vendredi 29 novembre 2013

Un village français - Saison 5



"En 1943 il y avait déjà du réseau", tel était l’un des slogans publicitaires pour cette cinquième saison de l’excellente série "Un village français".


Cette année, France Télévisions avait mis les petits plats dans les grands : un affichage publicitaire important notamment dans le métro parisien, un teaser intriguant, autant dire que la chaîne essayait d’amener le plus grand nombre de personnes à regarder ce programme.
Mais il ne fallait pas que conquérir du public et des parts d’audience, il fallait aussi récompenser de leur patience les fidèles de ce programme qui attendait cette saison depuis un et demi.
Et un an et demi c’est très long, et plus le temps passe plus le spectateur devient exigeant.


Je n’ai jamais caché que je suivais cette série depuis la première saison, qu’elle est excellente et sans doute ce qui s’est fait de mieux ces dernières années dans le milieu télévisuel.
Mais chaotique est un terme qui définirait assez bien cette cinquième saison.
Il y a de très bonnes choses dedans, mais d’autres trop longues et ennuyeuses.
Une saison en demi-teinte donc qui a tardé à se mettre en place pour ne briller totalement que dans les quatre derniers épisodes.


En cette année 1943, les créateurs de la série ont souhaité traité du Service de Travail Obligatoire – STO qui a amené de nombreux jeunes hommes à partir dans le maquis pour éviter cette obligation, beaucoup ont rejoint alors la Résistance, la répression allemande, pour conclure sur un défilé des maquisards le 11 novembre à Villeneuve, directement inspiré du défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax.
Et c’est dans une partie de ce scénario que l’ennui s’est installé.
Certes, le STO est un thème majeur de 1943, d’autant qu’il a contribué pour beaucoup à garnir les rangs de la Résistance qui n’est toujours pas armée par Londres et ne peut de ce fait mener des actions d’envergure, mais les passages dans le maquis sont longs, trop longs, répétitifs et d’un ennui … .
Dans le contexte de l’époque, il est vrai que tous ces jeunes s’ennuyaient, vivaient dans des conditions précaires, s’entretenaient physiquement et s’entraînaient avec des armes en bois à défaut de vraies, le problème c’est quand cet ennui ressenti est retranscrit dans le scénario et à l’écran.
Certes, l’un des maquisards va monter une pièce de théâtre, mais quel ennui là encore de voir et revoir les mêmes scènes de répétition, à tel point que parfois je me disais : "Oh non, encore cette fichue pièce, rien ne va se passer.".


Qui dit nouvelle saison dit aussi nouvelles têtes, mais il faut bien reconnaître qu’Antoine, chef auto-proclamé du maquis de Villeneuve tient plus souvent de la tête-à-claques que du garçon auquel on s’attache et que ses frictions avec Claude, le scénariste et metteur en scène de la pièce de théâtre, manquent de panache pour bien appuyer les différences entre ces deux garçons.
Et puis il y a Marguerite, la nouvelle maîtresse de chant sortie d’on ne sait où et qui cache on ne sait quoi.
Au final, ce personnage se révèle être intéressant mais n’a pas été bien employé au début.
Il y a toujours les valeurs sûres : Daniel Larcher bien qu’il ait été moins présent dans cette saison et en demi-teinte, relégué à un rôle de médecin de ville ; son frère Marcel Larcher, l’un des atouts de cette saison (comme de celles passées), Hortense Larcher là aussi un peu trop effacée au début et dont j’aurais aimé voir certains aspects développés (notamment celui de la relation avec sa mère) ; Raymond Schwartz plus présent que dans la saison passée ; Jean Marchetti qui passe de Jean-qui-déprime à Jean-qui-complote ; Lucienne Bériot qui explose dans cette saison ; Heinrich Müller qui n’est que l’ombre de lui-même une bonne partie de la saison ; Jeannine Chassagne toujours aussi calculatrice (et alcoolique).

Ce qui suit va révéler une bonne partie de l’intrigue, ne dites pas que vous n’aurez pas été prévenu mais il ne m’est pas possible de ne pas en parler.

