vendredi 7 décembre 2012
Le promeneur de Jirô Taniguchi et Masayuki Kusumi
À la faveur des petits évènements ordinaires de sa vie professionnelle et personnelle (la recherche d’un vélo disparu, une réunion de travail au sommet d’une tour de bureaux, etc.), un quadragénaire se laisse aller à des escapades impromptues au hasard de la géographie urbaine, sur les innombrables chemins de traverse qu’offre la grande ville – pour peu qu'on sache les voir et s’y abandonner… Une balade après l’autre, cette pulsion vagabonde prendra bientôt les allures d’un cheminement sentimental au fil des méandres de la mémoire, ponctuées d’images inopinément ressurgies de l’enfance et de la jeunesse du promeneur. Conçues par Masayuki Kusumi, déjà scénariste des histoires culinaires du Gourmet solitaire, ces déambulations nostalgiques, à la tonalité nonchalante et chaleureuse, ont initialement été publiées au Japon dans un magazine d’art de vivre, Tsuhan Seikatsu. Interprétées dans le registre intimiste dont Jirô Taniguchi a fait son signe distinctif depuis L’Homme qui marche, transfigurées par son humanisme pudique et serein, elles acquièrent une résonance universelle, dans laquelle se retrouveront les nombreux fidèles du maître japonais. (Casterman)
"La promenade ce n'est pas du tourisme. C'est le plaisir de marcher, tranquillement, au gré de ses envies, sans objectif précis.", tel est le credo de ce quadragénaire, personnage principal du récit, et que le lecteur va suivre au gré de ses déambulations.
Tous les prétextes sont bons pour se promener : une course à faire, un départ tardif de chez un ami, un chien à promener et surtout ne pas suivre de chemin tracé mais se laisser guider par le hasard : "Dans ce genre de quartier, pas besoin de guide. Rien ne vaut de marcher au hasard.".
Ces promenades sont aussi l'occasion pour le narrateur de retrouver des amis d'enfance, de faire le point sur leur vie et par conséquent sur la sienne : "En voyant la vie de bohème que menait Imori après la fac ... je m'étais inquiété pour lui, mais ... au fond, c'est pas un si mauvais mode de vie. C'est plutôt pour moi que je devrais m'inquiéter. "Je dois me lever tôt demain" ... c'est pas exaltant.", et finalement de se dire que sa vie n'est peut être pas si rêvée que cela, et qu'il a sans doute dû pour y arriver abandonner beaucoup de rêves.
Car c'est aussi la force de cette histoire, au delà des promenades il y a surtout une réflexion plus personnelle, plus philosophique qui se met en place, d'abord pour le personnage principal : "Et nous, qu'est-ce qu'on pourra laisser derrière nous dans 50 ans ?", puis par ricochet pour le lecteur.
Au final, ce quadragénaire, c'est un peu de chacun de nous, il fait une rétrospective de sa vie et s'interroge sur ses choix, sur le bonheur, et il réalise alors que c'est en marchant qu'il est libre.
La marche le libère à la fois du carcan de sa vie mais lui offre aussi une forme de liberté qu'il a sans doute beaucoup cherché sans réussir à l'atteindre.
C'est à travers huit promenades illustrées par Jirô Taniguchi que le scénariste Masayuki Kusumi va amener son personnage, et le lecteur, à s'interroger sur le sens de la vie et de la liberté.
L'histoire est simple mais efficace, l'auteur va à l'essentiel et arrive à mettre en valeur les idées qu'il cherche à faire passer.
Quant aux dessins, ils sont exclusivement en noir et blanc mais, comme dans les précédentes oeuvres de Jirô Taniguchi, cela ne m'a absolument pas gênée car l'histoire est assez poétique pour permettre de se passer de couleurs.
Les dessins sont très beaux et je ne saurai pas trop qualifier cette oeuvre, elle relève à la fois du manga mais également de la bande dessinée occidentale en ce qui concerne le graphisme des personnages.
Je suis une nouvelle fois sous le charme des dessins de Jirô Taniguchi et j'apprécie à chaque fois plus ce dessinateur au travers de ses oeuvres variées et toujours poétiques.
J'ai également apprécié en fin d'ouvrage l'interview de quatre pages de Jirô Taniguchi qui permet d'apporter quelques précisions sur le livre ainsi qu'un nouvel éclairage sur la lecture, la genèse et la conception de l'histoire.
"Le promeneur" est un manga/bande dessinée fort agréable, qui se lit avec beaucoup de plaisir et qui subjugue le lecteur par la beauté et la poésie des dessins de Jirô Taniguchi, auteur/dessinateur que, décidément, j'apprécie énormément.
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