En temps de guerre tous les clients sont bons à prendre. Y compris les nazis. Le second tome de la grande saga de Fabien Nury et Sylvain Vallée, unanimement saluée par la critique et les lecteurs. 1940. La guerre secoue le monde. L'ascension sociale de Joseph Joanovici le ferrailleur pourrait en être contrariée. Si ce n'est que les armées, pour fabriquer leur matériel de mort, se révèlent grandes consommatrices de métaux. Et que des métaux de toutes sortes, Joseph en a des tonnes à revendre. Très cher. Car les nazis, au moins en affaires, sont des gens très fréquentables. Même si pendant ce temps l'ombre des rafles commence à s'étendre sur la femme et les filles de Joseph l'émigré roumain... Inspirée de faits réels passés au crible de Fabien Nury et de sa formidable rigueur documentaire, Il était une fois en France dresse un tableau sans concession de la collaboration et de la complexité de l'âme humaine. Toujours admirablement dessiné par Sylvain Vallée, Joseph Joanovici est de ces personnages à l'épaisseur rare et toujours aussi dérangeante... Une série déjà incontournable ! (Glénat)
S’il avait été possible d’éprouver un
peu de compassion à l’égard de Joseph Joanovici, elle fond ici comme neige au
soleil.
Il est peu courant en littérature
qu’un personnage aussi peu sympathique fasse office de personnage principal,
ici c’est pourtant le cas mais je n’irai pas jusqu’à dire qu’il provoque une
réaction épidermique.
Son passé permet d’expliquer
partiellement pourquoi il est ainsi, mais n’excuse pas sa conduite envers sa
famille : il délaisse sa femme et ses filles et vit ouvertement avec sa
secrétaire Lucie, la bien-nommée Lucie-Fer, il charge son frère de veiller sur
sa famille pendant qu’il négocie des affaires avec les allemands et s’enrichit,
énormément, toujours plus sûr de lui et plus revanchard sur la vie : "Je nous ai construit une vie dans ce pays. J'ai fait fortune dans ce pays. Et maintenant tu veux me voir fuir comme les autres ? Non, pas question ... pas moi.".
Il n’empêche que l’occupant sait bien
lui rappeler son statut de juif : "Vois-tu, Joseph pour moi tu n'es qu'un sale youpin !", ce qui ne démonte pas pour autant l'assurance de Joseph Joanivici : "Combien ça coûte de ne plus l'être ?", et la scène finale où il obtient son
certificat d’aryanisation est violente d’un point de vue psychologique.
C’est là que réside toute la
complexité du personnage : il gère ses affaires mais il protège aussi sa
famille en la mettant à l’abri du besoin et des rafles qui deviennent plus
nombreuses tout en se montrant généreux avec d'autres personnes : "Je le connais comme honnête homme, serviable et grand travailleur. L'argent qu'il gagne, il le donne en partie à ceux qui sont plus malheureux que lui et je ne crois pas que ce soit dans les habitudes d'un juif.".
Difficile de cerner ce personnage,
mais malgré le peu d’attrait qu’il exerce sur moi je prends plaisir à lire son
histoire racontée par Fabien Nury et mise en image par Sylvain Vallée.
Encore une fois, je reconnais un gros
travail de recherches pour bâtir le scénario, l’ambiance de l’époque est bien
reconstituée et les dessins de Sylvain Vallée servent bien l’histoire.
Je trouve que les personnages sont
expressifs et que cela reflète leurs caractères.
Ainsi, Eva, la femme de Joseph, a le
visage taillé à coup de serpe, une bouche dure et des traits crispés, il faut
dire qu’elle est agacée par l’attitude de son mari et que je ne peux que lui
donner raison ; Lucie est d’une certaine beauté mais ses yeux reflètent
qu’il vaut mieux se méfier d’elle ; Joseph sous son aspect rond n’en est
pas pour autant jovial ; quant aux allemands ils sont peu sympathiques
sans que cela tombe toutefois dans le cliché.
Nettement moins brouillon que le
précédent opus, "Le Vol Noir des Corbeaux" dresse une France sombre
dans l’époque tourmentée de la Seconde Guerre Mondiale à travers le personnage
tout aussi sombre et complexe qu’était Joseph Joanovici.
Une belle saga littéraire a vu le
jour.Livre lu dans le cadre du challenge Destination PAL
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