Avant cette saison, j’avais fait quelques pronostics, j’ai parfois visé juste, pour d’autres j’ai été déçue.
Daniel et Marcel vont bel et bien se retrouver dans une même cellule, tous deux torturés et cela fait partie des moments forts de cette saison.
Marcel revit pendant son emprisonnement des épisodes de son enfance et de sa relation conflictuelle avec son frère, le partage de ce dur moment offre de très beaux passages entre les deux hommes qui vont se soutenir mutuellement et presque se réconcilier.
Daniel n’est pas aussi fort que son frère et il le lui montre, fier de ne pas avoir parlé mais lui demandant comment faire pour ne pas parler, ne pas craquer, parce qu’il sait où se trouve le maquis et que les allemands le savent, l’un des très beaux moments de cette saison.
Autre très beau passage avec Marcel et ses compagnons de cellule : le procès du cafard, un moment fort de cette saison qui arrivait au bon moment, celui où je commençais à désespérer avec une intrigue qui peinait à s'installer.
Ma brave Jeannine n’a pas viré résistante, ouf ! Mais qu’elle est machiavélique et calculatrice cette femme ! Elle sent le vent tourner et elle essaie de s’en sortir les cuisses propres, elle aime et veut le pouvoir, sans doute plus que son mari Philippe Chassagne qui n’est qu’ambitieux.
Le couple qu’elle forme avec le nouveau maire de Villeneuve est très représentatif de l’esprit de certaines personnes à cette époque, particulièrement ceux qui avaient choisi de collaborer.
Jean Marchetti est l’un des personnages les plus mystérieux de cette saison.
Il la commence complètement déprimé, n’ayant plus le goût à rien mais retenant en quelque sorte prisonnière une malheureuse jeune fille croisée dans la saison précédente qui lui sert de servante et d’une forme d’esclave sexuelle pour assouvir ses pulsions primaires.
C’est un homme rongé par le désamour que lui porte la femme qu’il aime, qu’il a aidé à fuir en Suisse tout en sachant qu’elle portait son enfant.
Honnêtement, je me suis dit que s’il passait toute la saison comme ça, ça n’allait pas le faire. Heureusement, il redevient un peu plus lui-même dans la deuxième moitié.
Hortense, je vous rassure tout de suite, je ne la comprends toujours pas ! (et je ne la comprendrais sans doute jamais)
Elle a un rôle moindre dans cette saison, c'est un peu dommage mais je pense qu'elle reviendra sur le devant de la scène dans la suivante.
Heirich Müller était, il ne faut pas se voiler la face, décevant durant la première moitié de la saison. Il ne faisait rien hormis se shooter à la morphine pour calmer ses douleurs, s'était enfermé dans une routine de vieux couple avec Hortense, heureusement qu'il change dans la deuxième partie pour offrir de très beaux moments.
Il y a ceux avec le fils de Marcel, créant une tension entre eux mais aussi une forme de connexion bizarre, j'attends d'ailleurs avec impatience de voir le traitement que vont en faire les scénaristes dans la saison prochaine, et surtout son attitude repentante envers Hortense, lui fier va aller s'excuser, se pourrait-il qu'il aime vraiment Hortense ?
Cette perspective a changé mon opinion sur le devenir de ces personnages.
Cette saison est sans conteste celle de Lucienne, je suis encore épatée par l'envergure du personnage et la justesse de jeu de Marie Kremer.
Auparavant effacée, nouille, molle, bref des adjectifs peu sympathiques pour la décrire, Lucienne se révèle cette saison une femme sachant garder un secret, prête à aider et n'hésitant pas à risquer sa vie pour un acte de résistance.
Certes, elle finit la saison rongée par ses remords et sa culpabilité chrétienne du baiser (voire plus) échangé avec Marguerite, mais elle a tenu la dragée haute toute la saison et c'est sans nul doute une femme vouée à passer sa vie tiraillée entre ses émotions et sa morale, la morale l'emportant à chaque fois et la laissant à jamais frustrée dans sa vie, une perspective peu alléchante.
Marie Germain dans cette saison c’est comme les marionnettes : "Ainsi font, font, font trois petits tours et puis s’en vont".
Elle apparaît à l’écran, c’est la femme fatale du maquis vêtue de pantalon, Antoine s’en amourache et elle replonge dans les bras de Schwartz, il paraît qu’elle est chef de résistance mais bon, sans arme et recherchée elle ne peut pas faire grand-chose (à part briser des cœurs dans le maquis et jouer une pièce de théâtre), j’espère que ce personnage sera plus présent dans la saison suivante.
Je ne m'attarde pas sur Suzanne, reine de la boulette 1943 (Marcel peut lui dire merci d'avoir été arrêtée) après avoir été sacrée en 1942 et 1941, j'ai même eu l'impression que les scénaristes n'ont vite plus savoir qu'en faire, elle disparaît de la série et je ne la regrette pas.
Sarah, juste le temps de la voir et de lui dire au revoir, exit, direction une destination inconnue, et si le traitement de ce personnage peut paraître léger de la part des producteurs, je trouve qu’il illustre très bien la déportation des Juifs et le terme "Nuit et brouillard" : des personnes qui disparaissent dans un semblant d’indifférence générale pour on ne sait où y devenir on ne sait quoi.
Cette saison se caractérise par des moments très mous et ennuyeux, et d'autres plus forts d'un point de vue émotionnel, comme le défilé des maquisards dans Villeneuve, les scènes dans la prison ou entre des personnages, à ce titre la scène finale dans la cour de l'école avec Lucienne disputant deux fillettes de disputant une poupée est magnifiquement métaphorique, avec une Lucienne disant qu'il n'est pas possible de réparer, faisant une allusion directe à l'exécution de Marguerite qui a lieu au même moment par un membre du réseau de résistance.
Et je dois dire que le meilleur était pour la fin, car si les scènes de théâtre m'ont ennuyée durant toute la saison, la scène clôturant cette saison est magnifique et la dernière image saisissante, mettant en lumière les quelques acteurs par les projecteurs des SS venus les capturer, visuellement c'était du plus bel effet.


