En 1874, un chef cheyenne demande au Président Grant de lui
donner mille femmes blanches pour les marier à ses guerriers afin de faciliter
l'intégration et le mélange de leurs deux peuples. Partant de ce fait
historique, Jim Fergus retrace l’odyssée, sur les terres sauvages de l’Ouest,
de ces femmes recrutées pour la plupart dans des prisons ou des asiles
psychiatriques. (Pocket)
Jamais je n’aurai lu tant de livres sur les Indiens
d’Amérique que cette année, et il manquait au palmarès ce roman de Jim Fergus, "Mille
femmes blanches", une fiction mettant en scène des jeunes femmes blanches
qui obéissant à un programme du gouvernement Américain partent épouser et vivre
avec des Cheyennes de la tribu du grand chef Little Wolf.
Soyons clair, c’est de la fiction et un tel arrangement n’a
jamais existé, d’ailleurs l’auteur s’est permis quelques libertés quant à la
réalité de la vie de Little Wolf et de certains évènements dont il est question
en modifiant les dates.
Jim Fergus a bâti son roman sur des carnets fictifs écrits
par une certaine May Dodd, une ancêtre du narrateur, qui aurait fait partie de
ces femmes parties vivre chez les Cheyennes.
May Dodd était issue d’un milieu aisé, mais parce qu’elle
s’est mise en ménage avec un homme dont elle a eu deux enfants et que cela ne
se faisait pas à l’époque, ses parents l’ont fait interner.
Son seul salut pour quitter l’asile vient de la proposition
du gouvernement, elle choisit alors de retrouver sa liberté, même si pour cela
elle doit épouser un Cheyenne et lui faire des enfants.
Autant quitter une prison pour en retrouver une autre, mais
en plein air cette fois-ci : "Je n’ai de toute façon aucun pouvoir
sur hier ni sur demain. La même leçon vaut certainement pour ma vie ici chez
les barbares, mon sentiment étant que j’ai en quelque sorte mis les pieds dans
une autre forme d’asile, celui-ci étant le saint des saints de la folie.".
Elle n’aura pas à regretter son choix, car elle épousera
Little Wolf, le grand chef, et entre-temps elle aura le temps de tomber
amoureuse d’un autre homme, un gradé militaire responsable d’acheminer les
femmes blanches aux Indiens.
A travers le regard de May Dodd, l’auteur dépeint non
seulement le mode de vie des Indiens mais il fait s’interroger toutes ces
femmes blanches sur leurs congénères et les actions qu’ils entreprennent
vis-à-vis des Indiens, notamment celle de les parquer dans des réserves pour
s’approprier leurs terres et les richesses qu’elles recèlent :
"Pourquoi nous rendrions-nous à l’Agence, quand nous disposons de tout ce
dont nous avons besoin, et que nous sommes un peuple libre sur une terre
libre ?".
Car toutes ces femmes finissent par adopter les coutumes et
le mode de vie des Cheyennes, et ça leur plaît car sans doute que pour la
première fois de leur vie elles sont réellement libres, à la fois de mouvement
et d’opinion.
Et elles s’interrogent : "Je ne peux m’empêcher de
me demander ce que nous pouvons bien faire à ces gens pour que leurs vies et
leurs moyens d’existence s’abîment à notre contact, qu’ils se
"dégradent" à cause de nous, comme disait le capitaine Bourke.",
elles se rendent bien compte qu’au contact des Blancs les Indiens perdent une
partie de leur essence, ils se transforment et oublient leurs coutumes, à
l’image de ces Indiens alcooliques qui errent près des casernes de soldats, ils
ne sont plus Indiens mais pas non plus Blancs, ils n’appartiennent plus à aucun
peuple.
Je ne sais trop quoi penser de ce livre, je ne peux pas dire
que je n’ai pas aimé, mais je ne peux pas non plus dire que c’est un coup de
cœur.
Est-ce parce que l’auteur a pris des libertés historiques
que j’ai du mal à adhérer complètement à l’histoire ?
Sans doute, car il faut reconnaître que c’est écrit de telle
façon que le lecteur y croit, mais comme je savais que ce n’était pas vrai la
sauce n’a pas complètement prise.
Ou alors le personnage de May ne m’a-t-il pas assez
touchée ?
Certes, son histoire est plutôt triste, mais ce n’est pas
non plus le genre de personnage féminin pour lequel je peux ressentir de
l’empathie.
Je dois bien dire que ses états d’âme m’ont assez vite lassée.
Et je ne sais trop quoi penser non plus de la vision très
simpliste présentée par l’auteur : les Blancs sont les gentils et les
Indiens les méchants.
Est-ce volontaire ou non ?
L’originalité de ce récit est qu’il se fait à travers un
regard féminin, chose rare dans la littérature traitant des Indiens
d’Amérique ; et impossible de ne pas reprocher à l’auteur son implication
et la justesse des questions soulevées.
"Mille femmes blanches" de Jim Fergus mérite
d’être lu mais ce n’est pourtant pas ce roman que je citerai en premier pour un
aperçu littéraire de l’extermination des Indiens d’Amérique ni que je
retiendrai cette année dans mes lectures sur ce thème.
Livre lu dans le cadre du Prix des Lectrices 2015
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