Dans le café où elle a ses habitudes, une trentenaire, Tsukiko, fait la connaissance d’un homme solitaire et élégant, de plus de trente ans son aîné. Elle réalise qu’elle le connaît : il fut autrefois son professeur de japonais. Elle est célibataire, il est veuf. Complices, ils prennent l’habitude de se revoir dans le même café, au hasard de leur emploi du temps, puis, bientôt, d’improviser des sorties ensemble. Insensiblement, à petites touches légères, une connivence s’établit, puis une véritable affection, et peut-être même… Des rencontres qui s’entrecroisent au fil du hasard ou du désir, chacune menée comme une histoire à part entière, pour un récit pudique et délicat, tissé de bonheurs fugaces et d’enchantements saisis au vol. Ce tome 2 des Années douces met un point final à l’adaptation que propose Jirô Taniguchi du beau livre d’Hiromi Kawakami. (Casterman)
Suite et fin de l’adaptation du
roman de Hiromi Kawakami par Jirô Taniguchi, avec l’origine et la construction
des sentiments au cœur de ce volume.
Le lecteur retrouve Tsukiko,
cette trentenaire célibataire qui a développé un lien affectif avec l’un de ses
anciens professeurs qu’elle appelle "le maître", sauf que dans la
première partie elle va tout faire pour étouffer le sentiment qu’elle ressent
comme on se soigne d’un rhume, sans succès : "Je suis peut-être d’une
nature qui ne fait pas bon ménage avec le temps".
Elle finit par avouer la nature
de ses sentiments au maître : "Ce ne sont pas des sottises ! Maître ! Je vous aime ! ", et s’il faudra quelques temps à ce
dernier il finira par lui demander : "S’il en est ainsi … puis-je
vous demander d’accepter de me fréquenter sur la base d’une relation
amoureuse ?", ce à quoi Tsukiko lui répondra : "Moi, ça
fait un bon moment que je suis complètement amoureuse de vous !".
Il y a toujours autant de beauté
et de pudeur dans cette adaptation.
Tsukiko est une jeune femme somme
toute banale et c’est justement cette normalité et ses défauts qui la rendent
si attachante.
Ce deuxième volume est une
réflexion intéressante sur la construction du sentiment amoureux et le fait que
ce soit Tsukiko qui aime d’abord le maître est un bon parti et donne du corps à
l’histoire.
Le "je" narratif de
Tsukiko finit par céder la place au "nous" : "Nous nous
parlions avec gravité. Nous étions toujours sérieux. Même quand nous
plaisantions. Nous étions sérieux. D’ailleurs, les thons aussi étaient graves. Et
les bonites aussi. Au fond, la plupart des êtres vivants sont sérieux.",
et même au cours de leur relation amoureuse elle continuera de l’appeler
"maître", même séparés par la mort son véritable nom restera celui
d’un inconnu : "Harutsuna Matsumoto. C’était comme le nom d’un
inconnu.".
J’aime toujours autant le noir et
blanc, l’absence de couleurs et le travail sur l’intimité fait par Jirô
Taniguchi.
Les dessins sont de toute beauté,
ils sont très précis et détaillés et arrivent à exprimer des sentiments
complexes.
Chaque chapitre se détache et
même si le style est un peu différent (un voyage sur une île, un rêve) le
lecteur peut toujours y entrer facilement.
Comme dans le premier tome, les
repas jouent un rôle important et les dessins donnent envie de goûter à tous
ces plats.
Les deux derniers chapitres,
"Parade", sont plus déconnectés du reste de l’histoire, mais ils
permettent une incursion dans le fantastique, avec l’apparition de Tengus, qui
offre une dimension de rêve et permet de ne pas laisser un goût dramatique une
fois le manga refermé.
J’ai décidé de me lancer dans la
découverte des mangas, genre que jusque là je repoussais, et je ne sais pas si
c’est le fruit du hasard ou une bonne pioche (ou les deux), mais mon choix pour
"Les années douces" est une bonne entrée en matière qui me donne
envie de continuer à découvrir ce genre littéraire.
Avec "Les années
douces", livre oscillant entre la bande dessinée occidentale et le manga,
Jirô Taniguchi offre une adaptation extrêmement réussie du roman de Hiromi
Kawakami que j’ai désormais envie de lire, où la pudeur, la beauté et l’amour
ont une place prépondérante.
Il est à gager que je n’oublierai
pas de sitôt cette lecture et que même longtemps après avoir refermé ce livre
la magie continue d’opérer.
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