Cinq hommes sont partis à la guerre, une femme attend le retour de deux d’entre eux. Reste à savoir s’ils vont revenir. Quand. Et dans quel état. (Les Editions de Minuit)
Août 1914, la guerre vient d’être déclarée.
Anthime, trois de ses amis, et Charles, font partie des
hommes mobilisés de ce village de Vendée.
Ils sont habillés, armés, et les voilà partis pour les
Ardennes où pendant plusieurs jours il ne se passe pas grand-chose jusqu’à la
première montée au front : "Dès lors il a bien fallu y aller :
c’est là qu’on a vraiment compris qu’on devait se battre, monter en opération
pour la première fois mais, jusqu’au premier impact de projectile près de lui,
Anthime n’y a pas réellement cru.".
Restée là-bas, il y a Blanche, l’héritière d’une usine
fabriquant des chaussures.
Elle attend le retour de deux des cinq hommes, mais
reviendront-ils ? Si oui, dans quel état ?
C’est avec sobriété que Jean Echenoz évoque la guerre de
14-18 à travers quatre personnages masculins, mais aussi avec un certain
lyrisme : "Tout cela ayant été décrit mille fois, peut-être n’est-il
pas la peine de s’attarder encore sur cet opéra sordide et puant. Peut-être
n’est-il d’ailleurs pas bien utile non plus, ni très pertinent, de comparer la
guerre à un opéra, d’autant moins quand on n’aime pas tellement l’opéra, même
si comme lui c’est grandiose, empathique, excessif, plein de longueurs
pénibles, comme lui cela fait beaucoup de bruit et souvent, à la longue, c’est
assez ennuyeux.".
Sans s’attarder sur les horreurs ou la dureté des combats,
il parle de ce qui lui paraît essentiel et représentatif de ce qu’a été cette
guerre, notamment l’incertitude des premiers jours, le manque d’équipements,
les habits voyants, l’optimisme de certains, la dureté des conditions de vie au
front dans les tranchées avec la boue, les poux, les rats, les désertions volontaires
ou non et les sanctions qui suivaient, les bombardements aériens et
l’apparition des gaz, jusqu’à l’enlisement des combats assez vite en
1914 : "A force d’avancer les uns contre les autres, jusqu’à se
retrouver sans plus pouvoir, de part et d’autre, étendre ses positions, il
devait arriver que cela se figeât en face-à-face : ça s’est figé dans un
grand froid, comme si celui-ci gelait soudain le mouvement général des troupes,
sur une longue ligne allant de la Suisse à la mer du Nord.", et les
batailles pour gagner une ou deux tranchée(s) ou les défendre.
L’auteur alterne les points de vue entre Charles pendant un
temps, Anthime et Blanche, passant du front à la vie civile.
Je reprocherais à son style d’être à tel point détaché de
tout sentiment ou presque que finalement en tant que lecteur je n’ai pas pu
ressentir trop d’émotions par rapport au destin des personnages, même si je
reconnais que c’est très bien écrit et que l’essentiel y est.
Je suis restée détachée au cours de ma lecture, la fin est
d’ailleurs assez prévisible, même si j’ai pris un certain plaisir à lire les
tribulations d’Anthime dans une période de l’Histoire qui m’intéresse.
"14" de Jean Echenoz propose une vision
relativement elliptique de la guerre de 14-18 mais néanmoins intéressante à
travers le prisme de cinq hommes et d’une femme dans un style épuré allant à
l’essentiel, une œuvre brute comme le fut cette guerre.
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