samedi 8 mars 2014

Quelques minutes après minuit de Patrick Ness


Depuis que sa mère est malade, Conor redoute la nuit et ses cauchemars. Quelques minutes après minuit, un monstre apparaît, qui apporte avec lui l'obscurité, le vent et les cris. C'est quelque chose de très ancien, et de sauvage. Le monstre vient chercher la vérité. (Gallimard Jeunesse)

Depuis que sa mère est gravement malade, Conor s'isole de ses camarades à l'école et cauchemarde chaque nuit : à minuit et sept minutes un monstre apparaît, jusqu'au jour où ce dernier prend vie et lui propose un marché : il va venir lui raconter trois histoires, la quatrième c'est Conor qui devra la lui raconter.
Commence alors pour Conor une étrange période dans laquelle il va finir par perdre pied, subjugué par les propos du monstre, en mélangeant le monde réel et celui du cauchemar : "presque comme dans le cauchemar, le même monde fiévreux et brumeux qui dérapait de son axe mais, cette fois, c'était lui qui contrôlait le chaos, cette fois, c'était lui le cauchemar".
Mais le monstre n'est pas là innocemment, c'est parce que Conor l'a appelé qu'il est apparu, et c'est à Conor de trouver la raison de cet appel au secours, en somme, d'énoncer sa vérité à travers une histoire pour que le monstre disparaisse : "Et s'il y avait une chose que le monstre lui avait apprise, c'était bien celle-là. Les histoires étaient des animaux sauvages, très sauvages, et elles partaient dans des directions qu'on ne pouvait pas prévoir.".

Ce roman destiné à la jeunesse traite du thème difficile qu'est la maladie et par ricochet, la mort, ainsi que dans une moindre mesure la séparation puisque les parents de Conor sont divorcés et que son père a refait sa vie aux Etats-Unis.
A partir d'une idée originale de Siobhan Dowd, décédée avant d'avoir pu finir l'élaboration de son roman, Patrick Ness a créé une histoire complète illustrée par Jim Kay.
Cette histoire m'a particulièrement touchée, elle est à la fois très belle et très triste mais traitée avec beaucoup de délicatesse et ne tombe jamais dans l'apitoiement.
Les trois contes narrés par le monstre présenté sous forme d'un if géant sortent du cadre des contes habituels et contiennent une morale subtilement distillée au jeune Conor.
Le personnage de ce jeune garçon est lui aussi bien traité, il est présenté au lecteur dans toute sa complexité comme un enfant qui a peur mais qui ne le montre pas et n'en parle à personne : "Conor n'avait jamais eu aussi peur de toute sa vie. C'était comme assister à la fin du monde, comme être vivant et éveillé dans son propre cauchemar, le hurlement, le vide ...", il se comporte parfois en adulte alors qu'il est encore un enfant, il porte sur ses épaules un fardeau bien trop lourd pour son jeune âge.
Cette histoire permet notamment d'illustrer le fait que la parole peut libérer et soulager, le monstre servant de catalyseur pour déclencher les sentiments refoulés par Conor.
Une fois l'abcès crevé, Conor est soulagé et libéré, il peut de nouveau envisager de continuer à vivre sa vie de petit garçon bien qu'il gardera de son passé une empreinte indélébile.
J'ai beaucoup aimé l'introduction du fantastique dans cette histoire pourtant très terre à terre et ancrée dans le réel et le quotidien.
Les illustrations apportent une atmosphère à l'intrigue et donnent un véritable cachet à ce roman.
La plume de Patrick Ness m'a énormément séduite et je suis désormais très curieuse de découvrir les œuvres de Siobhan Dowd.

"Quelques minutes après minuit" est un coup de cœur littéraire, ce roman destiné en premier lieu à la jeunesse peut se lire à tout âge avec beaucoup de plaisir tant son récit est maîtrisé, empli d'émotions et la plume de Patrick Ness extrêmement agréable et belle à lire.

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