Dans une petite ville américaine
sans histoire, le shérif Teasle interpelle un jeune vagabond et, après quelques
heures d’un interrogatoire musclé, lui ordonne de quitter la ville. Mais le
jeune homme n’entend pas être traité de cette manière et le policier découvre à
ses dépends que ce vétéran du Vietnam sait répondre à la menace. S'engage alors
un duel sans merci, une chasse à l’homme mortelle à travers les forêts, les
montagnes et les grottes du Kentucky. La police du comté, celle de l’État et
les forces d’élite appelées en renfort ne seront pas de trop pour traquer
l’ancien soldat que l’armée a transformé en une machine à survivre et à
tuer.
Des millions de spectateurs ont découvert la légende de John Rambo à
l’écran. Il leur reste à se plonger dans ce roman au final surprenant, encore
plus sombre et impossible à lâcher. (Gallmeister)
Autant l’annoncer de suite, je ne fais pas partie des millions de
spectateurs qui ont découvert la légende de John Rambo à l’écran, et cela n’est
sans doute pas plus mal car à mon avis le personnage de Rambo a dû sacrément
être dévié pour l’adaptation cinématographique et l’acteur qui l’incarne.
D’une histoire somme toute banale, il va en découler une violence
sanglante.
Parce que Rambo, jeune vagabond, refuse d’obéir au shérif Teasle lorsque
celui-ci lui fait traverser la ville en voiture afin qu’il poursuive son
chemin, et qu’il revient s’y installer, le shérif finit par l’appréhender et
c’est au terme d’un interrogatoire musclé que Rambo va s’échapper nu du
commissariat en laissant derrière lui le premier cadavre d’une longue liste : "Il s'était promis qu'il ne ferait plus jamais de mal à quiconque, et ce salaud l'avait poussé à tuer encore une fois. Si Teasle insistait, Rambo était résolu à se battre. Ce serait un combat que Teasle n'en finirait pas de regretter d'avoir déclenché.".
Il se réfugie dans la montagne mais le shérif Teasle se lance à sa
poursuite, ce qu’il ne sait pas, c’est qu’il a face à lui un ancien Béret Vert
de la guerre du Viêtnam et qui en est revenu décoré de la plus haute
distinction militaire.
Et si Teasle est un ancien de la guerre de Corée, Rambo est une machine
à tuer formée par l’armée américaine et endurci par des mois de captivité dans
des conditions inhumaines au Viêtnam, la survie il sait ce que c’est et il
connaît, et désormais il n’a plus qu’envie : faire exploser cette ville
qui n’a pas voulu de lui.
Il serait réducteur de considérer ce livre comme un face à face entre
ces deux protagonistes, il n’y a pas d’un côté le bien : le shérif Teasle,
et de l’autre le mal : Rambo, ou inversement, mais deux personnalités qui
s’affrontent tout en ayant l’une envers l’autre une forme de respect.
Certes, le livre est basé sur ce combat extrêmement violent, mais c’est
aussi une lutte pour la survie et il faut surtout savoir lire entre les lignes.
Ainsi, le fait que Rambo soit un ancien Béret Vert du Viêtnam n’est pas
innocent, en un sens l’auteur rend une forme d’hommage aux américains qui se
sont engagés dans cette guerre, tout comme celle de Corée d’ailleurs, mais il
dénonce surtout les méfaits et les conséquences de ces dernières sur l’être
humain.
Rambo n’a plus grand chose d’humain, c’est une machine à tuer forgé pour
survivre et qui n’a ni hésitation ni scrupule au moment d’appuyer sur la
gâchette ou de manier le couteau.
Sans l’entrainement subi et sans la guerre, particulièrement sa période
de captivité, il ne serait pas devenu ainsi : une machine sous une
enveloppe humaine, à la limite sans âme ni conscience.
Il fait ce pour quoi il a été formé : survivre à n’importe quel
prix et par n’importe quel moyen.
Certaines scènes sont particulièrement dures car elles montrent le
mental de Rambo qui continue malgré une présence en territoire hostile et dans
l’obscurité complète à chercher une issue.
La scène se déroulant dans l’ancienne mine est sans doute la plus
représentative de l’entrainement militaire et du mental que cela exige et à la
lecture de certaines descriptions j’étais à la limite d’avoir le poil hérissé
sur les bras.
C’est l’un des avantages du récit de David Morrell, c’est très vivant
dans les descriptions et très visuel également, ce qui permet au lecteur d’être
dans la même situation (ou presque) que les personnages.
L’auteur dénonce également l’absurdité de la guerre ainsi que le
comportement paradoxal des américains : ils sont bien contents quand des
jeunes gens s’engagent et vont se battre, mais quand ils reviennent
complètement changés psychiquement ils les rejettent et n’en veulent pas, parce
qu’ils offrent quelque chose qu’ils n’ont pas envie de voir : l’envers
d’une guerre qui ne s’est pas déroulée sur leur territoire :
"- Moi, je ne tue pas pour vivre.
- Bien sûr. Mais vous acceptez un système où les autres le font pour vous. Et quand ils reviennent de la guerre, vous ne supportez pas l'odeur de mort qu'ils trimbalent avec eux. "
- Bien sûr. Mais vous acceptez un système où les autres le font pour vous. Et quand ils reviennent de la guerre, vous ne supportez pas l'odeur de mort qu'ils trimbalent avec eux. "
De façon plus générale, j’ai aussi perçu que cette absurdité
s’appliquait en particulier à la guerre du Viêtnam.
Cette confrontation finit par prendre la forme d'une folie dans laquelle Teasle et Rambo finissent par plonger, chacun à sa manière. Ils repoussent les limites du corps humain pour aller au-delà de leurs capacités, dans le seul but que l'un finisse par anéantir l'autre, quitte à sombrer dans une forme de démence : "Je suis un, mais il ne pouvait se souvenir et il dut d'arrêter pour se reposer, le menton appuyé sur le bord d'un sillon, le soleil lui chauffant le dos. Pas s'arrêter. S'évanouir. Mourir. Bouge. Mais il ne pouvait pas bouger.".
Et puis, derrière toute cette histoire, il y a aussi l'importance de la figure paternelle, celle qui guide les choix et qui permet de devenir Homme.
Pour Teasle, elle prend la forme d'Orval, l'homme qui l'a élevé à la mort de son père; et pour Rambo il n'y en a pas vraiment mais son instructeur pourrait en quelque sorte tenir le rôle du père, Rambo vivant comme une sorte de trahison le fait qu'il se soit rallié aux policiers qui le traquent.
Et puis, derrière toute cette histoire, il y a aussi l'importance de la figure paternelle, celle qui guide les choix et qui permet de devenir Homme.
Pour Teasle, elle prend la forme d'Orval, l'homme qui l'a élevé à la mort de son père; et pour Rambo il n'y en a pas vraiment mais son instructeur pourrait en quelque sorte tenir le rôle du père, Rambo vivant comme une sorte de trahison le fait qu'il se soit rallié aux policiers qui le traquent.
David Morrell a su créer une atmosphère et un climat oppressant qui
trouvent leur paroxysme dans la fin du roman, une fin somme toute inévitable et
prévisible dès le début mais qui arrive encore à surprendre le lecteur.
"Premier sang" de David Morrell est un roman efficace et
violent sur l’affrontement de deux personnalités que tout oppose mais surtout
un plaidoyer pour la paix dénonçant les absurdités de la guerre et ses
conséquences, ainsi que la difficulté à se ré-adapter à la vie civile et en
société.
Je remercie Babelio et les Editions
Gallmeister pour l’envoi de ce livre dans le cadre de l’opération Masse
Critique.
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