dimanche 9 novembre 2014

Ru de Kim Thúy


Une femme voyage à travers le désordre des souvenirs : l’enfance dans sa cage d’or à Saigon, l’arrivée du communisme dans le Sud-Vietnam apeuré, la fuite dans le ventre d’un bateau au large du golfe de Siam, l’internement dans un camp de réfugiés en Malaisie, les premiers frissons dans le froid du Québec. Récit entre la guerre et la paix, Ru dit le vide et le trop-plein, l’égarement et la beauté. De ce tumulte, des incidents tragi-comiques, des objets ordinaires émergent comme autant de repères d’un parcours. En évoquant un bracelet en acrylique rempli de diamants, des bols bleus cerclés d’argent ou la puissance d’une odeur d’assouplissant, Kim Thúy restitue le Vietnam d’hier et d’aujourd’hui avec la maîtrise d’un grand écrivain. (Liana Levi)

Dans "Ru", une femme voyage, de façon décousue, dans ses souvenirs : ceux de son enfance dorée à Saigon, l'arrivée des communistes dans le Sud-Vietnam, la fuite sur un boat-people, le camp de réfugiés en Malaisie et enfin l'arrivée au Québec et la découverte du froid.
La narratrice mélange le passé et le présent, sa vie d'enfant et celle de femme qui a désormais découvert le plus grand amour qui puise exister au monde : celui pour ses enfants.
C'est une femme qui se raconte, parle de ses doutes, de son cheminement, de la fin de son enfance, de la peur, de la crainte, de la difficile cohabitation avec de jeunes communistes avec qui sa famille a fini par nouer une forme de relation étrange : "Après cet incident, nous ne savions plus s'ils étaient des ennemis ou des victimes, si nous les aimions ou les détestions, si nous les craignions ou en avions pitié. Et eux ne savaient plus s'ils nous avaient libérés des Américains ou si, au contraire, nous les avions libérés de la jungle vietnamienne.", la découverte de l'inconnu et l'apprentissage d'un nouveau pays, de nouvelles coutumes et d'une nouvelle langue, à l'instar de la mère qui l'oblige à aller faire la moindre course pour qu'elle apprenne l'anglais, faisant pleurer la fillette qui ne comprendra que plus tard que sa mère faisait cela pour son bien : "J'ai aussi compris plus tard que ma mère avait certainement des rêves pour moi, mais qu'elle m'a surtout donné des outils pour me permettre de recommencer à m'enraciner, à rêver.".
Mais elle évoque aussi son retour au Vietnam à l'âge adulte, sa famille et les relations qu'elle entretient avec eux.
Mais surtout, ce que j'ai trouvé qui ressortait du récit, c'est l'hommage qu'elle rend à ses parents, aux sacrifices qu'ils ont fait pour permettre à leurs enfants de connaître une vie meilleure : "Mes parents nous rappellent souvent, à mes frères et à moi, qu'ils n'auront pas d'argent à nous laisser en héritage, mais je crois qu'ils nous ont déjà légué la richesse de leur mémoire, qui nous permet de saisir la beauté d'une grappe de glycine, la fragilité d'un mot, la force de l'émerveillement. Plus encore, ils nous ont offert des pieds pour marcher jusqu'à nos rêves, jusqu'à l'infini.".
Kim Thúy arrive finalement à restituer le Vietnam d'hier et d'aujourd'hui d'une façon très évocatrice, en utilisant des petits riens insignifiants qui finissent par vouloir dire beaucoup.
Il m'est difficile de classer ce livre, d'ailleurs je m'interroge de savoir qu'elle est la part de fiction et qu'elle est celle de vécu par rapport à l'auteur.
Sans doute un savant mélange des deux et peut-être qu'au final toute la beauté de ce livre réside aussi dans ce doute permanent, en plus des évocations particulièrement poétiques qui ponctuent ce récit exclusivement constitué d'impressions et de souvenirs qui reviennent dans le désordre pour finalement former un tout cohérent.
Un joli tour de passe-passe de l'auteur qui signe un magnifique et charmant premier roman que j'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir.

Souvent drôle, cette confession dévoile une femme sensible dans laquelle s'entremêle la culture Vietnamienne et celle plus occidentale du Québec
"Ru" est une lecture intéressante et poétique qui permet de faire tomber des barrières et d'ouvrir les yeux sur le monde.

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