Lea danse, jetée à corps perdu dans la perfection du mouvement. Elle est chorégraphe par nécessité. Lea aime, mais ne peut s'abandonner à Bruno, peintre de l'immobile. En pleine tempête, elle part vers l'océan retrouver sa mère, celle qui s'est toujours tue. Alors ont lieu l'épreuve de la parole et celle de l'écoute. Jusqu'où une mère peut-elle dire ? Jusqu'où une fille peut-elle entendre ? C'est ce péril fertile de la parole partagée qui est au coeur du roman. Il conduira au corps d'une jeune fille de seize ans livré dans une maison close pendant la guerre, à Naples. Il conduira à l'énigme de l'amour qui consent et soumet. il conduira au mystère de l'enfantement.
Par le jeu de onze tableaux dévoilant la vie des absents en contrepoint de la ligne narrative, dans une langue retenue et vibrante, Jeanne Benameur chorégraphie les secrets de la transmission et la fervente assomption des mots qui délivrent. (Actes Sud)
Si le titre emprunte une technique utilisée en photographie,
l’auteur met en lumière dans ce roman deux portraits de femmes, une mère et sa
fille.
Il y a tout d’abord Lea, une jeune femme de trente-huit ans,
qui vit par et grâce à la danse : "Seule, dans le jour qui vient, par
des exercices répétés, elle tisse ses liens avec l’air. Une grammaire sensible,
improbable, à réexpérimenter chaque matin.", connaît une histoire d’amour
compliquée avec Bruno, un peintre, compliquée parce qu’elle sent quelque chose
en elle qui la freine dans sa vie ans pouvoir mettre un nom sur cette
chose : "Elle a renoncé à connaître l’origine de la guerre en elle.
Après tout, le champ ignore la main qui pose la mine.".
Et puis il y a Romilda, sa mère, qui garde un secret depuis
trop longtemps et qui pèse dans sa relation avec sa fille : "Non, il
y a des choses qu’on ne peut pas dire à sa fille. Jamais.", qu’elle va
finalement profiter d’une tempête pour lui révéler.
Lea dans : "Danser c’est écrire avec tout son
corps.", mais cela ne lui suffit pas, aussi part-elle rejoindre sa mère
pour avoir enfin une explication qui se trouve à Naples, pendant la Guerre.
Alternant passé et présent, Jeanne Benameur dresse le
portrait d’une jeune fille exploitée sexuellement dans le Naples des années
1940, qui finira par apprendre à se détacher d’elle-même : "Romilda a
un prix. Elle apprend. A n’être plus personne.", aveuglée par l’amour
qu’elle porte à son exploiteur, un français se prénommant Jean-Baptiste, et des
répercussions que son silence sur son passé aura sur sa fille Lea, près de
quarante ans après.
Un passé qui traverse une génération pour empêcher Lea de
s’épanouir dans le présent et de vivre enfin l’amour : "Aimer c’est
juste accorder la lumière à la solitude.", d’apprendre à se détacher de la
solitude dans laquelle elle s’est forgée.
C’est de façon très pudique et concise que Jeanne Benameur
livre cette histoire particulièrement belle, dans un style éclatant et un
français frôlant la perfection.
Sa plume est nette, sans bavure, avec un zest de poésie et
de lyrisme pour décrire l’agitation intérieure de Lea.
J’ai trouvé absolument magnifique son style d’écriture et
j’ai été portée par cette histoire et ces deux personnages féminins qui ont
peur, chacune à leur manière, d’exprimer leurs tourments intérieurs, par
crainte du jugement des autres et surtout celui de l’une envers l’autre.
Une histoire forte comme j’aime à en lire et qui colle
encore à la peau et à l’esprit une fois le livre refermé.
"Laver les ombres", livre au titre intrigant,
recèle une merveille littéraire écrite dans un style pur et poétique, un
magnifique voyage littéraire à travers deux générations et deux époques et une
formidable découverte d’une auteur qui a su me charmer par sa plume et dont je
vais approfondir l’œuvre.
Livre lu dans le cadre du Challenge Il Viaggio
Jeanne Benameur fait de plus en plus de conquêtes, mais je doit dire que je n'ai rien lu d'elle. Faudrait peut-être que je m'y penche.
RépondreSupprimerPremière lecture et un coup de coeur, je vais continuer à lire cette auteur.
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