dimanche 30 décembre 2012

Furioso de Carin Bartosch Edström


En se retirant sur un paisible îlot privé de l’archipel de Stockholm, les musiciennes de l’ensemble Furioso pensaient enregistrer au calme le dernier quatuor à cordes de Stenhammar. Mais lorsque Louise Armstahl se blesse à la main et cède sa place de leader à son ami Raoul Liebeskind, l’équilibre qui régnait jusque-là vole en éclats. Chacune des musiciennes a eu une histoire avec ce charismatique violoniste, adulé par les femmes. De vieilles intrigues ressurgissent tandis que de nouvelles se tissent, attisées par la musique de chambre passionnée qui entraîne les cinq protagonistes vers un dénouement fatal : un meurtre, une nuit, alors que seuls les cinq musiciens se trouvent sur l’île. C’est à la commissaire Ebba Schröder de la police criminelle de Djursholm qu’est confiée la délicate mission de découvrir ce qui s’est réellement passé. Les membres du quatuor se couvrent et se déchirent à mesure que leurs antagonismes sont mis à jour et que les mobiles potentiels et les responsabilités de chacun apparaissent. (JC Lattès)

"Furioso" est un roman policier non conventionnel dans le sens où il casse les codes de ce genre littéraire.
Car il s'agit bien d'un roman policier, pourtant, pendant près de 240 pages il n'en est rien.
Il est question d'un ensemble de musique, Furioso, composé de quatre musiciennes, mais lorsque Louise, la leader, se blesse elle doit trouver en urgence une personne pour la remplacer pour l'enregistrement du dernier morceau de leur nouveau disque.
Elle fait alors appel à Raoul Liebeskind, un violoniste à la renommée internationale, mais elle fait par la même occasion entrer le loup dans la bergerie, car Raoul Liebeskind n'est pas qu'un musicien de génie, il est aussi un séducteur invétéré, un véritable Don Juan qui se sait aduler des femmes et qui use et abuse de son charme pour séduire toutes les femmes.
A partir de ce moment-là, il n'y a plus de chef d'orchestre à tenir la baguette, l'équilibre de cet ensemble musical explose en plein vol pour se solder par un meurtre : "La passion serait-elle devenue dévorante au point d'en être invivable ?".
C'est là que la deuxième partie du roman commence, avec l'entrée en scène du commissaire Ebba Schröder.

L'auteur offre une fine étude des caractères de tous les personnages présents dans son roman.
Tous ont une personnalité, un caractère, et les interactions entre eux sont précises et rendent particulièrement intéressante toute la première partie qui se concentre sur eux.
Je n'ai pas éprouvé de réelle empathie pour un personnage plus que l'autre, mais je ne les ai pas non plus cordialement détestés, je trouve que l'auteur a particulièrement bien réussi sa galerie de personnages et que la réussite de son récit repose en grande partie sur eux.
Il y a Louise, la meneuse de troupe, musicienne accomplie et noble; Helena, la mère de famille, médecin et musicienne pendant ses temps de loisirs; Anna, venant tout juste d'être promue chef d'orchestre, récemment divorcée et sortant d'un cancer du sein; Caroline, la jeune soeur de Helena, fragile psychologiquement tout en étant une violoncelliste en devenir et sans doute le personnage canalisant la plus grande palette d'émotions : "Ce qui dans un premier temps l'avait effrayée l'emplissait maintenant d'espoirs. D'espoirs. D'attentes. D'impatience. L'instant précis qui précède l'explosion, où il subsiste une possibilité de faire demi-tour. Mais pour qu'il y ait de l'espoir, il faut qu'il y ait un minimum de certitudes."; et enfin Raoul, le tombeur de ces dames mais aussi musicien virtuose et homme sachant se maîtriser lorsque les situations l'exigent : "En dépit de sa passion, le soliste qu'il était savait maîtriser ses nerfs en toutes circonstances.".
Du côté des forces de police, les personnages sont aussi finement travaillés, qu'il s'agisse de la commissaire Ebba Schödder, de Vendela Smythe-Fleming qui va l'assister ce qui fait que la dynamique créée dans la première partie perdure dans la deuxième.

Carin Bartosch Edström est aussi chef d'orchestre, compositrice d'opéras et de musique de chambre, traductrice d'opéras italiens, c'est pourquoi la musique occupe une très grande place dans ce roman et ce, pour mon plus grand plaisir.
Pratiquant également la musique, j'ai pris beaucoup de plaisir à lire les oeuvres musicales interprétées, les scènes de répétition, cela m'a replongée dans mes années au conservatoire, à participer à des orchestres ou à des groupes de musique de chambre.
De plus, chaque partie commence par une citation de l'opéra "Don Juan" de Molière, petit clin d'oeil musical collant parfaitement au personnage de Raoul.
Elle a construit son intrigue comme un morceau de musique : une introduction, un crescendo vers le drame, un tourbillon d'alibis et de vérités cachées pour finir decrescendo vers la résolution, le tout en restant seule maître de sa partition du début à la fin.
La quatrième de couverture est d'ailleurs réussie, elle dévoile quelques lignes de l'histoire mais se garde bien de tout dire et c'est plaisant d'en lire une qui est dosée comme il faut : donner envie au lecteur de lire le livre tout en lui réservant des surprises.
Concernant l'intrigue policière, elle n'est pas sans rappelée les intrigues d'Agatha Christie et particulièrement celle des "Dix petits nègres" et de façon indirecte celle du "Crime de l'Orient Express".
Déjà, la majorité de l'histoire se situe sur une île, isolée du monde extérieur et le drame se joue entre les protagonistes présents.
Tous sont suspects et tous ont au moins un mobile pour s'être rendu coupable d'assassinat.
Tous dévoilent partiellement leur vérité, tous dissimulent quelque chose, ce qui a pour conséquence que le lecteur, tout comme la police, émet des hypothèses et part sur des pistes qui s'avèrent fausses.
Je me doutais bien que c'était forcément quelqu'un présent sur l'île qui avait commis le meurtre, mais j'avoue avoir changé plusieurs fois d'avis tant il est difficile de démêler le vrai du faux, preuve que l'auteur a bien su brouiller les cartes.

"Furioso"  de Carin Bartosch Edström est un premier roman réussi, avec une intrigue qui monte crescendo, qui tient en haleine le lecteur, et une galerie de personnages finement ciselés.
Je ne serai d'ailleurs pas étonnée que "Furioso" soit la première enquête du commissaire Ebba Schrödder ni surprise que ce personnage revienne dans, je l'espère, le second roman de Carin Bartosch Edström.

Je remercie les éditions JC Lattès pour l'envoi de ce livre.

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