé ce premier roman. :)

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    1. Dans ma grande logique j'ai commencé par "La liste de mes envies" que j'avais beaucoup aimé, comme celui-là.

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