Au final, je ne m'étais pas trompée sur la mort de certains personnages, particulièrement celle de Marcel, inévitable à mon sens et extrêmement bien faite.
La surprise est venue de l'exécution de Chassagne en même temps que Marcel Larcher, celle-là je ne l'ai pas vu venir mais difficile de reprocher aux scénaristes d'avoir respecté ce qui s'était passé à Oyonnax, à savoir que le maire et son adjoint ont été exécutés.
Mais je suis aussi déçue car je trouve que les scénaristes ont été trop gentils avec certains de leurs personnages et j'aurais bien vu d'autres morts parmi les résistants, un peu trop épargnés à mon goût mais heureusement sauvés par l'arrivée d'Anselme, un homme qui deviendra sans doute important par la suite dans la résistance à Villeneuve.
J'ai trouvé que le Docteur Larcher était peu présent cette saison, en tout cas il n'a toujours pas choisi de camp et je le vois de plus en plus finir la guerre terré dans un grenier.
Quant à Marchetti, difficile de dire ce qui va advenir de ce personnage trouble, tout comme je ne suis pas sûre de revoir Lucienne et son mari, a priori en partance pour la Suisse.
Au cours de cette saison, les scénaristes ont commencé à esquisser l'avenir de Jeannine, elle s'en sortira sans problème, comme les personnes de son genre à l'époque et c'est assez intéressant à voir.
Tout comme cette saison, les scénaristes ont choisi de nous montrer la femme du Préfet, une femme intelligente et sachant analyser avec pertinence la situation, guidant les choix de son mari.
Elle est très bien assortie avec Jeannine et cela fait plaisir de nous montrer ces femmes modernes et arrivistes, loin de l'image de la mère au foyer véhiculée par Pétain.
Là où j'ai changé d'optique, c'est pour Hortense. Longtemps je me suis demandée si elle allait finir tondue, aujourd'hui je la vois plutôt partir en Allemagne avec Heinrich Müller, lui-même réusissant à passer entre les mailles de la résistance.
Enfin, nul ne peut dire de quoi demain sera fait !


Pour conclure, même si la saison 5 a connu des moments de flottement (et il y en avait quand même quelques uns), j'aime toujours cette série et j'attends avec impatience la suivante qui se passera en 1944, année importante et charnière qui provoquera sans aucun doute un basculement de la série vers sa conclusion en 1945.
Vivement l'année prochaine !

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