jeudi 29 septembre 2016

Les anagrammes de Varsovie de Richard Zimler


Septembre 1940. Erik Cohen, vieux psychiatre juif, emménage dans le ghetto de Varsovie, chez sa nièce et son petit-neveu, Adam, qu’il adore. Réfugié dans sa propre ville, il tente de lutter contre la hantise des rafles et des camps de travail. De survivre au rationnement, à l’isolement, aux épidémies, et de protéger les siens. 
Jusqu’à cette aube où Adam est retrouvé assassiné, mutilé, son petit corps jeté sur les barbelés. Contre la peur et le silence, Erik va s’échapper du ghetto pour mener l’enquête dans un Varsovie spectral, où les plus basses pulsions humaines côtoient l’héroïsme et la grandeur. 
Parce que le moins que nous puissions faire pour nos morts est de rendre à chacun sa singularité. (Pocket)

Placer une histoire fictive dans le ghetto de Varsovie, c’était déjà un pari risqué, mais y adjoindre une enquête suite à la découverte de cadavres mutilés, c’était encore plus périlleux.
Et bien Richard Zimler s’en est bien sorti, sans tomber dans le piège de la facilité qui aurait consisté à balayer purement et simplement l’aspect historique pour se concentrer uniquement sur l’enquête, et sans non plus sombrer dans le mélodrame ou l’exagération.
L’histoire est racontée par Erik Cohen, un vieux psychiatre Juif qui revient dans ce qui est le ghetto de Varsovie (la guerre n’est donc pas encore finie).
Il revient pour y raconter son histoire et lever le voile sur les meurtres mystérieux qui y ont eu lieu en 1940/1941, dont son petit-neveu adoré Adam a été l’une des victimes.
Il est nettement plus clairvoyant qu’à l’époque lorsqu’il a emménagé dans le ghetto chez sa nièce et son petit-neveu : "Si j'avais pensé à notre exil dans le ghetto comme à un rêve et que je l'avais correctement interprété, j'aurais été plus prudent, car j'aurais alors su qu'ils nous avait transportés sur une île pour nous voler plus facilement notre avenir - et pour empêcher le reste du monde de le savoir.", et a fini par comprendre que les nazis n’allaient pas se contenter de les enfermer dans un espace restreint mais allaient les assassiner purement et simplement, ainsi que les enfants : "Les nazis veulent la mort de nos enfants car ils veulent nous priver de notre avenir.".
Il est aussi changé mais je n’en dis pas plus et laisse le lecteur découvrir par lui-même ce qui se cache derrière mes propos.

Sans faire une leçon d’histoire ou un descriptif complet des conditions de vie dans le ghetto de Varsovie, pour cela je vous invite à lire des ouvrages historiques sur le sujet, Richard Zimler a su en dresser les grands principes et les utiliser comme toile de fond pour son récit.
Il a créé une ambiance particulière, assez spectrale et frôlant presque parfois le fantastique, dans le sens où tout cela était inconcevable pour les personnes qui y vivaient et qui pourtant sombraient chaque jour un peu plus dans l’horreur, la misère, le froid, les conditions de vie insalubres, la peur.
Erik adopte alors un comportement de survie pour lui et sa famille, mais ce fragile équilibre se rompt le jour où Adam ne rentre pas et où son corps est retrouvé jeté sur les barbelés et mutilé.
Ce qui restait de lucidité va céder dans l’esprit de la mère de l’enfant et Erik n’aura plus alors qu’un seul but : découvrir ce qui est arrivé à Adam, d’autant qu’il apprend que ce n’est pas un cas isolé mais que les responsables du ghetto se sont bien gardés d’en informer la population.
Pour cela il va se faire aider de son vieil ami, il va aussi sortir du ghetto et peut-être miraculeusement finir par atteindre son but : "Et là, je pris conscience que les miracles se produisent réellement, même si - malheureusement - ils ne sont pas toujours les glorieuses manifestations de transcendance auxquelles on a toujours voulu nous faire croire.".
Car à l’intérieur comme à l’extérieur du ghetto il y a le bien qui côtoie le mal, si la noirceur de l’âme de certains est sans fond, d’autres vont au contraire essayer de lui porter secours et de l’aider dans sa quête insensée.
Au final, c’est un roman très sombre à l’ambiance bien particulière qui ne couvre même pas la totalité de la guerre, c’est dire que le paroxysme de l’horreur n’a pas encore été atteint.
L’ensemble est assez pesant, dans le bon sens du terme, car très sombre, le lecteur partage la violence et la misère qui règnent dans le ghetto.
Si j’ai pu deviner quelques ficelles, notamment celle par rapport au personnage d’Erik, par contre la vérité se cachant derrière les meurtres est difficile à trouver et est en plus assez crédible par rapport au contexte historique.

"Les anagrammes de Varsovie" est un roman sombre mêlant intelligemment intrigue policière et contexte historique.


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